La situation économique et financière du marché des déchets est en train de redistribuer les cartes chez les acteurs français du secteur. C'est en substance ce qui ressort de l'analyse financière réalisée par le cabinet Xerfi intitulée "Le marché de la gestion des déchets – Repenser la chaîne de valeur pour pérenniser les performances".
Les experts du cabinet remarquent ainsi la perte de leadership des deux acteurs historiques dominants que sont Suez et Veolia. Leurs performances se sont érodées, en témoignent des cours de la bourse en chute depuis septembre 2011. Les deux leaders vont ainsi devoir recentrer leur stratégie en mettant fin à une croissance externe caractérisée par des rachats de société. "Les deux majors vont être contraints d'opter pour des politiques de croissance externe plus raisonnées et de donner la priorité à la génération de cash et à la consolidation des activités", prévient Xerfi. Veolia s'est d'ailleurs engagé dans un plan de cession d'actif afin de réduire son endettement d'ici à fin 2012.
Résultat, la concurrence se renforce et "de plus en plus d'acteurs d'envergure sur le marché n'hésitent pas à rentrer en concurrence frontale avec les deux leaders lors des appels d'offres", remarque le cabinet citant notamment Pizzorno, Nicollin, Coved, Urbaser, ou encore Séché. Toutefois, ce recul de performance concerne également les autres entreprises du secteur. "Selon notre analyse financière réalisée à partir d'un échantillon d'entreprises représentatives du secteur, le taux de marge opérationnelle des sociétés de notre panel (ENE/CA) aura ainsi perdu 1,6 point depuis 2004 pour s'établir à 5,1% en 2011", note le cabinet. Les challengers vont donc eux aussi privilégier le développement interne. "Des opérations de croissance externe auront lieu malgré tout. Mais elles concerneront plutôt le rachat de sociétés disposant de savoir-faire techniques dans les métiers de la valorisation, en particulier dans le négoce de matières premières secondaires et plus généralement dans les métiers du recyclage".
Des résultats en légère amélioration attendus pour 2015
Selon leurs analyses, les experts de Xerfi prévoient une "légère amélioration" financière d'ici 2015 mais ce ne sera pas chose facile. Quelle que soit leur taille, les entreprises seront confrontées à une faible croissance économique qui va engendrer une réduction des volumes de déchets et va venir accentuer la tendance à la baisse déjà observée du fait des changements de comportement. L'augmentation des coûts de production via la hausse du prix des carburants et la hausse du SMIC n'améliorera pas leur situation.
Pour faire face, les entreprises ne pourront toutefois pas augmenter leurs tarifs. Le cabinet Xerfi rappelle "l'intensification des rapports de force entre les différents intervenants de la filière". Leurs principaux clients que sont les collectivités locales ont vu leurs finances se dégrader. Les futures élections municipales prévues en 2013 les décourageront d'augmenter la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. Elles risquent par conséquent de faire pression sur leurs prestataires.
Les experts de Xerfi ont donc identifié plusieurs facteurs clés qui permettraient aux opérateurs de sécuriser leur marge. En matière de collecte et de tri des déchets, Xerfi préconise notamment d'innover dans les services, de maîtriser la logistique et de se doter d'un service commercial efficace pour optimiser la vente de matière triée. En matière d'incinération et de stockage, il faudrait selon eux optimiser la gestion financière à long terme, maîtriser la réglementation et rendre les incinérateurs performants.