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Trois scénarios pour se passer des pesticides en Europe à l'horizon 2050

Durant deux ans, un comité d'experts s'est penché sur les conditions pour parvenir à une agriculture sans pesticides chimiques en 2050. Les résultats et les trois scénarios possibles ont été présentés lors d'un colloque, ce mardi 21 mars à Paris.

Agroécologie  |    |  D. Laperche
Trois scénarios pour se passer des pesticides en Europe à l'horizon 2050

Le saut à accomplir pour parvenir à une agriculture sans pesticides chimiques en Europe en 2050 apparaît aujourd'hui comme conséquent, même si un premier palier a d'ores et déjà été fixé par les stratégies européennes « De la ferme à la table » et « Biodiversité », avec un objectif de réduction de 50 % d'ici à 2030. Un comité d'experts européens vient toutefois de montrer que cette ambition serait atteignable. Les conditions pour réussir ont été analysées durant deux ans dans le cadre du programme prioritaire de recherche « cultiver et protéger autrement (1) ».

De leur réflexion a résulté trois scénarios. Ces derniers se déclinent schématiquement d'un modèle qui repose sur une forte robotisation, ainsi qu'une concentration des activités, à un scénario intégrant le concept « une seule santé » avec également des paysages agricoles diversifiés, en passant par une approche conciliant nature et environnement.

Première option : un appui fort des technologies numériques

Le premier scénario mise en effet sur l'inclusion de standards de production sans pesticides chimiques dans les accords bilatéraux entre l'Union européenne et ses partenaires commerciaux. La projection se place dans un système où les différents acteurs se sont regroupés. « Les chaînes de valeur européennes et mondiales, qui sont fortement concentrées, très capitalisées et à haute intensité technologique, ont mis en place des standards et des certifications privées et ont contractualisé avec les agriculteurs en leur proposant des prix bonifiés pour compenser les risques liés à la transition, développent les scientifiques dans le résumé de l'étude (2) .  Les filières sont dominées par la grande distribution et les grands acteurs de la transformation alimentaire, depuis la production et la fourniture d'intrants (semences, intrants et équipements) jusqu'à la distribution des aliments. » Ce scénario s'appuie également fortement sur une anticipation de l'arrivée des bioagresseurs et le suivi de l'état physiologique des plantes grâce, notamment, à des capteurs, des drones, des modélisations prédictives ou des robots.

Un scénario qui mise sur la santé et l'environnement

Le deuxième scénario compte sur la mise en place d'une politique européenne qui associe les enjeux en matière d'agriculture, d'alimentation, de santé, de biodiversité, des sols et de l'eau.

« Les consommateurs européens, bien informés des bienfaits d'une alimentation saine et de l'importance du microbiote, ont adopté des régimes plus diversifiés et plus équilibrés, aidés par des subventions sur les aliments sains et des taxes sur les aliments contribuant à des régimes néfastes pour la santé », précisent les auteurs. La priorité est mise sur la création de chaînes de valeur régionales et le maintien d'un tissu d'exploitation agricole diversifié. La gestion des bioagresseurs passe notamment par la lutte biologique, la surveillance et la gestion des micro-organismes des sols. « Des pratiques culturales spécifiques (amendements organiques supposant ainsi le maintien d'une activité d'élevage, gestion des résidus, diversification, rotation, travail du sol, cultures de couverture) et l'inoculation de certains micro-organismes permettent de moduler le microbiome, et la sélection de certaines variétés renforce les interactions positives entre la plante et le microbiome », précise l'étude.

Une approche intégrée « une seule santé »

Le dernier scénario franchit un cran pour s'orienter dans une approche « une seule santé » qui prend en compte à la fois les hommes, l'environnement et les animaux. Les systèmes de production agricole misent sur la diversification des cultures et des chaînes de valeurs, la complexité des paysages, mais également l'appui des micro-organismes du sol. « L'élevage extensif contribue au bouclage des cycles biogéochimiques indispensables à l'agriculture européenne. La mosaïque des cultures est adaptée, dans sa composition et dans sa configuration, aux enjeux de la protection des cultures ; elle est diversifiée dans l'espace et dans le temps, et la taille des parcelles s'est réduite, décrivent les auteurs. La gestion des maladies des plantes s'appuie sur la prophylaxie, la connaissance des cycles des bioagresseurs et des agents pathogènes, et sur la régulation biologique assurée par les microorganismes du sol et les paysages. Pour la gestion des adventices, la stratégie consiste à trouver un compromis entre les pertes de récolte et les services assurés au niveau du paysage. » La politique agricole commune (PAC) est remplacée par une nouvelle stratégie qui rétribue les agriculteurs pour les services écosystémiques. L'Europe a également fixé des taxes élevées sur les importations de produits cultivés avec des pesticides chimiques. Par ailleurs, les accords de commerce bilatéraux comprennent des clauses de réciprocité liée à l'objectif « une seule santé. »

