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Actu-Environnement

Le Parlement Européen statuera le 14 novembre sur le sort du projet de législation REACH

Le Parlement européen décidera du sort de la nouvelle législation européenne sur les substances chimiques baptisée REACH le 14 novembre. Face à l'enjeu, les parties prenantes (industries chimiques et ONG) mettent les parlementaires sous pression.

Risques  |    |  C. Seghier
L'UE élabore actuellement une nouvelle législation réglementant la production et l'utilisation des substances chimiques. Ce projet de législation, publié en octobre 2003 par la commission, appelé REACH (réglementation pour l'enRegistrement, l'Evaluation et l'Autorisation des substances Chimiques) est actuellement en débat au sein du Parlement Européen et des Conseils des Ministres européens.
S'il est adopté, le projet de directive doit imposer aux Etats membres de l'UE des contrôles plus stricts sur les produits chimiques les plus toxiques pour la santé et l'environnement. Cette nouvelle réglementation qui devrait entrer en vigueur en 2007, doit ainsi permettre d'enregistrer, évaluer les substances chimiques et éventuellement interdire les plus préoccupantes d'entre elles. L'objectif étant en 2016 d'obtenir des informations sanitaires sur plus de 30 000 substances.
Les produits chimiques devront être enregistrés par les industriels auprès d'une agence sanitaire communautaire indépendante. Ceux qui représentent un risque pour la santé devront être évalués par des experts indépendants et les substances considérées comme « extrêmement préoccupantes », soit environ 1500 produits chimiques seront soumises à une procédure spéciale d'autorisation de mise sur le marché ou devront être remplacées s'il existe des produits moins nocifs.
Le projet initial REACH obligeait également les industriels à fournir à une agence sanitaire communautaire un dossier d'enregistrement pour toutes les substances produites à plus de 1 tonne par an et dont l'innocuité n'a pu être prouvée.

Mais au sein même de la Commission européenne, les commissaires à l'environnement s'affrontent et certains Etats-membres (Royaume-Uni, France et Allemagne), ont aussi fait part de leurs inquiétudes quant aux conséquences économiques de REACH.

Le 4 octobre dernier, la commission parlementaire chargée de l'environnement a ainsi accepté de limiter les obligations des entreprises produisant ou important des substances en faible quantité (de 1 à 10 tonnes par an). Elle a aussi exclu de l'obligation d'enregistrement les matériaux recyclés, les métaux, les minerais et les déchets.
Elle a toutefois introduit des exigences supplémentaires en renforçant les tests prévus pour les substances produites ou importées entre 10 et 100 tonnes par an dans l'UE. Deux autres commissions l'exigent pour des quantités comprises entre 1 et 100 tonnes et déposeront des amendements allant dans ce sens à l'occasion du vote en plénière. Selon les ONG, la limitation des obligations des entreprises produisant ou important des substances en faible quantité (de 1 à 10 tonnes par an) contribuerait à exclure entre 25 à 30.000 produits.

En octobre 2003, date à laquelle la commission avait publié le texte de cette nouvelle réglementation, le WWF est parti en campagne pour faire pression sur les élus européens et pour prouver la présence nocive de produits chimiques dans le corps humain. 39 députés européens ont été dépistés en avril 2004 : leur sang contenait 76 substances toxiques. Résultat identique en octobre 2004 pour 14 ministres européens de l'Environnement.
Dans le cadre de la campagne Detox, une autre étude du WWF présentée récemment et menée auprès de treize familles dans douze pays de l'UE (Allemagne, Belgique, Danemark, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Italie, Lettonie, Luxembourg, Pologne et Suède) indique que sur 107 produits chimiques recherchés, 73 ont été décelés.
Chaque génération (grands-parents, parents, enfants) a subi des tests pour déterminer les substances chimiques présentes dans leur sang. Les enfants sont en moyenne plus contaminés que leurs parents - 59 produits détectés contre 49 - tandis que les grands-parents gardent dans leur sang des produits interdits depuis plusieurs années, ce qui prouve leur persistance.
La liste noire du WWF France fait un inventaire de pesticides, de retardateurs de flamme bromés, de phtalates, du Bisphénol A, de composants perfluorés…

Pour Eric Delhaye, porte-parole de CAP 21, à l'heure où de nombreuses études confirment la présence de multiples substances chimiques (muscs artificiels, retardateurs de flammes, phtalates…) dans le corps humain et ce, dès le stade pré-natal, sans en connaître les effets à long terme, il est urgent que les gouvernements agissent pour protéger les consommateurs et exigent de leurs industriels qu'ils évaluent les risques sanitaires et environnementaux de leurs productions avant toute mise sur le marché.

