Si le ministre de l'agriculture, Bruno Le Maire , lors de sa visite sur le lieu de sabotage le 24 août dernier, a déclaré que le gouvernement mettrait ''à la disposition de l'Inra les moyens financiers nécessaires'' pour relancer les recherches interrompues, réaffirmant ainsi son soutien à ces études sur les OGM, d'autres voies s'élèvent pour dénoncer ces expériences en plein champ. Car des moyens de lutte alternatifs existent. Comme la mise en jachère, solution efficace, préconisée par la viticulture biologique, mais jugée lourde à supporter économiquement par les exploitants traditionnels.
60 % du vignoble français touché par le court-noué
La maladie du court-noué touche plus de 60% du vignoble français. Décrite depuis 160 ans, elle provoque une baisse de la production, jusqu'à 80% en moins, selon l'Inra. Les vignes jaunissent, les entre-nœuds se raccourcissent, les rameaux s'aplatissent ou se dédoublent, les grappes sont plus petites et beaucoup moins nombreuses.
À l'origine de cette maladie, un ver microscopique, le nématode, porteur des virus Xiphinema index (vecteur du GFLV, grapevine fanleaf virus) et Xiphinema diversicaudatum (vecteur du ArMV, arabis mosaïc virus). Pour se nourrir, le nématode pique les racines et transmet le virus lorsqu'il en est porteur. La contamination se fait soit de parcelle en parcelle voisine (le nématode se déplace de 1,50 m par an), soit par ravinement ou encore par des porte-greffes et des greffons infectés.
Repos des sols versus plante résistante
Le court-noué est impossible à éradiquer. Il faut donc lutter de manière préventive, contre le nématode. Deux solutions sont envisagées aujourd'hui : faire en sorte que les sols soient exempts de nématodes porteurs du virus ou développer des plants résistants à ces vers.
Si la lutte chimique est rendue impossible par l'interdiction progressive des substances actives (les nématicides) utilisées pour désinfecter les sols, le seul moyen actuel pour obtenir des sols exempts de nématodes est la jachère. C'est en outre la méthode préconisée dans le cahier des charges de la viticulture biologique.
Il s'agit d'arracher les pieds de vignes en extirpant soigneusement les racines et de laisser le sol au repos pendant huit à dix ans. Le nématode vit dans le sol et peut survivre après arrachage de la vigne pendant 4 à 5 ans sur les morceaux de racines non extirpés, ce délai apparaît donc nécessaire avant de replanter la vigne sur un sol a priori non contaminé.
Pendant la période de repos, il est possible d'utiliser la parcelle pour d'autres cultures. Les prairies ou les céréales sont même préconisées par le cahier des charges bio. Ce système repose donc sur la rotation des cultures et la jachère. ''C'est actuellement la seule méthode efficace, note Marion Claverie, de l'Institut français de la vigne et du vin. Cependant, le temps de repos est très long et difficilement supportable d'un point de vue économique''. C'est pourquoi l'Inra explore actuellement une méthode de lutte biologique, ''la jachère nématicide'', qui pourrait réduire le temps de repos nécessaire à la décontamination d'une parcelle. Cette méthode vise à sélectionner des plantes qui ont une action répulsive sur les fameux vers. Un premier dispositif est testé grandeur nature depuis avril 2010. Une seconde expérience démarrera en septembre. Les résultats seront connus d'ici une dizaine d'années.
Une deuxième voie de lutte contre les nématodes est explorée aujourd'hui : la sélection d'espèces résistantes. Il s'agit de développer par hybridation des porte-greffe résistants au ver. Cette sélection variétale classique fait aujourd'hui l'objet de nombreuses recherches. Autre alternative étudiée aujourd'hui et qui est au cœur de la polémique actuelle : le développement de porte-greffe transgéniques résistants. L'équipe de virologie de l'Inra travaille sur ce sujet depuis quelques années. Premiers résultats : ''s'il n'y a pas de pied OGM totalement indemne de contamination, les porte-greffe OGM retardent la contamination par le virus de 1 à 3 ans''. Les quatre prochaines années d'essais, interrompues par le fauchage, ''devaient permettre d'approfondir ces résultats'', note l'Inra dans son dossier de presse.