Le geste des sénateurs en faveur du compostage des boues d'épuration en mélange suffira-t-il à rassurer des professionnels de la valorisation organique, de l'assainissement et des associations d'élus ? À l'occasion des discussions sur le projet de loi économie circulaire (1) , les parlementaires ont en effet précisé qu'un texte réglementaire déterminerait les conditions dans lesquelles les boues d'épuration pourront être traitées par compostage, seules ou conjointement avec d'autres matières utilisées comme structurants. L'opération devra toutefois permettre d'améliorer les caractéristiques agronomiques des boues.
Autre condition fixée : que les matières ajoutées aux boues soient issues de matières végétales. « Si le mélange de déchets présente un intérêt pour les opérations de collecte et de traitement, il soulève de nombreux problèmes pour la valorisation en agriculture : un risque inacceptable de pollution des sols et d'insécurité sanitaire des aliments du fait de la qualité inconnue des matières entrantes ; une surface agricole polluée plus importante en cas de problème post-épandage ; une perte de traçabilité du fait des origines diverses des déchets, complexifiant la définition de la responsabilité en cas de problème post-épandage, a justifié Jean-Louis Lagourgue, sénateur Les indépendants de la Réunion. L'évolution vers une économie circulaire ne doit pas être au détriment de la sécurité sanitaire des aliments et de la gestion des risques environnementaux. »
La directive cadre sur les déchets veut limiter les mélanges
À l'origine des tourments des acteurs sur le terrain en faveur du compostage des boues ? La directive-cadre sur les déchets. L'un des objectifs de celle-ci est en effet de privilégier la collecte séparée et de limiter le mélange de différentes catégories de déchets pour optimiser leur valorisation. Elle demande ainsi aux États-membres que leurs biodéchets soient, soit triés et recyclés à la source, soit collectés séparément et non mélangés avec d'autres types de déchets, au plus tard le 31 décembre 2023. La directive ouvre toutefois la possibilité à des exceptions et dérogations.
Parmi les signaux qui ont contribué à alimenter leurs craintes, la loi EGalim, qui a permis la sortie du statut de déchet de l'ensemble des matières fertilisantes et supports de culture (MFSC) fabriqués à partir de déchets, à l'exception des boues d'épuration.
« Seules les filières vertueuses qui collectent les biodéchets triés à la source et les traitent sans mélanges sont garantes de la qualité du fertilisant », indiquait également le volet agricole de la feuille de route pour l'économie circulaire.
Aujourd'hui, le code de l'environnement permet le mélange de boues provenant de stations d'épuration distinctes, ainsi que de boues et d'autres matières utilisées comme produits structurants. La condition toutefois : que cette opération conduise à améliorer la valeur agronomique des boues concernées. L'épandage est également soumis à une autorisation administrative préalable. Il répond à un programme d'épandage et doit s'inscrire dans un dispositif de suivi.