
Vendredi dernier, le président de la CIVEPE, Claude MOREAU, a remis son rapport 2005, à Nelly OLIN, Ministre de l'écologie et du développement durable. Ce document présente les réflexions de la commission sur la définition du terme «véhicule propre», la promotion de l'utilisation de biocarburants, la promotion des achats publics de véhicules propres, la veille technologique et le suivi réglementaire.
Ce rapport confirme notamment la mise en place d'un étiquetage des véhicules propres prenant en compte leurs émissions de CO2. Ces étiquettes, basées sur le même modèle que celles des produits électroménagers, apparaîtront bientôt sur les pare-brises des véhicules neufs en vente. Les voitures seront donc classées de A (vert foncé) pour des émissions de CO2 inférieures à 100 g/km pour les moins polluantes, à G (rouge) pour celles dépassant les 250 g/km. Aux termes d'un arrêté interministériel, en préparation, les concessionnaires auront jusqu'au 30 juin 2006 pour se conformer au nouvel étiquetage. Nelly OLIN semble convaincue que cette mesure de sensibilisation forte aura un impact sur le comportement des consommateurs.
Dans son rapport, la CIVEPE observe que 34% des voitures particulières immatriculées en 2004 auraient reçu l'étiquette jaune, correspondant à des rejets de CO2 compris entre 141 et 160 g/km. Les émissions moyennes des véhicules neufs du parc automobile français étant de 154 g/km, tous constructeurs confondus, on est encore loin de l'objectif européen de 140 g/km qui doit être atteint pour 2008-2009.
La ministre a également confirmé la mise en place d'une surtaxation de la carte grise pour les véhicules émettant plus de 200 g/km de CO2 et de l'augmentation du crédit d'impôt pour les véhicules propres, qui passera de 1525 € à 2000 € l'an prochain. Cependant ces aides ne s'appliquent actuellement qu'aux voitures hybrides ou électriques ou roulant au GPL ou au GNV. La ministre souhaiterai prendre en compte également les émissions de CO2 et d'autres polluants pour l'affectation de ces aides.
Concernant l'utilisation des véhicules propres par les administrations et les collectivités, la ministre à qualifié le rapport de réaliste mais malheureusement négatif. En effet, les achats de véhicules propres par les administrations sont en baisse et l'objectif de la loi sur l'Air n'est pas atteint. Cette loi engageait les flottes publique à acquérir 20% de véhicules propres mais ce taux n'atteint que 10% en 2005. La ministre justifie cet échec par une mauvaise information des administrations et un choix limité dans les véhicules. Elle encourage donc les constructeurs français à développer d'autres types de motorisations.
Sur la question des biocarburants, le rapport confirme qu'à court terme, c'est la stratégie de mélange de biocarburants dans les carburants pétroliers classiques qui s'avère la plus efficace pour réduire les émissions de CO2 de la France car la totalité des 30 millions de véhicules du parc peut en bénéficier. Mais il précise qu'il ne faut pas ignorer la voie d'une utilisation dédiée de biocarburants dans des véhicules conçus à cet effet. Le Brésil développe depuis 2003 la filière des FFV (Fuel Flexible Vehicle) pouvant fonctionner à tous les mélanges entre 25% et 95% d'éthanol. D'une façon générale les flottes dédiées utilisant des biocarburants à forte concentration, voire purs doivent être prises en considération.
Pourtant, le rapport met en évidence la concurrence qui existe entre la production alimentaire et les cultures destinées aux biocarburants. Le niveau de production envisagé pour la filière colza pour permettre d'atteindre l'objectif de 10% de biocarburants à la pompe d'ici 2010, dépasse largement l'ensemble des terres disponibles et va donc impliquer des arbitrages entre les productions alimentaires et énergétiques.
Il rappelle également qu'au sein de la filière biocarburants, les cultures destinées à l'essence (betterave, blé et maïs) sont en concurrence avec les cultures destinées au gazole (colza, tournesol, soja). Cependant, la CIVEPE considère que les filières gazoles devront être privilégiées puisque le gazole concerne 70% du parc automobile français.
Du côté de la recherche, le Plan Véhicule Propre prévoyait 40 M€ pour développer les moteurs électriques, la pile à combustible ou encore la récupération de l'énergie du freinage. La ministre a souhaité rappeler que des expérimentations de prototypes était en cours comme le véhicule Cleanova testé actuellement à La Poste. Mise au point par la filiale Société de Véhicules Electriques (SVE) du groupe DASSAULT, cette technologie est basée sur une motorisation électrique, mais lors des freinages et des descentes, un générateur permet de récupérer une partie de l'énergie pour réalimenter les batteries, augmentant ainsi l'autonomie du véhicule. Nelly OLIN a ainsi annoncé qu'elle souhaitait utiliser les véhicules Cleanova, l'an prochain, dans les services des Directions Régionales de l'Environnement (DIREN).
En 2002, le parc automobile français était constitué de 34 millions de véhicules dont 210.000 fonctionnant au GPL, 5.000 au GNV, 5.000 électriques et 200 hybrides. Malgré les initiatives de l'Etat, le marché des véhicules propres a du mal à décoller en France même si les Français se disent prêts à investir dans ce type de véhicules. En effet, un sondage réalisé par l'IFOP en octobre 2005 et publié par Dimanche Ouest-France* signale que plus de quatre Français sur cinq (83%) sont prêts à dépenser plus pour acheter une voiture moins consommatrice et moins polluante. Par ailleurs, 88% des sondés se disent prêts à adopter les biocarburants pour diminuer leur consommation de carburants. Ils sont 69% à envisager l'utilisation d'un véhicule hybride fonctionnant à l'électricité et à l'essence et 65% pourraient avoir recours au système « start-stop », qui coupe automatiquement le moteur aux feux rouges.
Les Français ont l'air d'être plutôt réactifs et intéressés par les technologies propres mais dans la pratique les comportements évoluent lentement et tout reste à faire.
* Le sondage IFOP a été réalisé par téléphone les 7 et 8 octobre auprès d'un échantillon de 956 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.