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Actu-Environnement

Le gouvernement accélère le développement des biocarburants

À l'occasion du salon de l'agriculture, le Premier ministre a donné un coup d'accélérateur au développement des biocarburants. Une aubaine pour la filière agricole mais au niveau environnemental, le bilan reste mitigé.

Agroécologie  |    |  C. Seghier
Les biocarburants sont des carburants d'origine agricole. Ils sont obtenus à partir de matières organiques végétales ou animales. Il existe classiquement trois grandes filières de biocarburant.
-Les biocarburants issus des plantes oléagineuses (contenant de l'huile) comme le colza ou le tournesol : les huiles brutes obtenues par pressage des graines et les esters méthyliques d'huile végétale (EMHV) appelés aussi Diester, issus de la transformation chimique de ces huiles.
-Les biocarburants obtenus à partir d'alcool produit avec des plantes contenant du sucre (betterave, canne à sucre) ou de l'amidon (blé par exemple) : le bioéthanol ou son dérivé l'ETBE (éther).
-Les biocarburants produits par fermentation sans oxygène de toute matière organique (déchets alimentaires, déchets végétaux, culture…) : ce biogaz (méthane) peut s'utiliser directement une fois purifié, comme le gaz naturel véhicule (GNV).

En France, seuls, l'ETBE et les EMHV sont utilisés dans tous les véhicules puisqu'ils sont incorporés à hauteur de 0,83 % dans les carburants issus du pétrole. Un taux bien inférieur à l'objectif de 2% prévu initialement pour fin 2005, même s'il reste supérieur à la moyenne observée dans l'Europe des 15 (0,42%), souligne l'IFEN dans son dernier dossier consacré aux biocarburants.

Conformément aux objectifs de la directive communautaire 2003/30/CE, le taux d'incorporation des biocarburants dans l'essence et dans le gazole devrait atteindre 5,75% exprimé en valeur énergétique en 2010. Mais dans un climat marqué par l'envolée du prix du pétrole, le gouvernement a défini un nouvel objectif, plus ambitieux que la directive, en novembre 2005 en matière d'incorporation de biomasse dans les carburants : en 2007, la France devra respecter un taux d'incorporation de 5,75 % de biocarburants; un niveau qui devra atteindre 7 % en 2010, soit une anticipation de deux ans pour la première de ces échéances. Pour atteindre cet objectif le gouvernement et les professionnels des secteurs pétrolier, agricole et automobile avaient adopté le 21 novembre dernier quinze mesures destinées à faire progresser le développement des biocarburants en France.

Mais l'objectif étant ambitieux, il convient d'agir rapidement. C'est ainsi qu'à l'occasion du salon de l'agriculture et de manière à impulser une dynamique dans un secteur marqué par la propagation du virus de la grippe aviaire, le gouvernement a tenu à annoncer mardi dernier, les résultats du deuxième appel d'offres (lancé en novembre 2005) sur les biocarburants devenus les stars du salon.

Pour la filière biodiesel, les 3 unités agréées de Montoir-Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), Nogent-sur-Seine (Aube) et Sète (Hérault) au mois de Mai 2005 voient leur développement confirmé, tandis que la construction, à l'horizon 2008, de 7 usines nouvelles est engagée*. Pour la filière éthanol, 3 projets précédemment agréés sont consolidés (l'espagnol Abengoa à Lacq (Pyrénées-Atlantique), Cristanol à Bazencourt (Marne), et Tereos à Lillebonne (Seine-Maritime)) et 3 unités nouvelles pourront être construites**.Nous voulons faire un effort supplémentaire dans ce domaine, et c'est pour cela que dans les tous prochains jours nous allons autoriser 1,8 millions de tonnes supplémentaires de biocarburants, a déclaré le Premier ministre. Une unité de recherche-développement sur les biocarburants va également être édifiée à La Rochelle.
Ainsi, dix nouvelles usines de fabrication de biodiesel et bioéthanol seront créées ce qui permettra aux industriels d'investir un milliard d'euros. Jusqu'ici, le plan biocarburant prévoyait une production française de près de 900.000 tonnes en 2008 contre 100.000 tonnes l'an dernier, soit plus de 10 millions d'hectolitres. Ce sont donc au total 16 usines de production de biocarburants (éthanol et diester) qui seront construites au cours des prochaines années en France pour répondre aux objectifs de production.

Un nouvel appel à candidatures sera également lancé d'ici à la fin de l'année à hauteur de 950 000 tonnes de biodiesel et de 150 000 tonnes d'éthanol afin de satisfaire aux besoins de biocarburants jusqu'en 2010.

