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Le débat sur la définition des nanomatériaux se poursuit

L'Anses souhaite une définition plus exhaustive des nanomatériaux que celle retenue par la recommandation de la Commission européenne. Un appel qui s'inscrit dans un contexte de refonte des réglementations sectorielles.

Risques  |    |  D. Laperche
Le débat sur la définition des nanomatériaux se poursuit

Publiée l'été dernier, la révision de la recommandation de la Commission européenne sur une définition des nanomatériaux continue de susciter le débat. Dans un avis (1) rendu public le 17 mai, l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) rappelle son désaccord avec les choix réalisés. « Cette nouvelle recommandation de définition s'avère moins englobante et flexible que la précédente, estime-t-elle. Elle représenterait ainsi une régression en matière de prévention des risques sanitaires et environnementaux liés aux nanomatériaux. » Initialement, l'enjeu était une remise à plat de la définition pour intégrer l'évolution des connaissances scientifiques, (2) mais également que l'ensemble des textes européens disposent de la même référence.

Car, malgré l'existence dès octobre 2011 d'une recommandation de définition – non contraignante - au niveau européen, une certaine hétérogénéité régnait sur ce qui pouvait être considéré comme un nanomatériau ou pas selon les textes (3) . Certaines règlementations sectorielles se sont en effet adossées à la recommandation de 2011 comme le règlement Reach (révisé en 2018) ou encore le règlement biocide. En revanche, d'autres – par exemple le règlement cosmétique ou celui sur les nouveaux aliments - ont fait le choix d'intégrer d'autres paramètres, qui leur semblaient plus pertinents… Ce qui fait qu'une même substance peut être considérée comme un nanomatériau dans un secteur d'activité alors qu'elle ne le sera pas dans un autre.

L'opportunité de la révision des règlements européens

Une situation qui pourrait rester à l'état de statu quo. Car la révision de la recommandation adoptée en juin 2022 n'a pas mis toutes les chances de son côté pour atteindre l'objectif d'harmonisation. « La mise à jour de la définition sous le format d'une recommandation - c'est-à-dire, une définition sans force juridique - par la Commission européenne en 2022 signifie que cette définition n'aura probablement qu'une portée très limitée sur les réglementations sectorielles, tant qu'elles ne seront pas révisées pour éventuellement l'intégrer », note l'Anses. Même si des efforts semblent être réalisés dans le sens d'un référentiel commun. Le Centre commun de recherche (JRC) de la Commission européenne a publié en avril dernier un guide (4) technique qui précise les modalités de mise en œuvre de la recommandation européenne.

En parallèle, avec leur révision à plus ou moins longues échéances, certains règlements européens constituent des portes pour faire évoluer les définitions, comme le règlement cosmétique ou encore les règlements Reach et CLP, malgré le report de leur réforme. Car si l'harmonisation est l'objectif recherché, ces règlementations sectorielles pourront toutefois ajuster le cadre de cette recommandation de définition. Une ouverture dont l'Anses espère que le Gouvernement pourra profiter. Ainsi l'agence « invite les pouvoirs publics à saisir l'opportunité de la révision des règlements européens relatifs aux substances chimiques (Reach et CLP) et aux cosmétiques pour proposer une définition élargie ».

Un dilemme au niveau national

Au niveau national, la question de la définition se pose également de manière aiguë. Le registre de déclaration des nanoparticules R-Nano s'appuie pour l'instant sur la recommandation de définition de 2011. En découlent des interrogations sur les évolutions possibles à différents niveaux. Tout d'abord, celui de la plateforme de déclaration elle-même. « Le plus regrettable des choix consisterait en l'alignement du droit français sur le système européen via la suppression pure et simple du registre R-Nano. Nous n'envisageons pas cette hypothèse qui serait aberrante et contre-productive, se positionne l'Anses. Au contraire, l'extension d'un tel registre de déclaration obligatoire à l'échelon européen favoriserait une harmonisation plus respectueuse du principe de précaution, principe fondateur du green deal européen. »

Vient ensuite la possible évolution du code de l'environnement concernant la définition française des nanomatériaux. Ce qui présenterait l'avantage, selon le groupe de travail de l'Anses, de maintenir une stabilité pour les acteurs, mais aussi des comparaisons et analyses de marché plus fines. « La définition n'est pas réellement pertinente sur le plan technique et a fait l'objet de critiques qui demeurent valables de la part du JRC, reconnaît toutefois l'Anses. Conserver notre définition ajoutera pour les acteurs du marché français un élément de complexité supplémentaire à prendre en considération dans le parcours de leurs nanomatériaux. »

A l'inverse, aligner la définition française sur la recommandation européenne de 2022 pour les nanomatériaux manufacturés ne semble pas non plus un choix pertinent pour l'Anses. « La nouvelle définition est très peu convaincante sur le plan scientifique et technique, estime-t-elle. Modifier le droit français en ce sens impliquera de revoir l'ensemble des instruments réglementaires et administratifs de sa mise en œuvre (R-Nano), entraînant une forte instabilité juridique dans un domaine complexe où les acteurs ont déjà eu et ont encore des difficultés à se mettre à niveau. »

Reste la possibilité d'une évolution du code de l'environnement sur la base d'une définition plus englobante telle que voulue par l'Anses. La plus pertinente à court terme, selon cette dernière. Même si la réponse idéale demeure l'échelon européen. « Dans la visée d'une harmonisation de l'ensemble des réglementations concernées à l'échelon européen, la meilleure solution consisterait indéniablement en l'adoption par l'Union européenne d'une définition socle ayant une force obligatoire, et répondant aux objectifs décrits dans ce rapportFaute de parvenir rapidement à cette évolution, il semble qu'une révision du règlement Reach pour inclure une définition des nanomatériaux soit possible à moyen terme, modère l'Anses. L'investissement des autorités françaises dans ce travail de révision, s'appuyant sur cette expertise, en faveur d'une définition socle devrait influencer les harmonisations ultérieures des définitions sectorielles. »

1. Télécharger l'avis de l'Anses Définition des nanomatériaux : analyse, enjeux et controverses
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-41809-avis-anses-recommandation-definition-nanomateriaux-reglementations-sectorielles.pdf
2. Lire Nanomatériaux : entre défis et précaution, la science avance<br /><br /><br />
https://www.actu-environnement.com/ae/dossiers/nanomateriaux/nanomateriaux.php
3. Le règlement biocide (UE) 528/2012, le règlement sur les dispositifs médicaux (UE) 2017/745 et le règlement Reach 1907/2006/CE, le règlement Novel Food (UE) 2015/2283 et le règlement Cosmétiques 1223/2099/CE4. Consulter Guidance on the implementation of the Commission Recommendation 2022/C 229/01 on the definition of nanomaterial<br />
https://publications.jrc.ec.europa.eu/repository/handle/JRC132102

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