Trente huit milliards d'euros (Md€) de dépenses favorables à l'environnement, 10 Md€ de dépenses défavorables et 4,7 Md€ de dépenses mixtes (favorables et défavorables à la fois) pour l'année 2021. Telles sont les estimations du Budget vert (1) , présenté par le ministère de l'Économie mercredi 30 septembre.
Après un premier essai méthodologique en 2020, Bercy a présenté, en parallèle du projet de loi de finances, un document qui évalue les impacts environnementaux du budget de la France pour 2021. « Une première mondiale », s'est félicité le ministre Bruno Le Maire.
Les dépenses de l'État, les prélèvements sur recette, les taxes affectées et les dépenses fiscales sont passées au crible de six indicateurs environnementaux : la lutte contre le changement climatique, l'adaptation au changement climatique et la prévention des risques naturels, la gestion de la ressource en eau, l'économie circulaire, les déchets et la prévention des risques technologiques, la lutte contre les pollutions et, enfin, la biodiversité et la protection des espaces naturels, agricoles et sylvicoles. « Ce travail inédit met en évidence, sur chaque axe environnemental, l'impact favorable, neutre ou défavorable des dépenses », indique Bercy. Mais, pour ce premier exercice, seules 10 % des dépenses (52,8 Md€) sont réellement évaluées à l'aune de leur impact environnemental. Les 90 % restants (488,4 Md€) ont soit été évacués car jugés non impactants directement (masse salariale de l'État, dotations sociales aux ménages), soit parce que les services (2) manquaient de données pour les évaluer. C'est le cas notamment du budget de la Défense ou des dotations aux collectivités locales.
« Nous allons réitérer cet exercice chaque année et l'approfondir. Nous sommes ouverts aux discussions avec tous les acteurs intéressés par la démarche », indique une source gouvernementale, anticipant les critiques à venir.
42,8 Md€ de dépenses favorables sur au moins un axe environnemental
« Les dépenses répondant à au moins un des six objectifs environnementaux en 2021 atteignent 42,8 Md€ », indique le rapport. Parmi elles, 38,1 Md€ sont considérées comme « vertes », c'est-à-dire qu'elles sont favorables à l'environnement sur au moins un indicateur environnemental sans être défavorables par ailleurs. Il s'agit des dépenses en faveur des énergies renouvelables (6,9 Md€) et de la rénovation énergétique (2 Md€), une partie de l'aide publique au développement (1,9 Md€), les taxes affectées aux agences de l'eau (2,2 Md€) et le programme « Écologie » du Plan de relance (6,6 Md€ en 2021).
Les énergies renouvelables seraient-elles donc vertes sur tous les plans ? « Nous avons raisonné par rapport à un contre-factuel. Si les énergies renouvelables remplacent du nucléaire, le gain net pour le climat n'est pas évident. Mais si on raisonne à partir du mix énergétique actuel, il y a un gain », explique une source gouvernementale. Quid de l'artificialisation des sols et de l'impact paysager de l'éolien et du photovoltaïque ? « Les autres modes de production ont aussi des impacts ou en ont eu. Construire une centrale nucléaire ou un barrage hydraulique n'est pas neutre non plus », souligne l'expert. L'impact environnemental a donc été évalué par rapport à un statu quo.
Idem pour les aides à la mobilité propre : « Nous avons eu un débat sur les aides à l'acquisition des véhicules propres. La production a des impacts environnementaux indirects (batteries…). Mais, si on regarde l'analyse de cycle de vie, l'impact est plutôt favorable ».
14 Md€ de dépenses défavorables ou mixtes
Les dépenses classées « mixtes » ont un impact favorable sur un ou plusieurs axes environnementaux et un impact défavorable sur d'autres. Elles représentent 4,7 Md€ en 2021 et recouvrent principalement les dépenses relatives aux infrastructures de transport, ferroviaire ou fluvial (canal Seine-Nord Europe par exemple), indique Bercy. Ces infrastructures « génèrent de l'artificialisation ou la production de déchets mais tout en étant favorables à l'atténuation des émissions de gaz à effet de serre à moyen terme en favorisant des modes de transports moins polluants », indique le rapport.
Les dépenses de recherche sur le nucléaire (4,2 Md€) sont également considérées comme « mixtes ». Elles « sont classées comme favorables sur l'axe atténuation climat mais défavorables à la gestion des déchets », souligne le rapport.
Enfin, les dépenses jugées défavorables concernent les politiques qui ont un impact négatif sur au moins un axe environnemental sans avoir d'impact favorable par ailleurs. Elles représentent 10 Md€ et couvrent les exonérations ou taux réduits sur les carburants (5,1 Md€) et les dépenses en faveur du transport aérien. Les aides aux entreprises sans contrepartie environnementale, comme le crédit d'impôt recherche, ont été considérées comme neutres.