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La demande mondiale de charbon ne s'est jamais aussi bien portée

Charbon : l'addiction mondiale confirmée Actu-Environnement.com - Publié le 06/02/2012
Charbon : l'addiction mondiale confirmée  |    |  Chapitre 2 / 5
La décennie 2000 a été marquée par une hausse exceptionnelle de la demande mondiale en charbon. Si la cause principale est la croissance économique des pays émergents, limiter l'usage du charbon à ces pays serait faux car Europe et Amérique du Nord continue à l’utiliser significativement. Loin de l'image passéiste associant le charbon à la révolution industrielle, le marché ne s'est jamais aussi bien porté.

© Ivers Linards Zolner


"Au cours de la décennie passée, le charbon a été la source d'énergie dont la croissance a été la plus rapide". Tel est le constat dressé, non pas par les promoteurs du charbon, mais par l'Agence international à l'énergie (AIE) dans un rapport (1) relatif aux investissement dans les énergies "bas carbone" présenté en juin 2011 aux Etats participants au Clean energy ministerial.

Le constat dressé est sans appel : "le monde continue de dépendre fortement du charbon", indique le rapport, précisant qu'"au niveau mondial, le charbon a fourni 47% des nouvelles capacité de production électrique". En effet, la génération électrique tire le marché et la production d'acier complète la demande, une tonne d’acier nécessitant plus d'une demi tonne de charbon à coke.

En 2000, la consommation mondiale annuelle de charbon atteignait 2.400 millions de tonnes, selon le rapport statistique 2011(2) de BP, une valeur relativement stable jusqu'en 2003. Cette année là, la consommation s'établit à 2.677 millions de tonnes, en hausse de 8,1% par rapport à l'année précédente. Depuis, la consommation mondiale a augmenté de plus de 48% pour atteindre 3.556 millions de tonnes en 2010. Seule l'année 2009, marquée par la crise, affiche un fléchissement de 1% par rapport à l'année précédente.

L’Asie détermine la demande

Si le mouvement de hausse est massif, il est loin d'être uniforme. En réalité, la croissance de la demande est quasi exclusivement portée par la zone Asie - Pacifique. Entre 2000 et 2010, la consommation asiatique a plus que doublé, passant de 1.157 millions de tonnes à 2.385 millions.

Sans surprise, les deux géants que sont la Chine et l'Inde déterminent très largement la consommation. La demande chinoise représente à elle seule près de la moitié de la consommation mondiale avec 1.713 millions de tonnes en 2010, en hausse de 132% par rapport au début de la décennie. Quant à l'Inde, elle affiche une demande de 278 millions de tonnes, en hausse de 92% en 10 ans.

Sur la même période, l'Afrique ainsi que l'Amérique centrale et du Sud affichent aussi une croissance de leur consommation, mais sans commune mesure : la consommation africaine passe de 83 millions de tonnes à 95 millions et la demande sud-américaine passe de 20 millions de tonnes à un peu moins de 24 millions.

Quant aux pays industrialisés, ils affichent des niveaux de demande en baisse. L'Amérique du nord voit sa consommation passer en dix ans de 607 millions des tonnes à 556 millions, l'Europe affiche une consommation de l'ordre de 487 millions de tonnes contre 525 en 2000.

Chiffres en trompe l'œil

Peut-on dés lors considérer que le charbon est l'énergie des pays du Sud et que les pays de l’OCDE s’en détournent ? Une lecture plus attentive de ces chiffres vient nuancer ce constat.

Si l'on exclue la période marquée par la crise financière déclenchée par la crise des subprimes de l'été 2007, la demande de charbon des pays industrialisés est en réalité stable, voire en légère hausse. En 2007, l'Amérique du Nord consommait encore 615 millions de tonnes de charbon, soit 1,3% de plus qu'au début de la décennie, et l'Europe a eu recours à 528 millions de tonnes, un volume en hausse de 3 millions de tonnes par rapport à 2000.

Ce sont les années 2008 et 2009 qui viennent perturber la stabilité de deux marchés qui représentaient encore 34,2% de la demande mondiale en 2007. La seule année 2009 affiche une chute de 7,3% en Amérique du Nord et de 9,9% en Europe par rapport à des chiffres de 2008 qui faisait état d'une première baisse. Finalement, BP constate qu’en 2010 "la consommation des pays de l'OCDE a augmenté de 5,2%, soit la hausse la plus importante depuis 1979". Un retour aux volumes d’avant crise devient envisageable.

Le constat d'un recours stable, voire croissant, au charbon dans les pays développés est renforcé avec l'exemple du Japon qui est le pays industrialisé affichant la plus forte progression sur la décennie écoulée. Avec une consommation de 124 millions de tonnes en 2010, la hausse s'établit à 25%. Par ailleurs, pour les japonais, le "trou d'air" de la crise semble être du passé puisque le niveau de 2010 égale celui de 2007.

Un avenir radieux ?

Il apparaît donc que la croissance économique sera déterminante. "La prévision de la demande est marquée par de grandes incertitudes", prévient l'AIE dans son dernier rapport sur le sujet(3), rappelant que "la production électrique représente la part la plus importante de la consommation de charbon". Or, la demande électrique est "étroitement corrélée" à la croissance économique.

Par ailleurs, l'avenir pourrait aussi être marqué par une évolution majeure du marché mondiale : les échanges internationaux croissent sensiblement alors que jusqu'à maintenant le charbon a été principalement consommé dans les pays producteurs. Ainsi, Enerdata a rendu compte en ce début d'année d'une étude annonçant "une bataille du Pacifique" qui mettrait aux prises les principales économies asiatiques cherchant à s'assurer des ressources charbonnières. Le constat de la société spécialisée dans l'expertise et la veille énergétique se base sur l'évolution récente de la consommation des poids lourds mondiaux. Exportatrice jusqu'en 2008, la Chine a importé 6% de sa consommation en 2010. L'Inde pour sa part a vu ses importations passer de 10 à 19% de sa consommation annuelle au cours de la dernière décennie. A eux deux, ces pays représentent déjà 24% d'un marché à l’export appelé à progresser selon les experts d'Enerdata.

"Les conséquences de cette compétition dans la plupart des pays riverains du Pacifique sont multiples", prévient Enerdata qui anticipe notamment l’ouverture de nouvelles mines à ciel ouvert, une "forte compétitivité du charbon sur le marché des gros usages sous chaudière", une poussée des émissions de CO2 "bien au-delà du plafond fixé par le GIEC pour éviter de graves dérèglements climatiques" et des tensions géopolitiques entre les grands acteurs de la zone pacifique.

Les Etats-Unis et l’Europe occidentale resteront-ils simples spectateurs de cette compétition ? Rien n’est moins sûr car les exportations nord-américaines se réorientent déjà vers le Pacifique, via de nouveaux aménagements portuaires sur sa côte ouest, et les Indiens étudient la possibilité d’acquérir des mines en Europe centrale.

Philippe Collet

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