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“Très attendue par les élus locaux, la création d'un Conseil national du littoral constitue une réelle avancée”

Alors que la loi du littoral fête ses 20 ans l'année prochaine, France GAMERRE, adjointe au Maire de Marseille chargée des affaires maritimes et présidente de Génération Écologie, fait le point sur la politique française de gestion du littoral et commente la création du Conseil National du Littoral pour Actu-environnement.com.

Interview  |  Aménagement  |    |  F. Roussel
   
“Très attendue par les élus locaux, la création d'un Conseil national du littoral constitue une réelle avancée”

   
AE : Avec ses 3000 km de côtes, la France est concernée par la gestion de son littoral. Que pensez-vous de la politique française actuelle dans ce domaine ?
FG : Il y a une évolution importante de la politique Française en matière de gestion du littoral en ce sens qu'elle souligne fortement la spécificité de ce territoire et qu'elle en démontre l'importance.
Le littoral français doit, plus que jamais, faire l'objet d'une approche globale favorisant le traitement, dans une démarche unique, de ses parties terrestre et marine, la prise en compte coordonnée de toutes les activités sectorielles, l'association au processus de décision de tous les acteurs - Etat, collectivités, professionnels et acteurs économiques, citoyens - et la mise en place de structures permanentes de gestion et de suivi.
Une telle approche répond, d'une part, à l'objectif d'une ''Gestion Intégrée des Zones Côtières'' préconisée par une recommandation européenne adoptée le 30 mai 2002 et, d'autre part, aux orientations retenues aussi bien par le Comité Interministériel de la Mer les 29 avril 2003 et 16 février 2004 et par la Commission du Littoral du Conseil national d'aménagement et le développement durable du territoire.
Elle suppose de renforcer la concertation et la planification, de permettre un réel équilibre entre la protection et l'aménagement du littoral et de donner des moyens supplémentaires au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres.
Cette récente évolution de la politique de gestion du littoral français vient d'être souligné par la création du Conseil National du Littoral et par l'intégration dans le Schéma de Cohérence Territorial (SCOT) d'un volet SMVM. Le SCOT devient ainsi le document de planification de référence pour le littoral.
C'est un renforcement de l'esprit général de la loi littoral qui est cité dans son premier article de la manière suivante :
'' Le littoral est une entité géographique qui appelle une politique spécifique d'aménagement, de protection et de mise en valeur''.

AE : La loi du littoral fête ses 20 ans l'an prochain quel bilan en faîtes-vous ?
FG : La loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 dite « loi littoral » poursuivait un quadruple objectif :

* préserver les espaces rares et sensibles,
* gérer de façon économe la consommation d'espace par l'urbanisation et les aménagements touristiques,
* ouvrir plus largement le rivage au public,
* accueillir en priorité sur le littoral les activités dont le développement est lié à la mer.

Cette loi de 1986 avait pour objet de coordonner les mesures jusque-là disparates destinées à maîtriser la pression subie par le littoral Français car l'attrait constaté transformait le littoral en richesse convoitée et donc menacée, d'autant plus qu'il s'agit d'un espace rare, fragile, non-reproductible. Il faut le ménager''.
Mais plus de dix-huit ans après l'adoption de cette loi, force est de constater que celle-ci n'a pas réussi à établir le « mode d'emploi » adéquat permettant d'aboutir à une gestion équilibrée de cet espace tant convoité.
Le littoral Français est l'un des plus artificialisés d'Europe. Ainsi 12 % des logements et 7 % des locaux construits chaque année en France sont réalisés sur une bande littorale qui représente moins de 4 % du territoire national.
L'attractivité du littoral, et donc la pression engendrée sur cet espace, s'est encore accrue avec l'implantation de nouvelles activités économiques et sociales, sans que les usages traditionnels n'aient disparu. Résultat, aujourd'hui les espaces naturels et agricoles reculent.
L'objectif de protection de la ''loi du littoral'' ne semble donc que partiellement atteint même si les abus les plus manifestes du bétonnage à outrance semblent avoir été éloignés.
Mais, en corollaire, l'autre vocation de la loi littoral, le développement des territoires, est-il satisfaisant ? Les fortes insatisfactions exprimées, par les professionnels de la pêche ou du mareyage, les agriculteurs, les élus locaux concernés etc... permettent parfois d'en douter.
De nombreux rapports existent, le constat est le suivant : il s'agit, enfin, de penser le littoral de manière globale.
Aujourd'hui le littoral est au centre de multiples mesures de régulation, de protection, de préservation ou de gestion. Les outils et normes, organisant les différents usages ne sont compréhensibles que de quelques experts initiés. Cette opacité est un obstacle majeur à la gestion sereine de cet espace.
Il ne s'agit donc pas de révolutionner ''la loi littoral'' mais de remédier aux défauts originels de la politique du littoral : la sectorisation, le défaut de concertation ou le manque de transparence ou encore le manque de prise en compte des spécificités locales.
La nouvelle approche entrain d'être élaborée, notamment à Marseille, s'inscrit résolument dans l'esprit de la décentralisation en proposant de définir la politique du littoral en concertation avec l'ensemble des acteurs concernés et à un niveau géographique pertinent.

