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Metaleurop : dans le Pas-de-Calais, la contamination au plomb perdure

La campagne d'incitation au dépistage du saturnisme dans cinq communes du Pas-de-Calais révèle que 83 enfants ont une plombémie supérieure au seuil de vigilance, dont 8 cas de saturnisme. Malgré l'arrêt de l'activité du site métallurgique depuis 2003.

Risques  |    |  D. Laperche
Metaleurop : dans le Pas-de-Calais, la contamination au plomb perdure

Le plomb altère toujours la santé des enfants dans certains territoires du Pas-de-Calais : les derniers résultats de la campagne d'incitation au dépistage du saturnisme dans cinq communes du département révèlent une plombémie supérieure au seuil de vigilance pour 83 enfants, dont 8 cas de saturnisme infantile.

Cette contamination au plomb est liée à l'ancienne activité industrielle de l'ensemble métallurgique de Metaleurop, implantée sur les territoires de Noyelles-Godault et Courcelles-lès-Lens. L'usine comprenait la première unité de fusion primaire de plomb d'Europe. Malgré l'arrêt de son activité en 2003, la pollution des sols au plomb et au cadmium persiste. Ces retombées atmosphériques liées à l'activité ont également touché les communes limitrophes, notamment Dourges, Évin-Malmaison et Leforest.

À partir de 2007, le dépistage systématique du saturnisme a été suspendu. Toutefois, devant le nombre insuffisant de plombémies réalisées pour suivre la contamination, l'Agence régionale de santé a lancé une campagne d'incitation au dépistage, de juin à novembre 2022. Celle-ci s'inscrit dans le cadre d'un plan d'action lancé par la préfecture en juin 2022 pour vérifier l'exposition des riverains.

Le principe ? Les parents des enfants de moins de 18 ans résidant dans les communes concernées ont reçu un bon de dépistage pour les inciter à se rendre dans un laboratoire d''analyses (ou solliciter des infirmiers). Un bilan intermédiaire de cette initiative a été présenté en octobre dernier. Par rapport aux données présentées à cette période, un enfant supplémentaire a pu être identifié comme atteint de saturnisme et 15 nouveaux dépassaient le seuil de vigilance, selon la synthèse publiée, fin mai dernier.

Les enfants les plus concernés sont peu testés

Toutefois, cette campagne d'incitation au dépistage pourrait ne pas illustrer réellement la situation : elle n'a pas réussi à toucher les parents des enfants potentiellement les plus concernés par la contamination. « Les enfants de 0 à 6 ans sont sous-représentés alors que c'est dans cette tranche d'âge qu'ils sont les plus sensibles aux effets du plomb et que leurs plombémies sont habituellement les plus élevées en raison d'un risque d'exposition plus élevé lié à un comportement main-bouche favorisant l'ingestion de poussières ou de terres contaminées et à une masse corporelle plus faible », souligne Santé publique France dans son analyse épidémiologique.

 
Les dernières études font état de la persistance de taux élevés de plomb dans les sols de structures publiques, comme dans les jardins des particuliers  
Jean-Pierre Corbisez, sénateur du Pas-de-Calais
 
L'agence conclut dans ce document à l'absence de surimprégnation au plomb des enfants ayant participé au dépistage par rapport à l'ensemble de la population de l'ancienne région Nord-Pas-de-Calais, ou même de la population nationale. Mais, là encore, Santé publique France invite à lire avec prudence cette affirmation. Car les études de référence utilisées pour comparer les niveaux d'imprégnation sur ce territoire par rapport à l'ensemble de la population datent, notamment pour les enfants de zéro à six ans, des années 2008 et 2009. « La plombémie des jeunes enfants en population générale a pu évoluer depuis 2009 », souligne Santé publique France. L'agence recommande également d'essayer de comprendre les raisons de cette faible mobilisation pour cette tranche d'âge.

Des mesures de gestion de la contamination confiées à l'Ademe

La décontamination des sols pollués est un sujet sensible pour les habitants de ce territoire. Lors de la liquidation judiciaire de Metaleurop en 2003, l'exploitant n'a pas pu assumer son obligation de dépollution du site industriel. Celle-ci l'a été par le repreneur. Dans son offre de reprise, la société Sita France, du groupe Suez, prévoyait en effet la réhabilitation, le redéploiement et la reconversion industrielle du site.

Concernant la pollution aux alentours, des restrictions d'urbanisme ont été établies autour de l'ancienne usine. Trois zones ont été délimitées en fonction de leur concentration en plomb dans le cadre d'un projet d'intérêt général (PIG). La mise en œuvre de mesures de gestion des risques environnementaux et sanitaires a été confiée à l'Agence de la transition écologique (Ademe), dont le nettoyage mensuel de 16 cours d'école de 2003 à 2011, la reprise des terres polluées dans certaines zones du PIG (mais uniquement lors d'extensions d'habitations ou de permis de construire) ou encore l'acquisition foncière d'exploitations agricoles situées autour de l'ancien site sur une surface de 100 hectares.

