Malgré les améliorations apportées depuis cette année-là et le plan d'action sécheresse initié à la suite de l'été 2003, cette sécheresse a été ressentie à tous les niveaux et ses conséquences ont été présentées dans un rapport de la direction de l'eau du Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable (MEDD).
Ce document explique, qu'en ce qui concerne l'alimentation en eau potable les conséquences ont été limitées. Seules quelques communes isolées ont connu des difficultés d'approvisionnement. La population ravitaillée par citernes du fait du manque d'eau s'élève à environ 3000 personnes. D'un point de vue qualitatif, aucune altération de la qualité de l'eau n'aurait été constatée sauf dans quelques petites communes, notamment dans l'Aisne.
Alors que pour le secteur industriel, aucune baisse d'activité significative n'a été observée, l'agriculture a plus souffert. Le rapport expose que la situation est très contrastée géographiquement et selon les activités agricoles : il est attendu, par exemple, une baisse de rendement du maïs irrigué d'environ 10% au niveau national alors que les rendements de céréales ne semblent pas touchés. 17 départements sont à ce jour éligibles aux calamités agricoles contre 83 en 2003. D'autres enquêtes sont en cours et ces départements pourraient être élargis à d'autres lors des prochaines commissions d'octobre et de novembre.
Quant à la production d'énergie elle n'aurait globalement pas été affectée. La problématique des rejets d'eau chaude, rencontrée en 2003 et due au refroidissement des centrales nucléaires, ne s'est pas présentée cette année. Concernant l'hydroélectricité, il semblerait que les précipitations de septembre dans les Alpes et les Pyrénées aient nettement amélioré la situation.
Enfin pour le milieu aquatique, le rapport précise que des problèmes ponctuels ont été observés : mortalité de poissons, développement d'algues, perturbation de la migration des saumons et des aloses. Mais la direction de l'eau du ministère craint des conséquences plus graves à plus long terme comme une diminution du peuplement piscicole de l'année prochaine ou l'accumulation de polluants dans les poissons.
Début octobre, les régions Poitou-Charentes et Pays de la Loire étaient encore dans une situation difficile. Le niveau actuel des nappes souterraines et des barrages placerait les usagers qui en dépendent en situation de grande vulnérabilité si la recharge hivernale était à nouveau insuffisante. Il semblerait même que certains départements soient constamment concernés par des restrictions d'eau même en dehors des années de sécheresse. Ce constat alarmant met en évidence que le problème n'est pas ponctuel mais bien chronique et que des déséquilibres graves existent entre l'offre et la demande en eau.
Afin de réduire durablement la vulnérabilité de l'alimentation en eau potable à la sécheresse, de concilier les différents usages et de préserver la qualité des milieux aquatiques, un « plan de gestion de la rareté de l'eau » a été élaboré par le MEDD. Présenté hier en Conseil des ministres par Nelly OLIN, ce plan s'articule autour de trois axes : donner priorité à l'eau potable, mieux partager l'eau entre les différents usages et favoriser une meilleure valorisation de l'eau.
Premier axe : priorité à l'eau potable
Afin d'avoir une meilleure visibilité sur les ressources mobilisables et pour présenter une garantie d'approvisionnement le plan prévoit de :
• Compléter le Code de l'environnement en donnant la priorité à l'eau potable par rapport aux autres usages,
• Renforcer la mission d'aide aux économies d'eau des agences de l'eau, notamment la lutte contre les fuites dans les réseaux,
• Assurer l'aspect priroritaire de l'alimentation en eau potable dans l'exploitation des retenues d'eau.
Deuxième axe : Economie et partage de la ressource
Les économies d'eau concernent tous les acteurs mais plus particulièrement les agriculteurs, principaux consommateurs en période de sécheresse (80%). Concernant les particuliers les principales mesures sont :
• Favoriser les économies d'eau dans les constructions neuves en s'appuyant sur la Haute Qualité Environnementale (HQE) et en obligeant l'installation de compteurs d'eau froide pour le collectif,
• Sensibiliser la population,
• Responsabiliser les gestionnaires de golfs.
Pour mieux gérer l'eau en agriculture, le plan propose de:
• Gérer collectivement les besoins entre agriculteurs d'un même périmètre,
• Encourager la construction de retenues mais répercuter leur coût sur les agriculteurs,
• Améliorer l'efficacité de l'irrigation (méthodes, équipements, types de cultures),
• Réduire les volumes prélevés dans les bassins versant en difficulté.
Au niveau des industriels, le plan prévoit de lancer un programme de recherche puis d'investissements pour réduire la consommation d'eau des centrales et leur impact sur le milieu et de poursuivre les efforts d'économie dans les filières les plus consommatrices d'eau.
Enfin pour améliorer la protection du milieu aquatique les principales propositions consistent :
• Renforcer le pouvoir des Schémas d'Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE) sur l'aspect quantitatif,
• Simplifier les redevances prélèvement et les moduler en fonction des enjeux du milieu (région, investissements nécessaires) et dans le temps,
• Améliorer le dispositif de gestion de crise sécheresse et le Réseau d'Observation de Crise des Assecs de cours d'eau (ROCA).
Troisième axe : favoriser la valorisation de l'eau
Les techniques de valorisation des eaux de pluie, des eaux usées traitées ou la désalinisation de l'eau de mer sont des techniques connues mais très peu développées. Le plan de gestion de la rareté de l'eau prévoit dans ce cadre de :
• Développer la récupération et l'utilisation des eaux de pluie pour certains usages (arrosage, nettoyage des sols, ...) :
• Définir dans des guides les conditions sanitaires, techniques et économiques permettant la récupération et l'utilisation des eaux de pluie, des eaux usées traitées et de la désalinisation,
• Mettre en place des aides des agences de l'eau pour ce type de projet et favoriser les installations pilotes,
• Evaluer le taux d'exploitation des principales nappes souterraines afin de connaître les possibilités d'exploitation supplémentaire et les possibilités de recharge artificielle.
Au total ce sont plus de 26 mesures législatives, réglementaires, incitatives, d'études et de communications que compte ce « plan de gestion de la rareté de l'eau ». Toutes ces mesures seront détaillées et proposées dans le projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, mais aucun calendrier n'est prévu pour l'instant.