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Les Européens sont au cœur du défi environnemental que doit relever l'Europe

Dans son dernier bilan environnemental, l'AEE démontre que l'Europe doit désormais encourager un changement de comportements de ses citoyens si elle souhaite agir sur les problématiques environnementales actuelles.

Gouvernance  |    |  F. Roussel
L'Agence Européenne de l'Environnement (AEE) a publié en novembre dernier, son imposant rapport quinquennal sur l'état de l'environnement en Europe. En s'appuyant sur plus d'une trentaine d'indicateurs, elle dresse un état des lieux des avancées notamment en aménagement du territoire, pollution de l'air et santé mais rappelle également beaucoup reste à faire. Les questions environnementales sont passées de problématiques liées à la production à des problématiques de consommation. Et les Européens sont au cœur des problématiques environnementales dans leurs choix de tous les jours.
Il ressort des sondages Eurobaromètre qu'une vaste majorité d'entre eux (plus de 70 %) souhaite que les décideurs attachent la même importance à la politique environnementale qu'aux politiques économique et sociale. Individuellement, les Européens sont aussi prêts à agir davantage en faveur de l'environnement ; pour autant, ils consentiraient à plus d'efforts s'ils étaient mieux informés des choix environnementaux de moindres impacts. Et ils agiraient d'autant plus s'ils étaient convaincus que leurs concitoyens se décidaient à agir également. Il apparaît donc important de continuer à informer et à encourager les comportements éco-citoyens.
Pour cela, l'AEE rappelle que les choix locaux ont des impacts globaux. Une meilleure connaissance des effets sur l'environnement et sur la santé aurait un impact positif sur nos choix quotidiens en matière d'achats, nos décisions de lieux de vie et de voyage, explique-t-elle dans son rapport. Surtout que les Européens consomment de plus en plus.
Entre 1990 et 2002, les dépenses des ménages ont augmenté d'un tiers dans l'Union européenne des quinze (UE-15). On prévoit qu'elles doubleront d'ici 2030 dans les pays de l'UE des vingt-cinq (UE-25), avec d'importantes différences entre les groupes de revenu et entre les régions. Dans le contexte d'une économie de plus en plus orientée vers la mondialisation, les choix des consommateurs, où qu'ils soient, ont une incidence croissante sur l'environnement européen, mais aussi sur celui de nombreuses autres parties du monde. Selon l'AEE, une meilleure compréhension des impacts potentiels, grâce à une recherche accrue, contribuerait à inverser certaines tendances actuelles et futures.
L'Europe doit donc relever le défi de mieux consommer. Dans ce sens, l'AEE utilise, entre autres, l'indicateur de « l'empreinte écologique ». Il représente la superficie estimée de terres nécessaires pour produire les ressources consommées et pour absorber les déchets produits. L'empreinte écologique de l'UE-25 est d'environ cinq hectares par personne, soit la moitié de celle des États-Unis mais plus que celle du Japon. Elle est également plus de deux fois supérieure, en moyenne, à celle du Brésil, de la Chine ou de l'Inde. Déjà, le taux annuel d'exploitation globale des ressources naturelles est environ 20 % supérieur au taux de renouvellement.

Dans son bilan l'AEE met en évidence d'autres phénomènes. L'Europe continue à s'urbaniser et à provoquer une pression de plus en plus importante sur le milieu naturel. Une analyse récente montre que plus de 800.000 hectares supplémentaires de terres naturellement productives ont été transformés en surfaces artificielles soit un accroissement de 6 % des zones urbaines entre 1990 et 2000. À mesure que ces zones s'étendent, elles utilisent de plus en plus de ressources en eau et en terres. Cette croissance a un impact sur les importants « services » que la nature est censée assumer comme le filtrage naturel des eaux vers les aquifères d'eau potable ou la préservation des zones humides et de la diversité génétique, dénonce l'AEE.
Cette pression s'en ressent au niveau des ressources naturelles qui s'épuisent progressivement. L'AEE donne l'exemple des stocks de poissons : à la suite de l'épuisement de nombreux stocks de poissons en Europe, la flotte de pêche européenne a élargi ses zones de capture, soutenue en cela par des subventions et des accords bilatéraux. Elle a contribué à épuiser la chaîne alimentaire halieutique en prélevant des tonnages considérables d'espèces de haut niveau trophique. Cette pression est également ressentie au niveau terrestre : de nombreuses espèces sont menacées malgré l'application de politiques de protection des habitats naturels et de la faune et de la flore sauvages. Les sols sont exposés à de multiples menaces qui, d'après l'AEE, devraient continuer de poser un problème compte tenu des évolutions prévues en Europe en matière d'urbanisation, d'agriculture intensive et d'industrialisation ou de désindustrialisation.