Un mois avant l'examen du projet de texte par le Parlement européen, Yannick Vicaire, responsable de la campagne sur les toxiques de Greenpeace France avait indiqué lors d'un colloque à l'Assemblée nationale que le remplacement des produits dangereux doit être une priorité car seul le principe de substitution garantira le respect des objectifs de santé, d'environnement et de sécurité. Il faut insister sur la nécessité d'inclure dans REACH une obligation forte sur la substitution chaque fois qu'existe une alternative fiable.
Le responsable regrette que le principe de substitution a cédé la place à la notion de maîtrise valable des risques au fil des discussions sur REACH depuis 2003. Sous la pression de l'industrie chimique et en l'état actuel du projet, seules 5% des 30.000 substances soumises à autorisation au sein de l'UE, soit 1.500 produits, seraient concernées par l'exigence de remplacement, a-t-il indiqué.

Par ailleurs, l'universitaire américain Frank Ackerman de la Tufts University de Boston, a présenté les 18, 19 et 20 octobre, le rapport* « Industrie française et Chimie durable » à l'Assemblée Nationale, au Parlement européen et à la Bourse du travail de Lyon lors de conférences associant Greenpeace France et la Confédération Générale du Travail. Selon lui, ce secteur a les moyens de faire face aux exigences de REACH : tester tous les produits chimiques importés ou produits dans l'UE coûterait au total de 2 à 4 milliards d'euros répartis sur onze ans, soit une augmentation d'1/16 ème de pour cent de leur prix.

De plus, l'investissement semble « raisonnable » puisque, même si cette directive risque de coûter de 2 à 4 million d'euros répartis sur onze ans, l'application de REACH serait compensée par la baisse des dépenses de santé ! Les résultats d'une autre étude** sur les bénéfices de REACH pour la santé au travail ont été présentés le 17 octobre au Parlement européen. Cette étude, réalisée par l'Université de Sheffield, démontre que REACH devrait permettre d'éviter chaque année en Europe 50.000 cas de maladies professionnelles du système respiratoire et 40.000 cas de maladies professionnelles de la peau dus à l'exposition des travailleurs aux substances chimiques dangereuses.
Selon le rapport, cela représenterait au total une économie moyenne de 3,5 milliards d'euros sur 10 ans pour l'Europe des 25. Des sommes qui ne devront pas être déboursées par la sécurité sociale des différents pays.

L'Union des industries chimiques (UIC) a organisé dernièrement à Paris une rencontre intitule «Chimie et santé, le nouveau débat émotionnel». Le lobby de l'industrie chimique s'oppose évidemment à toute réforme pour des raisons qu'elle caractèrise de préservation de l'économie et de la compétitivité européennes.

Etant donné l'enjeu du vote et la pression exercée par les lobbies de l'industrie chimique auprès des Parlamentaires Européen, le WWF et beaucoup d'autres ONG de protection de la santé et de l'environnement seront présentés le 14 novembre pour manifester devant le Parlement Européen. Selon le WWF Belgique, plus de 160.000 citoyens des pays de l'UE et d'autres pays ont signé les différentes pétitions lancées par le WWF pour demander aux politiciens européens de mieux contrôler les produits chimiques toxiques. Par exemple, en Belgique, le WWF a récolté plus de 10.000 signatures en quelques jours seulement. Les signatures sont une preuve de la préoccupation sérieuse manifestée par le public en ce qui concerne la présence de produits chimiques dangereux dans les produits d'utilisation quotidienne, a déclaré Karl Wagner, Directeur de la Campagne DetoX du WWF.
Le rapporteur en chef sur le projet REACH auprès du Parlement européen, Guido Sacconi, a récemment reçu à Rome les milliers de signatures récoltées par le WWF au cours des derniers mois, auxquelles s'ajoutent plus de 18.000 réponses au test en ligne de contamination chimique organisé cette semaine par le WWF en Italie.


