Cette première a été réalisée par Pierre de Marcillac et ses collègues de l'Institut d'astrophysique spatiale d'Orsay (IAS/CNRS-Université Paris XI) grâce à un nouveau type de détecteur, un ''bolomètre scintillant en germanate de bismuth''.
L'isotope 209 du bismuth est un composant naturel de nombreux minerais. L'extraction de bismuth à diverses fins industrielles (fabrication de fusibles, cartouches de chevrotine, pigments pour verre, céramique ou rouge à lèvres, pommades anti-brûlures...) est faite à partir de résidus de plomb, de cuivre ou d'étain.
Les scientifiques soupçonnaient depuis longtemps que cet isotope était susceptible de se désintégrer par l'intermédiaire de l'émission de particules alpha. Mais, depuis un demi-siècle toutes les tentatives avaient échoué. On avait noté seulement que la désintégration de l'isotope 209 du bismuth devait être tellement longue que celui-ci devait être considéré comme stable.
Quelle ne fut donc la surprise des chercheurs lorsque, pendant une expérience de calibrage de bolomètre en mars 2002, ils ont assisté sur leur écran de contrôle à sept désintégrations. Comme l'ont confirmé d'autres tests, le phénomène correspondait ''sans ambiguïté'', assure l'équipe de Marcillac, à la désintégration de cet isotope, dont la durée de vie correspondrait à un milliard de fois l'âge de l'Univers (estimé à 15 milliards d'années).
Ce travail a aussi démontré l'efficacité de l'instrument utilisé. Le bolomètre scintillant est constitué d'un assemblage de cristal massif, absorbant le rayonnement à mesurer et d'un thermomètre, extrêmement sensible lorsqu'il est très fortement refroidi.
Ces appareils devraient jouer un rôle de premier plan dans la détection d'événements rares, dans la recherche de traces infimes de radioactivité et, plus particulièrement, dans l'étude de l'énigmatique matière noire de l'Univers, selon Nature. L'équipe de l'IAS est d'ailleurs engagée dans un tel programme.
AFP
Article publié le 23 avril 2003