La France ne va pas encore abandonner le charbon de sitôt. De ce jeudi 30 juin au 21 juillet, le gouvernement soumet à la consultation publique un projet de décret prévoyant de rehausser le temps de fonctionnement des centrales à charbon pour l'hiver prochain. « Compte tenu de la faible disponibilité des centrales nucléaires (du fait des suites de la crise sanitaire et des problèmes de corrosion sous contrainte) et des risques sur l'approvisionnement en gaz résultant de la guerre en Ukraine, (…) faire fonctionner les centrales à charbon plus que ce que permet le plafond actuel permettrait de limiter le risque sur la sécurité d'approvisionnement en électricité », affirme le gouvernement.
Seule la centrale de Cordemais (Loire-Atlantique), qui comprend deux tranches de 600 mégawatts (MW) chacune, fonctionne encore. La centrale de Saint-Avold (Moselle), dotée d'une dernière tranche de 600 MW, a été arrêtée en mars dernier, conformément à la loi Énergie-climat. Elle n'a néanmoins pas fermé pour autant et reste donc capable de redémarrer.
2 500 heures de fonctionnement supplémentaires…
Pour rappel, en vertu de cette même loi, le décret du 26 décembre 2019 a instauré un plafond d'émissions autorisées fixé, en temps normal, à 0,7 kilotonne d'équivalents dioxyde de carbone par mégawatt (ktCO2e/MW) par an, soit 700 heures de fonctionnement chaque année pour chaque centrale. L'hiver dernier, un décret a modifié ce seuil maximal pour des soucis de sécurité d'approvisionnement : il a été rehaussé à 1 ktCO2e/MW jusqu'à fin février. Le plafond actuel, temporairement rabaissé à 0,6 ktCO2e/MW jusqu'à la fin de l'année, est ensuite entré en vigueur.
… Contre le paiement d'une « obligation de compensation »
Concrètement, en admettant que les énergéticiens décident d'utiliser cette hausse exceptionnelle au maximum de son potentiel durant l'automne et l'hiver prochains, les centrales émettraient l'équivalent de 4,5 millions de tonnes de CO2 supplémentaires. Cela étant, le projet de décret (1) prévoit une « compensation carbone », en plus des obligations de restitution de quotas dans le cadre du marché carbone européen.
Cette compensation devra passer par le paiement d'une « obligation » avant le 31 mai 2023 d'un montant de 27,50 euros par tonne d'équivalent CO2 à compenser. L'ensemble des obligations viendra alimenter un fonds de financement de « projets de réduction des émissions de gaz à effet de serre ou d'augmentation de l'absorption de CO2 », tels que la reconstitution de peuplements forestiers dégradés, l'accompagnement « vers des pratiques agricoles vertueuses », la plantation de haies ou « l'utilisation de matériaux issus du réemploi dans la rénovation énergétique des bâtiments ». Les projets en question, ne prédatant pas le 1er janvier 2020, devront être achevés au moins au bout de six ans.