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Résidus médicamenteux : prévenir plutôt que guérir

Micropolluants : quels impacts sur les techniques d'assainissement ? Actu-Environnement.com - Publié le 08/09/2014

Equiper les établissements de santé de traitements performants ne suffirait pas pour lutter contre la pollution aux résidus médicamenteux. De nombreux acteurs préconisent donc la prévention, moins coûteuse, en évaluant l'impact environnemental des molécul

Micropolluants : quels impacts sur les...  |    |  Chapitre 5 / 5
Environnement & Technique N°339 Ce dossier a été publié dans la revue Environnement & Technique n°339
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Chaque fois que vous buvez un verre d'eau potable, vous ingérez des traces de médicaments. Parmi eux, un antiépileptique, la carbamazépine, et son principal produit de dégradation, et un anxiolytique, l'oxazépam. Si ces résidus médicamenteux sont présents dans l'eau de consommation, c'est que les filières classiques de traitement des eaux usées ne les filtrent pas. Cette pollution est difficile à appréhender, car très diffuse : elle ne se limite pas aux effluents des établissements de santé. L'automédication et le développement de la médecine ambulatoire ont multiplié les sources de pollution : chaque logement est susceptible de rejeter des résidus médicamenteux.

Seule une fraction de la pollution est liée aux effluents hospitaliers

"La majeure partie des rejets de médicaments provient des effluents urbains. Si, à la sortie des hôpitaux, les concentrations sont plus importantes, les eaux usées urbaines représentent un volume beaucoup plus grand", explique Vivien Lecomte, chargé de mission Eau et santé sur les projets de recherche Sipibel-Irmise.

Depuis 2012 et l'ouverture d'un nouvel hôpital à Bellecombe (Rhône-Alpes), plusieurs axes de recherche ont été développés au sein du projet Sipibel pour améliorer la connaissance des effluents hospitaliers et urbains, des risques et des traitements tertiaires. Les premiers résultats montrent que seuls 20% des résidus médicamenteux seraient imputables aux hôpitaux. Cependant, "quelques médicaments sont spécifiquement utilisés dans les hôpitaux". Comme certains antibiotiques, des produits de contraste rayons X et des cytostatiques. "Si certains composés peuvent être abattus en station de traitement des eaux usées (STEU), comme le paracétamol, pour d'autres molécules, l'efficacité du traitement classique est très faible", explique Vivien Lecomte.

"Les STEU ne sont pas équipées pour traiter les résidus médicamenteux", confirme Olivier Toma, fondateur du Comité pour le développement durable en santé (C2DS). "On montre souvent du doigt les hôpitaux mais c'est un faux problème. Si on équipe 100% des établissements de santé, les coûts seront pharaoniques et pour quels résultats ?", s'interroge Olivier Toma.

Traitements tertiaires : un rapport coût/efficacité à prouver

Le programme européen noPills s'est appuyé sur plusieurs usines pilotes en Europe pour tester les traitements tertiaires. Résultat : "Pour la plupart des substances considérées, le traitement sur charbon actif en poudre ou par ozonation assure plus de 80% d'élimination. Des taux d'élimination élevés peuvent être obtenus dans les filtres à charbon actif et avec l'osmose inverse. Des taux d'élimination élevés sont aussi atteints avec le traitement UV/H2O2".

Cependant, ces traitements peuvent induire des effets négatifs, liés aux produits de transformation formés, note le programme. De même, il est nécessaire de prendre en compte l'ensemble du cycle de vie : la technologie UV est la plus énergivore, suivie par l'ozone et le carbone activé. L'ozone basse consommation obtient les meilleures performances. "Les traitements tertiaires occasionnent des dépenses énergétiques supplémentaires. Il faut se poser la question du rapport coût/efficacité et penser à agir par une réduction à la source", conclut le programme. C'est aussi ce que préconise le CD2S : puisqu'équiper les établissements de santé ne suffirait pas à juguler cette pollution, il faut la limiter en amont.

Identifier les médicaments les plus néfastes

L'une des priorités d'action, estime le C2DS, est une meilleure prise en charge des médicaments périmés. Cela passe par une amélioration de la filière REP mais aussi par son élargissement aux établissements de santé.

L'association plaide également pour l'adoption de l'indice PBT (pour persistance, bioaccumulation et toxicité). Testé depuis 2003 en Suède, il a été généralisé en 2010 à l'ensemble du marché suédois du médicament. Le principe : chaque médicament est classé de 0 à 3 selon son impact sur l'environnement. Les prescripteurs sont donc invités à choisir, à propriétés équivalentes, les molécules les plus vertueuses.

Aujourd'hui, deux établissements de santé testent l'indice PBT en France. Les hôpitaux de Tarascon (13) et de Sarcelles (95) ont en effet inclus dans leurs livrets thérapeutiques cet indice environnemental. La centrale d'achat de l'hospitalisation privée (Cahpp) devrait publier, d'ici la fin de l'année, une analyse médico-économique de cet indice. "L'objectif est d'évaluer si les médicaments les moins impactants sont moins chers ou plus chers et d'en tirer les leçons pour une politique publique", explique Olivier Toma.