AE : La loi semble pour certains un frein au développement des régions côtières. Qu'en pensez-vous ?
FG : Cette loi a fait la preuve de son efficacité en permettant de protéger nos côtes face aux appétits des promoteurs immobiliers et c'est un outil pour essayer de maîtriser les croissances démographique, touristique et économique.
Mais ''la loi littoral'' n'a rien empêché, ni ralenti. Tout affaiblissement de cette loi fera donc exploser la bétonnisation sur le littoral, d'autant que la pression démographique va décupler.
Faire évoluer ''la loi littoral'' en fonction des spécificités de chaque façade maritime, pour ne pas dire en fonction des communes qui souhaitent se soustraire des contraintes de la loi de 1986, conduit à penser que la loi ne sera plus la même selon les régions. S'il y a autant d'exceptions, de réglementations qu'il y a de côtes, c'est la porte ouverte à maintes dérives.
Je ne souhaite pas que le transfert de compétences de gestion du littoral, de l'état vers les institutions locale, se fasse au détriment de l'environnement littoral.
La portée juridique des lois d'aménagement et d'urbanisme et en particulier de la loi Littoral est maintenant renforcée par la mise en place d'un volet littoral à l'intérieur du Schéma de Cohérence Territorial (SCOT).
Le SCOT va définir les vocations du territoire et retranscrire ses grands enjeux. Aux collectivités de ce territoire à mettre en place des politiques de gestion plus adaptées à leur environnement spécifique et qui soient plus réactives aux modifications des enjeux.
C'est exactement ce que nous faisons à Marseille, la Communauté Urbaine Marseille Provence Métropole est responsable de réaliser ce SCOT sur la base des enjeux que la Ville de Marseille établi en concertation avec tous les partenaires économiques, sociaux et institutionnels.

AE : En tant qu'adjointe au maire de Marseille, chargée des affaires maritimes, à quelles problématiques êtes-vous confrontée ? Vous êtes vous déjà appuyé sur la loi du littoral pour l'aménagement des côtes ?
FG : La densification annoncée et déjà effective sur la bande côtière méditerranéenne couplée avec les modifications des équilibres environnementaux oblige à définir et mettre en place une politique de gestion qui garantisse la préservation de la ''ressource environnementale marine'', surtout en face d'une métropole comme Marseille.
Le cœur de notre action se centre sur les enjeux de protection, de réhabilitation et de valorisation du littoral.
Les axes de notre travail concernent le développement des activités économiques, touristiques et maritimes, la gestion des espaces balnéaires, portuaires, la réhabilitation des fonds marins, la protection des espaces naturels et leurs accès et aussi la prévention des risques.
Cela nécessite un effort particulier de concertation et d'harmonisation entre tous les acteurs de ce territoire, et je dois souligner la vigueur du monde associatif et sa participation positive.
Cette année, dans la lignée des recommandations européennes en matière de Gestion Intégrée des Zones Côtières, la Ville de Marseille a, engagé un partenariat avec l'Agence de l'Eau Rhône Méditerranée et Corse pour la réalisation du Plan de Gestion de la Rade de Marseille, d'ici fin 2007.
Il s'agit, d'une part, de bâtir une vision globale et partagée des principaux enjeux liés au domaine maritime, d'autre part, d'impulser et d'entretenir une dynamique d'acteurs à partir d'actions concrètes et concertées de sauvegarde, de valorisation et d'aménagement du littoral.
La stratégie d'élaboration de la politique de préservation et de valorisation du domaine marin de Marseille a jusqu'ici consisté à promouvoir des projets concrets, partagés et portés par l'ensemble des acteurs du milieu, sur des zones de ce territoire à « fort enjeu » ou sur des thématiques bien définies, en s'assurant de la pertinence de ces projets au regard des connaissances scientifiques dont nous disposons.
Il est important de souligner que cette démarche est l'aboutissement de la construction réussie d'un partenariat avec les acteurs du domaine maritime. Projet RECIFS PRADO 2006 , Création d'un Parc Maritime sur les Iles du Frioul.

