Premier établissement secondaire de Bretagne, quatrième de France, le lycée Bréquigny, à Rennes (Ille-et-Vilaine), accueille 3 500 élèves dans 20 000 m2 de locaux, en externat et en internat, à quoi il faut ajouter le corps enseignant et le personnel. « Le bâtiment a été construit en 1958 et cédé par l'État à la Région par une loi de 1983 », rappelle Éric Dubost, dirigeant associé de CCL Construction, PME d'une soixantaine de collaborateurs qui, en 2017, a remporté le projet de rénovation/construction avec d'autres entreprises.
Lauréat du Grand Prix Rénovation durable des Green Solutions Awards France 2020-21 aux niveaux national et international, ce projet devait répondre à plusieurs enjeux – dont la gestion de l'intervention en site occupé, pour assurer une continuité de l'activité d'enseignement et éviter l'installation coûteuse de locaux provisoires.
« L'idée de ce projet, sur la partie rénovation énergétique, poursuit Éric Dubost, était de préfabriquer des murs à ossature bois, d'y inclure en préfabrication les menuiseries, les isolants, les étanchéités à l'eau et à l'air, ainsi que les bardages. Au total, 10 000 m2 de façades à réaliser, avec environ 1 000 menuiseries, le tout dans un temps très court – huit mois pour changer l'aspect et la technicité de ce bâtiment. »
Numériser le bâtiment pour s'affranchir de l'aléa
Un projet à trois volets
- Rénovation énergétique d'une partie des bâtiments d'externat et de logements.
- Réhabilitation du bâtiment de restauration, avec changement d'usage (foyer, salle multifonction, pôle agent, espace des professeurs et CDI).
- Création d'un nouveau pôle de restauration.
Parallèlement à la numérisation du bâtiment, les équipes ont testé les bétons : « Globalement, on avait de très bons gros bétons en pied de bâtiment, remplacés par des bétons préfabriqués à mesure que l'on montait en hauteur. Les tests avaient pour but de définir les types d'accroche à utiliser pour fixer les murs à ossature bois qui constitueraient la nouvelle peau du bâtiment. »
La phase de dessin pouvait commencer. « À partir du dimensionnel [obtenu après numérisation], on a redessiné les façades en plaçant devant des modules à ossature bois, de 8 m de long et 3 m de haut, le plus souvent. » Pour des questions de transport et de levage, le choix a été fait d'une trame de mur avec quatre menuiseries à l'intérieur. « Ça permettait d'utiliser de petits engins de levage, pouvant effectuer facilement le tour du bâtiment, avec un impact très faible en termes de circulation, sans pose d'empierrements spécifiques, se souvient Éric Dubost. En bref, adaptables aux conditions et capables de restituer le chantier à l'état originel. » Les dessins obtenus ont servi à débiter et produire les murs à ossature bois.
Côté organisation, « tout ce qui était un peu bruyant a été réalisé pendant les vacances scolaires, la pose des accroches par exemple. Les murs à ossature bois ont ainsi été ramenés contre les pièces de fixation posées en dehors des heures de cours. Si bien que l'on a pu installer cette enveloppe pendant les cours ».
Une école de l'excellence
Et si ce chantier conçu en 2017 était à refaire ? « Je pense que l'on n'aurait pas changé la méthodologie, car elle était plutôt efficace, reconnaissait, début novembre, Matthieu Leize, directeur du développement immobilier du groupe Legendre à l'occasion d'une conférence sur le hors-site au Sénat. Mais je pense que l'on aurait utilisé davantage de matériaux bio-sourcés. »
Avec ou sans ce type de matériaux, Matthieu Leize considère que la construction hors site est avant tout une « école de l'excellence » : « Il n'y a pas d'à peu près, de "On verra sur place" ou de "Qu'est-ce qu'on fait, chef ?". Avant le démarrage, tout doit être défini, conçu, et on livre presque un DOE (dossier des ouvrages exécutés) avant de démarrer. [Avec le hors site], la construction n'est qu'un aboutissement et un assemblage de choses conçues préalablement. »
Le soufflé est retombé
En phase de travaux, à la réception... le chantier de réhabilitation énergétique avec la préfabrication en bois a produit une littérature abondante et a été « très visité », selon Éric Dubost, qui a constaté « un effet "waouh" assez fort » pour ce bâtiment sexagénaire ayant retrouvé une seconde jeunesse, et des performances énergétiques comparables à celles du neuf. « Sur la partie réhabilitation en préfabrication, on attendait [toutefois] un engouement plus fort », concède le dirigeant de CCL Construction, notant que ce mode constructif est en concurrence avec la non-préfabrication.
« Les coûts énergétiques ont en outre beaucoup freiné les régions. (…) D'autres programmes étaient prévus en Bretagne, qui ont été ajournés car, pour le moment, il faut payer le surplus des augmentations du prix de l'énergie. C'est un peu paradoxal, parce que l'on arrête la réhabilitation pour payer l'énergie plus chère. On voit même des opérations de pose de panneaux solaires sur des bâtiments non réhabilités ! » regrette le patron d'entreprise, qui convient que les projets comme celui réalisés à Bréquigny « sont coûteux », mais « elles permettent pourtant de ne pas détruire le bâtiment et d'en limiter l'impact carbone ».