C'est dans ce contexte que Diester Industrie a présenté hier son plan de développement. Créée en 1993, l'entreprise est spécialisée dans la production et la commercialisation du Diester et de ses sous-produits (glycérine et tourteaux). Sa production atteignait en 2005 les 400.000 tonnes réparties sur plusieurs sites. Ses centres de productions, ses raffineries et ses dépôts sont situés sur la façade atlantique, dans la région de Sète, Compiègne, dans le Nord, en Normandie et plus sporadiquement dans le grand Est de la France. Grâce au démarrage d'une nouvelle unité à Sète (200.000 tonnes) et au doublement de celle de Compiègne (200.000 tonnes), la production devrait atteindre les 700.000 tonnes en 2006. Des agréments sont attendus courant 2006 et 2007 pour la création de nouvelles unités de production qui devraient fabriquer au total 1,8 millions de tonnes de Diester en 2009.
Sur le plan agricole, un tiers des cultures d'oléagineux (colza et tournesol) soit 400.000 ha est actuellement destiné à la filière non-alimentaire du Diester. Diester Industrie estime que ces objectifs de développement nécessiteront la culture de plus d'1 millions d'hectares d'oléagineux d'ici 2008. Ce qui ne semble pas poser de problèmes puisque les surfaces disponibles sont estimées entre 2,5 et 3 millions d'hectares. Elles correspondent principalement à des terres obligatoirement mises en jachère selon les règles de la PAC. Ainsi, en 2008, deux tiers des cultures de colza ou de tournesol seront destinés à la production de Diester. Le métier d'agriculteur semble donc évoluer vers un nouveau rôle, celui de fournisseur de produits énergétiques. Dans ce sens, l'Union européenne encourage les agriculteurs à mettre à disposition leurs terres pour les cultures énergétiques à travers des aides à hauteur de 45€ par ha.
Fabriqué depuis plus d'une dizaine d'années, le Diester semble ainsi prendre de l'ampleur, tant attendue par les professionnels de la filière. Diester Industrie est convaincue que ce biocarburant peut répondre aux problématiques énergétiques, environnementales et agricoles actuelles. Énergie renouvelable, substituable au gazole, le Diester peut apparaître en effet comme une solution séduisante : moins de rejet de CO2 dans l'atmosphère, diminution des besoins en gazole que la France importe en grande partie, dynamisation du secteur rural. D'un autre coté, on peut craindre une intensification des pratiques agricoles pour répondre aux besoins. Diester Industrie en est bien conscient et se veut rassurant : Avec ce nouveau plan de développement ambitieux, la filière sera très vigilante pour que, de la graine jusqu'au produit, les pouvoirs publics et le grand public soient assurés que le développement des biocarburants ne se fera pas au détriment de l'environnement. Une charte de bonne pratique pour la culture du colza énergétique a donc été mise en place avec les agriculteurs de la filière. Ils doivent adopter les méthodes de l'agriculture raisonnée pour limiter au maximum l'utilisation de produits chimiques.
Convaincu de l'intérêt du Diester et de son potentiel, Diester Industrie a décidé de communiquer massivement envers le grand public, parallèlement à son plan de développement. Sans le savoir les particuliers consomment du Diester actuellement à hauteur de 1,5% dans le gazole, a précisé, Philippe Tillous-Borde, président de Diester Industrie. Pour certaines flottes de collectivités et d'entreprises ce taux atteint même les 30%, lorsqu'elles possèdent un stockage de carburant privé pouvant être alimenté par ce type de gazole a-t-il ajouté. Intitulée « Diester et le diesel est plus vert », cette campagne s'articulera autour de spots radios, d'actions évènementielles, de partenariats, etc. Elle dévoilera progressivement les caractéristiques du Diester et tentera de répondre aux préoccupations du public tant sur les aspects énergétiques qu'environnementaux.
Parallèlement au développement du Diester, les professionnels de la filière souhaitent se pencher sur le cas de l’huile brute. À la suite de la mise en évidence par les motoristes et les scientifiques de l’IFP des risques de détérioration des moteurs, cette voie fut délaissée au profit du Diester dans les années 1990. Le Comité Français des Constructeurs Automobiles à réitérer ses avertissements récemment. Or, depuis le 1er janvier 2006, les producteurs d’oléagineux sont autorisés à auto-consommer leur huile végétale brute pour les besoins en carburant sur leur exploitation et à compter du 1er janvier 2007, un agriculteur pourra acheter de l’huile carburant à un autre exploitant. Face à ces contradictions, la filière reste prudente sur le sujet et souhaite qu’une étude soit menée afin que tous les points touchants aux aspects techniques, économiques ou législatifs soient bien pesés. Cette étude doit aboutir à des résultats incontestables. Chacun doit pouvoir y être associé. Mon seul souhait est que nous ayons enfin des éléments à disposition pour communiquer, informer et conseiller objectivement les agriculteurs sur le sujet des huiles végétales carburants a déclaré Jacques Siret, Président de l’ONIDOL (Organisation Nationale Interprofessionnelle des Graines et Fruits Oléagineux).