AE : Actuellement la création du Conseil National du Littoral est en cours. Qu'attendez-vous de ce nouvel interlocuteur ?
FG : C'est une avancée ! On a vu que la mise en place de réglementations et de procédures nationales, plus ou moins autoritaires prises pour réagir à des crises, mais qui oublient souvent de s'adresser à ceux qui vivent sur le littoral, était un échec, comme ce fut le cas pour les SMVM.
La création d'un Conseil national du littoral, est très attendue par les élus locaux.
Présidé par le Premier ministre, il comprendra à parité, d'une part, des représentants du Parlement et des collectivités territoriales des façades maritimes de métropole et d'outre-mer, d'autre part, des représentants des établissements publics intéressés, des milieux socioprofessionnels et de la société civile représentatifs des activités et des usages du littoral.
Doté d'un rôle de proposition auprès du Gouvernement qui pourra le saisir pour avis de tout sujet relatif au littoral, il devra être associé au suivi de la mise en oeuvre de la « loi littoral » et des textes pris pour son application.
En outre, le rapport annuel d'évaluation que le Gouvernement devait présenter, aux termes de l'article 41 de la « loi littoral », qui n'a été élaboré qu'une seule fois en 18 ans, sera désormais établi « sur proposition du Conseil national du littoral ».
Celui-ci pourra ainsi jouer un rôle d'aiguillon auprès de l'exécutif pour l'évaluation de l'application de la loi.
La création du Conseil National du Littoral qui reconnaît la spécificité de ce territoire permettra une meilleure prise en compte de celle-ci et de sa diversité. En effet la moitié des membres siégeant seront des représentants des collectivités par la prise en compte.
Cette création permettra de renforcer la concertation, la planification et la décentralisation.

AE : À votre avis, quel rôle l'Europe peut-elle jouer dans la politique de gestion du littoral ?
FG : L'Europe a déjà un rôle très moteur dans la définition des politiques de gestion du littoral à travers la Directive Cadre sur l'Eau et la recommandation du Parlement Européen et du Conseil sur la mise en œuvre d'une Gestion Intégrée des Zones Côtières.
La Directive Cadre sur l'Eau a pour objectif central : la protection des milieux aquatiques et des ressources en eau. D'ici à 2015, il faut atteindre un ''bon état'' de la qualité des milieux et de l'eau. Les zones côtières sont comprises dans cette directive.
C'est un objectif fort qui nécessite une anticipation des collectivités du littoral. Le rôle d'un élu doit être d'organiser la mobilisation afin d'attendre cet objectif.
L'Europe joue donc un rôle important au niveau local en retranscrivant les problématiques qu'elle appréhende au niveau international. Cela est d'autant plus important sur les aspects environnementaux, et pour ce qui nous concerne méditerranéen.
Par exemple, Marseille est le site pilote pour deux projets conduit par l'IFREMER :

* METROC en vue de d'améliorer l'évaluation qualitative et quantitative des polluants telluriques issues des grandes métropoles méditerranéennes ;
* SOCOM qui s'intéressent à la diffusion de ces apports à travers une meilleure prévision de la courantologie côtière



En savoir plus :

* https://www.actu-environnement.com/ae/news/1216.php4
* http://www.dossiersdunet.com/article325.html
* http://www.dossiersdunet.com/rubrique40.html
* http://www.fne.asso.fr/PA/littoral/littoral.htm

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