Parmi les dispositions prévues par le projet de loi sur la biodiversité (1) présenté le 26 mars dernier en Conseil des ministres figurent des mesures visant à maintenir ou reconquérir la biodiversité en milieu agricole.
"Le texte modernise également nos moyens de protection des espaces naturels et des espèces sauvages (…) en déployant de nouveaux outils gradués permettant des mesures pérennes de protection et de gestion de la biodiversité, en particulier en milieu agricole, sans nécessiter une acquisition", avait annoncé Philippe Martin. Que visait par là le ministre de l'Ecologie ?
Supprimer les textes favorables à la suppression des mares
Le projet de loi "biodiversité" autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure visant à abroger les dispositions relatives aux mares insalubres. Le maire, ou à défaut le préfet, peut en effet ordonner la suppression des mares communales comme des mares privées. Les dépenses correspondantes sont obligatoires pour la commune dans le premier cas. Ces dispositions sont devenues clairement obsolètes et sont incompatibles avec le code de l'environnement qui proclame d'intérêt général la protection des zones humides, indique le ministère de l'Ecologie.
Il s'agit, explique l'exposé des motifs du projet de loi, de mettre en œuvre des actions favorables à la biodiversité (aménagements arborés, bandes enherbées, mise en place de pratiques restaurant la qualité des sols, etc…) sur les terrains agricoles sans avoir à recourir à leur acquisition. De quelle manière ? Par la signature de contrats entre les propriétaires de ces terrains, d'une part, une collectivité publique ou une personne morale de droit privé agissant pour la protection de l'environnement, d'autre part.
Cet outil reposera sur la liberté contractuelle. Ce qui doit permettre de garantir "une grande souplesse dans l'élaboration des modalités de l'accord, au plus près des réalités écologiques, sociales et économiques locales", expliquent les rédacteurs du projet de loi, qu'il s'agisse du contenu des mesures, de leur durée, de leur phasage ou des conditions de révision et de sortie éventuelle… Point de précision, en revanche, sur une éventuelle rémunération des obligations environnementales ou des services écosystémiques, qui semble néanmoins tout à fait envisageable.
Par ces contrats seraient mises en place des obligations "réelles", c'est-à-dire attachées à la propriété elle-même. Ce qui autorise "une gestion durable sur un temps suffisamment long" et permet "une réelle pérennité des mesures mises en œuvre", explique le ministère de l'Ecologie. Ces obligations seraient conclues en articulation avec les autres droits réels existants, comme le droit de chasse par exemple, précise-t-il. Afin d'assurer la bonne applicabilité des obligations, le texte prévoit par ailleurs l'accord indispensable du fermier lorsque les terres sont en fermage.
Des zones soumises à contrainte environnementale
Autre outil prévu par le projet de loi : les zones soumises à contraintes environnementales (ZSCE). Il s'agit d'étendre à la biodiversité des dispositions déjà utilisées pour la protection des captages, expliquent les promoteurs du projet.
Le dispositif consiste à déterminer par décret des zones où il est nécessaire de maintenir ou de restaurer les habitats d'une espèce protégée et à établir un programme d'actions à cet effet. A l'expiration d'un délai, qui pourrait s'inspirer du délai de trois ans en vigueur pour les captages, certaines pratiques agricoles favorables à l'espèce considérée ou à ses habitats seraient rendues obligatoires.
"L'utilisation de ce dispositif sera réservée aux situations où des objectifs environnementaux majeurs ne réussissent pas à être atteints malgré la mise en place d'outils contractuels", précise l'exposé des motifs du projet de loi.
Au-delà de ces deux mesures, le texte prévoit également d'introduire une dimension environnementale dans des outils tournés jusque-là vers des objectifs de production agricole exclusivement. Il envisage ainsi que la finalité d'un assolement en commun puisse être la préservation de la qualité de l'eau ou la protection de la biodiversité.
Il prévoit également que les opérations de remembrement puissent être menées en vue de permettre "une utilisation des parcelles à vocation naturelle, agricole ou forestière en vue de la préservation de l'environnement". Jusqu'à présent, ces opérations d'aménagement foncier avaient pour seul objectif d'améliorer l'exploitation agricole des biens ou l'aménagement rural du périmètre remembré.