Le même constat d'échec est établi en matière de gestion de la demande d'énergie. Depuis 2000, l'amélioration de l'efficacité de la production d'électricité et le recul de la demande d'énergie de la part du secteur industriel ont été contrebalancés par l'accroissement de la consommation d'énergie de la part des consommateurs et du secteur tertiaire. D'ici 2030, la demande d'énergie dans l'Union européenne devrait augmenter de près de 20 %, ce qui va dans le mauvais sens par rapport aux exigences de la lutte contre le changement climatique. Selon l'AEE, les mesures rentables d'amélioration de l'efficacité énergétique sont trop peu utilisées. Elle encourage donc la mise en oeuvre de mesures d'amélioration du rendement énergétique pour les bâtiments, les véhicules et les biens de consommation, le recours à de meilleures installations de cogénération, un investissement soutenu dans les énergies renouvelables… Bref des solutions déjà bien connues mais trop peu appliquées. Elle démontre en revanche que même si la mise en place de telles mesures entraînerait sûrement une hausse des factures d'énergie pour le consommateur, l'inaction aurait un coût supérieur pour la société. En effet, selon certaines études, les « coûts sociaux du CO2» que devrait supporter la société mondiale pour chaque tonne de CO2 émise dans l'atmosphère se situeraient aux alentours de 60€ minimums par tonne soit de 300 à 1.500€ par Européen. Alors que, d'après les chiffres de l'AEE, les coûts supplémentaires liés à la mise en place d'une économie à faible émission de CO2 seraient de 45€ par personnes. Démonstration semble donc faite de l'avantage économique !
À travers ces chiffres et son rapport, l'AEE tente d'alerter sur le manque d'action, alors que les conséquences de l'inaction sont déjà bien visibles. Les changements climatiques sont une réalité, explique-t-elle. Les températures moyennes ont augmenté en Europe de 0,95 °C au cours des 100 dernières années et devraient augmenter de 2 à 6 °C au cours de ce siècle. L'AEE estime cependant qu'à court terme, l'Union européenne devrait atteindre ses objectifs de Kyoto grâce à l'application du système d'échange de quotas d'émissions et à la mise en œuvre d'autres mesures telles que le Programme européen sur le changement climatique. Toutefois, son objectif à moyen terme pour 2020, à savoir une réduction de 15 à 30 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport aux niveaux de 1990, sera plus difficile à atteindre.

Si d'un côté les comportements actuels font pression sur l'environnement européen, ils ont également des conséquences directes sur les Européens eux-mêmes. Selon l'AEE, nous sommes en meilleure santé, mais toujours exposés aux polluants. Malgré la réduction des émissions, les concentrations de polluants restent élevées et sont souvent supérieures aux objectifs fixés. L'Europe a en effet progressé dans la réduction de nombreuses formes de pollution atmosphérique. Elle a notamment éliminé le phénomène du smog dans de nombreuses régions et réduit celui des pluies acides. Toutefois, les fortes concentrations de fines particules et d'ozone au niveau du sol continuent de poser des problèmes de santé. L'Europe perd 200 millions de jours ouvrables par an en raison de maladies liées à la pollution atmosphérique. De plus, l'OCDE estime que chez les jeunes enfants européens, 6,4 % des décès et des maladies sont dus à la pollution de l'air. Une analyse de la stratégie thématique en matière de pollution atmosphérique publiée en septembre 2005 montre qu'un impact considérable sur la santé humaine et sur les écosystèmes persistera, même avec la mise en œuvre totale de l'actuelle législation.
Les citoyens européens sont également exposés à un cocktail de plus en plus riche de polluants chimiques contenus dans les produits alimentaires et les biens de consommation modernes. Les liens entre les produits chimiques et les cancers de certains organes ou la leucémie infantile sont de plus en plus mis en évidence. On manque de preuves irréfutables, mais la présence très répandue de traces chimiques dans les échantillons sanguins de l'homme et dans l'environnement constitue un motif de préoccupation évident, explique l'AEE. Des mesures peuvent être prises. Une réduction des quantités de produits chimiques dangereux utilisés dans l'agriculture et des teneurs de résidus dans les produits de consommation contribuerait à atténuer les conséquences en grande partie inconnues de ces mélanges chimiques, ajoute-t-elle dans son rapport.

Face à ces risques l'AEE tente de convaincre que la prévention de la pollution paie. Elle le démontre notamment à travers la politique de gestion de l'eau qui bénéficie d'un bon retour d'expérience. D'importants efforts ont été consacrés à l'épuration des eaux usées et à la réduction de la quantité de rejets industriels polluants. Il reste toutefois du chemin à faire avant que la directive relative au traitement des eaux urbaines résiduaires soit pleinement mise en œuvre. L'expérience acquise au cours des 20 dernières années en ce qui concerne les politiques de traitement des eaux résiduaires montre que les investissements dans les installations de traitement associés à des incitations économiques en faveur d'une réduction de la pollution à la source constituent le moyen le plus rentable de réduire ce type de pollution. Mais dans le cas particulier de la pollution agricole l'AEE prévient que la prévention s'appuyant sur la modification des pratiques agricoles est plus rentable que l'épuration, en particulier dans une optique à long terme.

Alors que les politiques environnementales mises en oeuvre par l'Union européenne au cours des 30 dernières années étaient en grande partie axées sur les sources de pollution majeures et très visibles, elles doivent désormais être élaborées sur le long terme pour les secteurs économiques qui contribuent le plus à des formes très diffuses de pollution et où les citoyens européens ont une part de responsabilité par exemple dans les transports. L'AEE préconise ainsi d'abandonner progressivement la taxation des « bonnes ressources » telles que l'investissement et le travail au profit d'une taxation des « mauvaises ressources » telles que la pollution et l'inefficience de l'exploitation des ressources, tout en s'assurant que les écotaxes ne sont pas socialement inéquitables.
Néanmoins, l'AEE reconnaît que des obstacles s'opposent à la mise en œuvre des politiques à tous les niveaux de gouvernance de l'UE. Des études de l'Agence montrent que la structure institutionnelle peut être aussi importante que l'élaboration de la politique elle-même. Ce qui n'empêche pas selon elle que les gouvernements et les citoyens doivent en faire plus pour mettre le développement économique en conformité avec les capacités de la planète.

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