Les principales caractéristiques de REACH

Les producteurs et importateurs démontreront dans un dossier d'enregistrement qu'ils gèrent leurs substances chimiques de façon sûre. Les entreprises seront tenues d'enregistrer toutes les substances produites ou importées dans des quantités égales ou supérieures à une tonne par an par fabricant/importateur dans une base de données centrale gérée par l'Agence indépendante qui sera créée.

Les exigences d'information dépendront en grande partie du volume, mais pourront être ajustées en fonction des propriétés intrinsèques et des conditions d'utilisation. Les informations ci-après sont requises pour l'enregistrement :
- Les propriétés intrinsèques de chaque substance et les risques représentés ( propriétés physico-chimiques, toxicologiques et écotoxicologiques). L'expérimentation animale doit être maintenue à un minimum et les coûts seront réduits grâce au partage des données existantes;
- Les utilisations prévues et les possibilités et conditions de contact avec des personnes et/ou l'environnement;
- L'évaluation des risques pour la santé humaine et l'environnement;
- Une déclaration sur la façon dont les producteurs ou les utilisateurs gèrent les risques liés à l'utilisation de la substance. Pour les substances chimiques produites en faibles quantités (moins de 100 tonnes par an) et ne suscitant pas de préoccupations particulières, l'enregistrement sera suffisant.

Les données d'enregistrement seront examinées par les autorités compétentes des États membres. Une évaluation standard est obligatoire pour les substances commercialisées dans des quantités supérieures à 100 tonnes; son principal objectif est de réduire l'expérimentation animale. Les États membres auront également la possibilité d'évaluer toute substance et de demander des informations ou des essais supplémentaires en cas de doute sur les risques potentiels ou la qualité du dossier d'enregistrement.

Les substances les plus dangereuses seront contrôlées, leur utilisation étant soumise à une autorisation préalable. Cette autorisation permettra des utilisations spécifiques dans des conditions précises. Les entreprises demandant une autorisation devront démontrer qu'elles peuvent contrôler de façon appropriée les risques présentés par la substance chimique ou que les avantages socio-économiques de la substance sont plus importants que les risques. Les possibilités de substitution seront également examinées.

*http://ase.tufts.edu/gdae/pubs/rp/ChimieDurableFrance.pdf

**http://hesa.etui-rehs.org/uk/newsevents/files/REACH-sheffield-complet.pdf

Réactions2 réactions à cet article

Bravo pour cet article

Merci pour cet excellent article qui fait le point sur l'état du débat sur Reach à deux semaines du débat au Parlement.
Un regret néanmoins : vous évoquez peu le rôle des pouvoirs publics français ... or ils ont bien entendu (comme ceux des pays de l'Union où existe une industrie chimique développée) un rôle essentiel à jouer dans la période qui s'ouvre ... et notamment en perspective du Conseil compétitivité de décembre prochain.
Le rapport Garrigue (Délégation pour l'Union Européenne - Assemblée Nationale : http://www.assemblee-nationale.fr/12/europe/rap-info/i2549.asp#TopOfPage) comporte des conclusions inquiétantes pour la santé publique.
A l'heure ou courageusement le Sénat a rendu public un rapport sur la crise de l'amiante, il serait inquiétant que sur Reach, les pouvoirs publics laissent l'industrie décider de ce qui est bon pour les européens.
Bien cordialement,
Eric Loiselet
Fondation Les temps nouveaux (co organisatrice du colloque à l'Assemblée du 17 octobre que vous éviquez dans l'article).

Fondation Les Temps Nouveaux | 03 novembre 2005 à 12h07 Signaler un contenu inapproprié
Sans sujet

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Anonyme | 19 mai 2006 à 03h38 Signaler un contenu inapproprié

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