Les mesures pour accompagner les trois scénarios

Les trois scénarios impliquent des ruptures plus ou moins marquées dans la représentation du modèle agricole actuel, mais également des évolutions pour induire cette transition. Dans ce cheminement, les consommateurs jouent un rôle crucial. « Au début de la transition, ils expriment leurs inquiétudes sur les pesticides chimiques et leurs conséquences sur la santé humaine, l'environnement et la biodiversité, indique le résumé de l'étude. À un stade plus avancé, l'évolution des habitudes alimentaires et des régimes soutient la transition. »

Les trois scénarios appellent de nouveaux standards de production et de certification des produits et leur valorisation par des labels. Ils impliquent également la création de mécanismes pour organiser le partage des risques entre les différents acteurs de la chaîne de valeur à travers des contrats, ou à l'échelle du territoire. La mise en œuvre d'une agriculture sans pesticides chimiques passe également par le développement de systèmes d'information et de connaissances pour une coconception avec les agriculteurs.

Autre condition, mais pas des moindres : la transformation ou la refonte de la politique agricole commune, comme des instruments économiques utilisés ou des accords commerciaux aux frontières. Cette nouvelle approche demandera également de conclure de nouveaux accords commerciaux avec les partenaires non européens pour qu'ils puissent appliquer des standards de production identiques pour chaque produit présent sur le marché européen.

1. Se renseigner sur le programme <br /><br />
https://www6.inrae.fr/cultiver-proteger-autrement_eng/
2. Télécharger Prospective : Agriculture européenne sans pesticides chimiques en 2050
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-41410-agriculture-europeenne-sans-pesticides-chimiques-2050.pdf

Réactions5 réactions à cet article

Plus la France interdit les pesticides et plus la France devient importatrice en produits alimentaires de pays qui n'ont pas nos normes écologiques, ce qui fait que les français absorberont toujours autant de pesticides et que l'espérance de vie augmentera toujours de de un trimestre par an

le papet | 23 mars 2023 à 10h37 Signaler un contenu inapproprié

Une refonte de la PAC ? La FNSEA a-t-elle seulement été consultée ? Un certain manque à gagner se profilerait-il donc, chez les "chasseurs de primes" que sont - pour ne citer qu'eux - les céréaliers beaucerons ?...

Tonton Albert | 23 mars 2023 à 12h44 Signaler un contenu inapproprié

Tout reposera sur le consommateur. C'est lui qui sera en mesure de confortez la politique décrite ci-dessus, bien qu'elle puisse paraitre utopiques dans certains termes.
Il faudra soutenir l'élevage alors qu'aujourd'hui on fait tout pour le détruire.
Il faudra les moyens financiers pour que le consommateur achète alors qu'il se détourne du bio par souci d'économie
Tous les bons écrits ne changeront rien à ce qui reste essentiel au producteur, vendre au dessus de son prix de revient. Nous en sommes très loin!

jmf | 23 mars 2023 à 15h52 Signaler un contenu inapproprié

@le papet : 2020 est la 4ème meilleure année en terme de vente de glyphosate depuis 2008.
Selon les chiffres officiels l'année 2020 a connu le même volume d'utilisation de phyto que la décennie 2008-2018.
Je crois que vous vouliez plutôt dire :"Plus on interdit les phytos, moins les pratiques évoluent".

Cyril31 | 24 mars 2023 à 10h15 Signaler un contenu inapproprié

Je suis en accord avec Jjmf et cette ligne de pensée que je soutiens depuis toujours.
A propos du petit élevage extensif qui est cité comme une référence dans cet article, il est bon de savoir que la quasis totalité des ONG défendant l'ensauvagement de nos terres le condamne.
Voici ce que disent plus de 30 ONG dont : le WWF, FNE, ASPAS, LPO, ANIMAL CROSS, FERUS, ONE VOICE; SPA... pour ne citer que les plus connues:
"Le pastoralisme n’est pas forcément synonyme d’entretien du paysage"
"Ecologiquement, la montagne n’a pas besoin de moutons Les éleveurs ont besoin d’alpages, mais l’inverse n’est pas vrai. L’idée que le bétail serait utile pour " entretenir " la montagne renvoie à une image symbolique de celle-ci, mais ne correspond à aucune réalité biologique ou écologique."

Aujourd'hui nombre d'agriculteurs Bio sont obligé de vendre en traditionnel en baissant les prix faute de débouché.

ouragan | 24 mars 2023 à 18h25 Signaler un contenu inapproprié

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