Des sols qui dépassent toujours le seuil fixé

 
Les recours juridiques engagées pour mieux protéger les citoyens Pour essayer de faire évoluer la situation et mieux protéger les habitants, plusieurs initiatives ont été lancées. Ainsi la communauté d'agglomération d'Hénin-Carvin a engagé un recours en réparation du préjudice écologique. La collectivité souhaiterait la dépollution de 650 hectares ou 570 millions d'euros pour réaliser cette décontamination des habitations. Par ailleurs, l'association pour l'intérêt général des Evinois (Pige) sollicite le remplacement au titre du préjudice écologique des potagers contaminés. Elle aimerait que soit ainsi pris en charge 1 000 potagers ou obtenir 7 millions d'euros pour le faire. L'association a également fait appel dans le cadre de la demande de réparation du préjudice d'anxiété mais aussi immobilier. Le tribunal administratif de Lille a rejeté la requête en octobre dernier. « Nous avons également déposé une plainte pénale pour mise en danger de la vie d'autrui, il y a deux mois ; elle est en cours d'instruction », a indiqué David Deharbe, avocat associé au cabinet Green Law avocats chargé de ces dossiers.
 
Des mesures manifestement insuffisantes pour réduire la teneur en plomb sur le sol de sites fréquentés ou des maisons de particuliers. « Les dernières études réalisées font état de la persistance de taux élevés de plomb dans les sols de structures publiques (école, stade), comme dans les jardins des particuliers, jusqu'à près de six fois les valeurs maximales fixées par la réglementation française », relevait Jean-Pierre Corbisez, sénateur du Pas-de-Calais, dans une question au ministre de la Transition écologique en juillet 2022. Une contamination mise en lumière également par le journaliste Martin Boudot dans un documentaire diffusé en octobre dernier.

Une partie de cette contamination a également été relevée par la préfecture. Le plan d'action de juin 2022 prévoyait également une analyse de sol dans des crèches et des écoles comprises dans le PIG. Les résultats communiqués en septembre 2022 ont montré que les sols de trois écoles situées à Évin-Malmaison et deux écoles de Courcelles-lès-Lens dépassaient la valeur de 300 mg/kg. Pour mémoire, ce seuil doit enclencher la recherche de cas de saturnisme chez les enfants de 6 mois à 6 ans. Pour certaines écoles, les mesures montrent des concentrations supérieures à celles que prévoit le PIG. « Ce constat peut s'expliquer par des pratiques anciennes en matière de construction (utilisation de remblais de qualité dégradée) ou de démolition (intégration d'éléments de démolition dans les sols urbains sans prendre les précautions définies aujourd'hui pour l'économie circulaire) », ont avancé la préfecture et l'ARS.

Les maires des deux communes ont mis en place des dispositifs provisoires pour interdire l'accès à ces espaces contaminés. Les directeurs d'école ont distribué des prospectus pour inciter au dépistage. Des travaux de décapage de certaines parcelles ont été engagés pour l'école Blum, à Évin-Malmaison (dont les teneurs étaient les plus élevées) et devraient l'être pour les autres écoles durant les vacances scolaires d'été.

Des parcelles du site industriel mal réhabilitées

« Lors de son reportage, Martin Boudot a fait venir un cabinet canadien pour analyser les cheveux d'une trentaine d'enfants, le laboratoire a retrouvé des traces de plomb, explique Bruno Adolphi, président de l'Association pour l'intérêt général des Évinois (Pige). La poursuite de la contamination pourrait être liée à des envols de poussières de deux terrains de l'ancien site de Metaleurop qui ont été dépollué de façon incertaine. » Depuis, un arrêté préfectoral de prescriptions complémentaires (du 20 janvier 2023) a imposé à Suez des travaux de couverture par des terres extérieures sur certaines zones (5 et 16) du site. « Cette prescription de travaux fait suite à un constat par la Dreal que certains terrains n'ont pas été recouverts conformément aux obligations prévues dans le cadre de la cessation d'activité et de la remise en état du site, explique la préfecture. Selon l'exploitant, ces terrains ont été recouverts par des matériaux de déconstruction du site, alors qu'ils auraient dû être recouverts par des terres extérieures. »

Réactions1 réaction à cet article

 

Bonjour, Un méthaniseur - Dourges- C'est construit et fonctionne exclusivement avec des mscanthus semé pour "décontaminer" les sols.
le problème est qu'après les digestats sont épandus sur des sols "sains"

AUCASOU | 14 juin 2023 à 18h10
 
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