Certificats de production de biogaz, appel à projets pour la pyrogazéification, simplifications administratives : les acteurs des gaz renouvelables tiennent à ce que le Gouvernement n'oublie pas ses promesses en 2024.
Ce mardi 23 avril, à l'occasion d'un état des lieux des gaz renouvelables en France (1) , certains des principaux représentants du secteur se sont confiés sur leurs attentes. Pour le Syndicat des énergies renouvelables (SER), les gestionnaires des réseaux de distribution (GRDF) et de transport (Teréga pour le sud-ouest de l'Hexagone et GRTgaz pour le reste du territoire) et le Syndicat des entreprises locales gazières (Gaz des territoires, ex-SPEGNN), multiplier par cinq la production de biométhane d'ici à 2030 (pour couvrir 20 % de la consommation de gaz) ne se fera pas sans de nouveaux déblocages réglementaires et financiers.
Promesses en attente
En premier lieu, les quatre organisations plaident pour maintenir le soutien engagé sur le biométhane. D'une part, ils demandent la publication « urgente » du second décret encadrant les certificats de production de biogaz (CPB) – sorti de consultation publique en novembre dernier. Ce dispositif, introduit en 2021 par la loi Climat et résilience et lancé par un premier texte en avril 2022, doit permettre aux producteurs de biométhane de bénéficier d'une autre source de rémunération de la part des fournisseurs de gaz. Ces derniers devront, dès 2026, déclarer un taux minimum d'incorporation de biométhane à leurs clients. « Encore faut-il, pour cela, que la trajectoire du niveau d'obligation fixé par l'État soit publiée et que le décret l'exprimant en nombre de CPB à restituer par volume de gaz fourni l'encadre », remarque Frédéric Terrisse, président de la commission gaz renouvelables du SER, évoquant une parution de la première « d'ici à l'été », selon ses informations. « Ce dispositif a, en outre, été pensé pour compléter, puis succéder au tarif d'achat délivré aux grandes installations [avec une capacité supérieure à 25 gigawattheures par an, NDLR], par appel d'offres en 2024. » Néanmoins, la filière attend encore le lancement de l'appel à projets, promis depuis 2021, pour soutenir les producteurs de biométhane éloignés du réseau et souhaitant le valoriser sous forme de carburant durable (ou bioGNV).
“ Il faut laisser la possibilité aux producteurs d'accentuer la capacité maximale [de leur installation] ” Laurence Poirier-Dietz, GRDFAu-delà d'une nécessaire visibilité financière, pour dérisquer les projets lancés et inciter à en réaliser de nouveaux, Laurence Poirier-Dietz, directrice générale de GRDF, insiste, d'autre part, sur l'importance d'un « débridage » des installations au plus fort potentiel. « Il faut laisser la possibilité aux producteurs d'accentuer la capacité maximale (ou Cmax). D'après nos calculs, si tous les méthaniseurs installés en injection [au nombre de 652 à la fin de l'année 2023, NDLR] bénéficiaient d'un tel déplafonnement, ils pourraient augmenter leur production de 25 à 30 %, soit 3 térawattheures supplémentaires, en trois à quatre mois. » En clair, cette proposition reviendrait, par décret, sur un texte de juin 2023 autorisant déjà à revoir cette Cmax une fois par an, plutôt que tous les deux ans auparavant. Par ailleurs, toujours dans l'idée d'apporter « plus de souplesse » aux professionnels, le SER milite pour des amendements en ce sens dans le projet de loi de simplification qui sera présenté, par le ministère de l'Économie, ce mercredi 24 avril en Conseil des ministres. « Les porteurs de projet doivent parfois faire remonter les mêmes informations cinq à sept fois par an, à autant d'entités publiques différentes, pour faire avancer leur projet », souligne par exemple Frédéric Terrisse.
Laisser de la place aux autres technologies
652
C'est le nombre de méthaniseurs dont la production de biométhane est injectée dans le réseau de gaz naturel, en 2023.La méthanisation n'est néanmoins pas la seule voie que ces organisations souhaitent voir être soutenue. Sandrine Meunier, la nouvelle directrice générale de GRTgaz, compte notamment sur la mise en œuvre d'un premier appel à projets consacré à la pyrogazéification – une autre promesse faite par le Gouvernement. « Si nous voulons produire 60 térawattheures de gaz renouvelable en 2030, il nous faudra compter sur au moins 6 térawattheures produits par pyrogazéification. » En 2022, 49 projets, représentant 4,1 térawattheures par an (TWh/an) de puissance cumulée, avaient été recensés par un appel à manifestation d'intérêt ouvert par le comité stratégique de filière Nouveaux Systèmes énergétiques (CSF NSE). Mais à l'heure actuelle, seulement huit sont enregistrés dans la file d'attente du registre d'instruction – aux côtés de quatre projets de méthanation. « Le soutien à la pyrogazéification ne se fera cependant pas sans un minimum de visibilité sur les priorités données à l'utilisation de la biomasse, dont elle dépend en partie », rappelle le président du SER, Jules Nyssen, en écho au nouveau groupement d'intérêt scientifique (GIS) mis en place à cette fin par le ministère de l'Agriculture en mars dernier.
Et ce dernier d'ajouter qu'il « faudra également à la nouvelle Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) de donner leurs places à ces autres technologies de production de biogaz comme la pyrogazéification, la gazéification hydrothermale et la méthanation ». Or, déplore-t-il, « nous n'avons ni Stratégie française énergie-climat, ni loi de programmation, ni PPE, ni plus grand-chose. Nous n'avons même pas de vision politique affichée sur ce que doit être la transition énergétique de demain ».
Article publié le 23 avril 2024