Les principaux acteurs de la filière se sont réjouis de ces annonces. Elles vont en effet permettre de lancer 3 nouveaux projets industriels, de compléter en partie les agréments accordés dans le cadre de la première tranche du plan biocarburants et d'inaugurer de nouveaux procédés pour la fabrication de biodiesel, indique Prolea, la plateforme de promotion et de communication de la filière des huiles et protéines végétales françaises. Les producteurs de betteraves et de céréales se sont aussi satisfaits des 150 000 tonnes de bioéthanol supplémentaires accordé le Premier ministre et le ministre de l'Agriculture mais ont regretté les résultats de l'appel d'offres. Cette répartition ne permet pas aux 3 projets industriels qui avaient déjà reçu des agréments d'obtenir leurs volumes économiques minimum de production.

En 2008 la production de biocarburants (3 millions de tonnes, dont 2,2 millions de diester) va donc tripler par rapport à 2006 et se traduira par une économie de 4 à 7 millions de tonnes en équivalent CO2, indique le ministère de l'agriculture.

Le transport, grand consommateur d'énergie, est la première source d'émissions de gaz à effet de serre, avec 149 millions de tonnes d'équivalent (Mteq) CO2 en 2003. L'utilisation de diester à la place du gazole permettrait une réduction de 75% des gaz à effet de serre émis au cours de l'ensemble du cycle de vie du carburant, de sa production à sa combustion, indique l'IFEN. Celle du bioéthanol à la place de l'essence permettrait quant à elle une réduction de 60%. La consommation de biocarburants de 2005 devrait ainsi éviter l'émission de 1,5 Mteq CO2. L'objectif pour 2008 correspondrait à un gain de 7 Mteq CO2.

Enjeu fondamental de la diversification du bouquet énergétique, les biocarburants ont des atouts : ce sont des énergies renouvelables qui contribuent à diminuer certains impacts globaux, comme l'effet de serre et représentent un élément de réponse à l'augmentation du coût des carburants et à la baisse des réserves pétrolières.
Mais leurs méthodes de production entraînent elles-mêmes une consommation élevée d'énergie. Ils peuvent également avoir un impact négatif sur l'environnement car ils sont généralement issus de cultures intensives, consommatrices d'engrais et de pesticides. Les biocarburants sont une bonne idée, mais ils doivent être développés de façon raisonnable. Des cultures trop intensives, qui nécessiteraient une utilisation importante de pesticides, n'auraient plus aucun intérêt pour l'environnement, explique Geraud Guibert, responsable national du PS à l'écologie.

Se heurtant à terme à des limites environnementales, des scientifiques recherchent des solutions. Pour exemple, l'INRA recherche des moyens pour développer l'utilisation de biomasse différente. Les voies actuelles pour la production de biocarburant fondées sur l'utilisation des graines oléagineuses, céréalières et des tubercules sont limitées quantitativement par leur exigence en surface de production, explique l'INRA. Mais il reste un gisement très important peu exploité et n'entrant pas en compétition avec les productions alimentaires : la lignocellulose du bois, de la paille et des résidus biologiques de nos ordures.
Par rapport aux filières classiques de biocarburants, les scénarios basés sur l'utilisation de la lignocellulose présentent trois avantages majeurs selon l'INRA :
- l'élargissement de l'assiette de la matière première collectée (la plante entière, divers résidus incluant la fraction biologique urbaine, la forêt) conduit à une réduction significative de l'impact sur l'effet de serre et sur l'épuisement des ressources fossiles, tout en assurant une meilleure sécurité de l'approvisionnement industriel,
- à productivité égale, la ressource lignocellulosique, en particulier les systèmes pérennes, nécessite moins d'intrants fossiles que les cultures annuelles classiques. Cette propriété conduit à minimiser les impacts locaux comme la pollution des nappes, l'eutrophisation et les impacts locaux et régionaux sur la qualité de l'air,
- le fait que la matière première lignocellulosique soit cultivable dans toutes les régions représente un atout majeur en terme d'aménagement du territoire, en particulier dans les zones écologiquement sensibles.
C'est pourquoi le projet REGIX (Référentiel unifié, méthodes et expérimentations en vue d'une meilleure évaluation du gisement potentiel en ressources lignocellulosiques agricole et forestière pour la bioénergie en France) a été créé en 2005. Ce projet qui durera 3 années a pour objectif d'appréhender dans une approche unifiée (portail unique forêt/agriculture) les savoirs, les méthodes et les techniques concernant les ressources lignocellulosiques nécessaires à la filière biocarburant.