Fin juillet, le député Elie Aboud (UMP, Hérault) a déposé une proposition de loi visant à instaurer l'indice PBT en France. Pour cela, l'élu propose de subordonner "la délivrance de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) des médicaments à usage humain (...) à l'indication par le demandeur du degré atteint par son médicament ou son produit sur une échelle mesurant la persistance, la bioaccumulation et la toxicité des résidus médicamenteux dans les eaux de surface". Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui…

Dans le cadre du projet Sipibel, le Laboratoire d'écologie des hydrosystèmes naturels et anthropisé (ENTPE) tente quant à lui d'identifier les médicaments à étudier en priorité en termes de risques pour les milieux aquatiques, sur la base de leur potentiel bioaccumulable : "Sur 966 molécules pharmaceutiques consommées aux Hospices civils de Lyon, une première liste de 70 molécules prioritaires a été établie, qui a été par la suite réduite à 14 d'entre elles, jugées particulièrement à risque pour les écosystèmes aquatiques". Ces dernières vont faire l'objet d'évaluations approfondies en laboratoire. Selon les auteurs de l'étude, "toutes les classes thérapeutiques sont représentées, notamment des médicaments très utilisés comme ceux à tropisme cardiaque et des antibiotiques. D'autres médicaments, moins consommés, sont également à surveiller comme les hormones sexuelles féminines et certains anticancéreux".

Sophie Fabrégat

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Reproduction interdite sauf accord de l'Éditeur.

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Réactions8 réactions à cet article

 

Je cite : "Pour cela, l'élu propose de subordonner "la délivrance de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) des médicaments à usage humain (...)"
Pourquoi cette limitation aux seuls médicaments à usage humain ? Les médicaments vétérinaires utilisés par les éleveurs ne contiendraient-ils aucune molécule nuisible ?

Jean-Claude Herrenschmidt | 08 septembre 2014 à 11h55
 
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Bonjour,
Ce qui parait le plus étonnant c est à quel point le laboratoire pharmaceutique est peu concerné. Au pire des cas pour lui, on va lui demander d'évaluerl'éco-toxicité de son produit alors qu à mon avis l'AMM devrait etre subordonnée à la présence de la preuve que les molécules proposées peuvent etre traités par nos steps par exemple.. Quand est ce que l'on arrtera de manger autant de médicamen t

Olivier7431 | 08 septembre 2014 à 12h03
 
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La toxicité de ces médicaments dans les eaux usées n'est pas à être démontrés, elle est !
Des analyses ont été faites sur les poissons qui vivent dans les eaux rejetées ont des gros problèmes, ces eaux vont ensuite dans les mers et là, polluent aussi !
La pollution n'est pas toujours visible, mais c'est celle qui ce voit qui fait le buzz, et est plus facilement traitable par les médias.

Maurice | 09 septembre 2014 à 08h56
 
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Bonjour Jean-Claude Herrenschmidt ,

Pour les médicaments à usage vétérinaire, une évaluation des risques pour l'environnement est demandée lors du dépôt d'une demande d'autorisation de mise sur le marché (AMM) ou lors de son renouvellement. En cas de risque d'écotoxicité, l'AMM peut être refusée. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui pour les médicaments à usage humain.

Sophie Fabrégat | 09 septembre 2014 à 09h45
 
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Merci à Sophie Fabrégat.

Jean-Claude Herrenschmidt | 09 septembre 2014 à 10h52
 
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L'écotoxicité versus l'effet thérapeutique: concernant le traitement de l'épilepsie, j'ai assez vite fait mon choix. Pas question que les épileptiques redeviennent les bêtes de foire qu'ils furent à amuser la populace avec leur "danse de Saint Guy".
Mon choix est identique quand il s'agit de traiter nombre de maladies. Quiconque a connaissance de cas dans son entourage me comprendra et il ne s'agit nullement de dénoncer les noirs desseins des "lobbies" ni un quelconque autre "complot" comme nous avons l'habitude dans ce fil.
Bonne santé à tous.

Albatros | 09 septembre 2014 à 16h29
 
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@Albatros
Nous sommes tous d'accord. C'est évident ! Raison de plus pour se soucier du traitement des eaux rejetées.

Jean-Claude Herrenschmidt | 09 septembre 2014 à 17h42
 
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La meilleur solution serait de taxer à 100 % tous les produits toxiques donc :
1 - Pesticides et nitrates.
2 - Médicaments vétérinaires.
3 - Médicaments humains.
4 - Peintures et solvants divers.
Pour cela, changeons ce monde, lire le livre "Têtes à Flaques"

Collectif REC | 12 septembre 2014 à 00h19
 
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