En 2005, la Stratégie thématique européenne pour la pollution européenne a d'ailleurs émis des recommandations allant dans ce sens et a souligné l'intérêt de considérer de manière approfondie les possibles synergies et les éventuels antagonismes entre les politiques de gestion de la qualité de l'air et du changement climatique. Car certaines stratégies mises en œuvre pour réduire les émissions de gaz à effet de serre ont un impact négatif sur la qualité de l'air et inversement.
Deux problématiques liées agissant réciproquement l'une sur l'autre
Le changement climatique et la pollution atmosphérique sont tous deux principalement causés par des émissions polluantes naturelles ou liées à l'activité humaine. Si la qualité de l'air est dégradée par les oxydes de soufre, les oxydes d'azote, les composés organiques volatils, les monoxydes de carbone, les particules primaires et secondaires et l'ozone, le changement climatique est lié aux émissions de gaz à effet de serre, en partie dues aux activités humaines. Si ces deux phénomènes se retrouvent autour de ce point, ils sont également étroitement liés et exercent une influence l'un sur l'autre.
La formation de l'ozone troposphérique, c'est-à-dire de ''mauvais'' ozone en opposition au bon ozone stratosphérique qui filtre les rayons UV solaires, à partir de polluants atmosphérique entraîne une augmentation de fond en ozone, et ainsi un accroissement de l'effet de serre. L'ozone perturbe également la productivité des végétaux et donc leur capacité d'absorption de CO2, phénomène qui conduit finalement à une augmentation de l'effet de serre.
Les particules ont elles aussi un impact sur l'effet de serre : si les sulfates, nitrates et particules organiques entraînent une baisse de celui-ci en entraînant un forçage radiatif négatif, les particules de suie entraînent son augmentation par un effet inverse, le forçage radiatif positif. Quand aux aérosols, ils peuvent modifier localement le climat en transformant la structure des basses couches de l'atmosphère et en augmentant la fréquence des épisodes de brouillard au sol.
De son côté, le climat a lui aussi un impact sur la pollution atmosphérique. A l'échelle régionale, l'augmentation de la température moyenne et des pics de température extrême, tels que l'épisode d'août 2003, accentuent la pollution atmosphérique. La recrudescence d'épisodes de sécheresse devrait multiplier les feux de forêts, entraînant des émissions de particules de suie et d'oxydes d'azote, et la diminution des précipitations dans le Sud de l'Europe devrait entraîner une aridification, créant des conditions plus favorables au soulèvement des poussières.
A l'échelle globale, plusieurs phénomènes pourraient entraîner des modifications de la dynamique et de la composition atmosphériques. L'augmentation de la vapeur d'eau, la modification des échanges stratosphère - troposphère pourraient en effet modifier la concentration de fonds des polluants.
Pour une gestion coordonnée de ces phénomènes
Si ces deux problématiques exercent une influence plus ou moins connue l'une sur l'autre, la mise en œuvre de politiques de gestion de l'une peut également avoir un impact parfois négatif sur l'autre. Si en règle générale, en réduisant les émissions de gaz à effet de serre, les émissions de polluants atmosphériques sont réduites et inversement, ce n'est pas toujours le cas. Dans certaines situations, les initiatives mises en place pour lutter contre un peuvent être préjudiciables à l'autre, d'où l'intérêt de mener des politiques coordonnées.
L'utilisation de la biomasse en remplacement des énergies fossiles constitue l'exemple le plus probant. Pour lutter contre l'effet de serre, de nombreuses politiques ont appuyé le développement de la biomasse. Or, si la combustion de la biomasse (bois ou autres végétaux) s'avère neutre en CO2 en tant que source d'énergie (les végétaux absorbent autant de CO2 pendant leur croissance qu'ils n'en rejettent lors de leur combustion), la plupart des équipements utilisés étant obsolètes, ils n'éliminent pas les émissions de polluants atmosphériques néfastes pour la santé humaine.
Le développement des véhicules diesel, au détriment des véhicules essences, a lui aussi un impact sur la pollution atmosphérique. Si le diesel est un carburant plus efficace que l'essence (il produit moins de gaz à effet de serre au kilomètre parcouru), sa combustion produit plus de particules polluantes que celle de l'essence. S'il est possible de réduire ces émissions en utilisant des filtres à particules ou du diesel à basse teneur en soufre, toutes les émissions de polluants atmosphériques ne sont pas pour autant éliminées.
A contrario, certaines mesures mises en œuvre pour réduire les pollutions atmosphériques sont énergivores et entraînent donc des émissions accrues de gaz à effet de serre.
Ces différents exemples soulevés par les scientifiques démontrent la nécessité d'engager des politiques intégrées visant à réduire les différents types d'émissions. L'International institute for applied systems analysis (IIASA) a démontré récemment l'effet bénéfique de politiques combinées, tant du point de vue des coûts de gestion que des effets. De nombreux travaux scientifiques sont actuellement menés afin d'établir les meilleurs compromis, mais aussi d'identifier les mesures qui pourraient avoir des effets contraires.