Par ailleurs, l'équipe « Energétique » du département Systèmes énergétiques et Environnement de l'Ecole des Mines de Nantes vient de mettre au point un procédé de retraitement des déchets graisseux qui pourront être utilisé comme biocarburant. Le secteur agro-alimentaire produit 400 000 tonnes de déchets par an : déchets organiques (graisses animales) et carbonés (déchets de bois, végétaux) difficiles à traiter et à valoriser et essentiellement traités dans le Grand Ouest qui concentre à lui seul 50% de l'industrie agro-alimentaire française.
Grâce aux travaux de recherche réalisés à l'Ecole des Mines de Nantes, il est possible de faire tourner avec de légères modifications des moteurs diesel stationnaires à partir de graisses animales et des moteurs à gaz légèrement modifiés à partir des déchets carbonés.
Ces trois années de recherche, sur cette thématique, sont d'ores et déjà valorisées par le dépôt d'un brevet «combustible liquide et procédé de production d'un tel combustible».
D'après l'Ecole des Mines de Nantes, les émissions nocives sont réduites de 80% par rapport à un carburant usuel utilisé pour un moteur diesel normal. Ce procédé réduit le coût de traitement des déchets et celui de la facture énergétique. Il doit par ailleurs permettre aux entreprises de produire elles-mêmes leur énergie avec un système de co-génération.
Deux doctorants, Luc Gerun et Antony Kerihuel, impliqués dans cette recherche, envisagent de créer fin 2006 une entreprise baptisée S3D (Solutions pour les Déchets et le Développement Durable).
Elle proposerait aux entreprises et aux collectivités un ensemble de services pour optimiser le traitement des déchets organiques et leur consommation d'énergie.
Grâce à Atlanpole, qui appuie la création d'entreprises innovantes, Luc Gerun et Antony Keruel envisagent de conclure un partenariat avec des équipementiers producteurs d'installations de co-génération. Dans un premier temps, l'incubation est prévue à l'Ecole des Mines de Nantes.


*Coudekerque (Nord), Bordeaux-Bassens dont la capacité s'élèvera à 200 000 tonnes (Gironde), Grand-Couronne (Seine-Maritime) avec l'implantation d'une nouvelle ligne d'estérification d'une capacité de 200 000 tonnes de Diester Industrie, deux usines à Dunkerque dont une unité d'estérification d'une capacité de 150 000 tonnes, Lisieux (Calvados) et Limay (Yvelines).

**L'usine de l'amidonnier Roquette, à Beinheim, une usine au Mériot (Aube) et une troisième à Origny (Aisne).

Réactions3 réactions à cet article

Le "bio"-carburant agricole pas très "logique"...

Me voici plutot pessimiste quant à l'action du gouvernement: Toujours les mèmes fermes de productivistes engraissés à grand coups de subvantions, vont pouvoir en toute impunité polluer les sols aux produits phyto et engrais chimiques à outrance,
sans parler des passages incessants de leurs machines détruisant les sols. CONTINUONS A PRODUIRE DE CETTE FACON ET AMELIORONS ENCORE CETTE PRODUCTION... A quant la nouvelle subvantion au colza transgénique irrigué pour produire plus d'1T d'huile par ha?
Elle est belle la mamelle de la france...
Enfin une rentabilitée renouvelable

clem Signaler un contenu inapproprié
Guillemets

Bonjour,

J'ai trouvé votre article intéressant mais pas facile à synthétiser. Un point très génant est l'absence de guillements lorsque vous citez quelqu'un: On ne sait pas où commence l'allocution.

Exemple:

Elles vont en effet permettre de lancer 3 nouveaux projets industriels, de compléter en partie les agréments accordés dans le cadre de la première tranche du plan biocarburants et d'inaugurer de nouveaux procédés pour la fabrication de biodiesel, indique Prolea.

??

Cordialement,

Catherine.

cat | 10 mars 2006 à 09h48 Signaler un contenu inapproprié
Re:Guillemets

Bonjour,

Merci de l'intérêt que vous avez porté à notre article. Le volume et la compléxité des informations de départ ont tout logiquement fait de cet article, une information complète et aux multiples facettes.

En revanche, je vous confirme que les citations sont identifées par l'italique.

Bien cordialement

David Ascher

David Ascher | 10 mars 2006 à 10h37 Signaler un contenu inapproprié

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