La commission qui a organisé pendant quatre mois, entre octobre 2005 et février 2006, un débat sur le projet de construction a publié son bilan le 11 avril dernier. Soulignant qu'elle s'est efforcée de conduire un débat utile, tant pour les enseignements du débat proprement dit que pour les avancées qu'il aura permis pour l'avenir,la Commission particulière du débat public (CPDP), présidé par Jean Luc Mathieu, a souhaité revenir dans ses conclusions sur trois caractéristiques de ce débat : l'objet mis en débat lui-même, les modalités du débat public, les pistes qui se dessinent pour les prochaines années.
Les problématiques de la production de l'énergie, mais aussi des économies d'énergie et des énergies renouvelables, ont souvent traversé le débat, renvoyant à des préoccupations beaucoup plus globales de consommation et de mode de vie, indique la CPDP. La commission souligne également dans son compte rendu que les délais de préparation et de débat sont apparus singulièrement trop courts pour mobiliser les Français au niveau national. Un débat de quatre mois peut-il avoir du sens par rapport à une décision qui engage l'avenir à tout point de vue sur des dizaines et des dizaines d'années ?
Elle considère que certaines orientations auraient pu être différemment organisées pour donner plus de cohérence et plus d'efficacité au débat. Par habitude, ou par crainte, la parole n'est en effet pas encore totalement libérée sur le sujet sensible du nucléaire, mais ce débat aura justement permis de commencer à modifier cette situation, constate t'elle.
En revanche la CPDP a réussi à imaginer et à mettre en oeuvre des outils nouveaux : le Cahier collectif d'acteurs, les ateliers préparatoires, la convention entre le maître d'ouvrage et le GSIEN, les groupes de travail thématiques en sont l'illustration, estime la commission.
Pour la commission, le débat public aura également permis d'ouvrir des portes sur l'avenir et des avancées immédiates et significatives. Ouverture sur l'avenir notamment au travers des deux groupes de travail sur le secret défense et l'accès à l'information et sur la prévision et la prospective des besoins en électricité.
Avancées estimées immédiates puisque EDF s'est engagé à produire une version publique du rapport préliminaire de sûreté de l'EPR qui devrait prendre la forme d'un document technique expurgé des éléments protégés par le secret industriel et à établir une convention EDF/CLI de Flamanville/ANCLI permettant de consulter, sur la base d'un questionnement précis l'ensemble du rapport préliminaire de sûreté.
La Commission estime enfin qu'un nouveau débat public devra être envisagé vers 2015 quand se posera la question du renouvellement du parc et lorsqu'il s'agira de décider de la généralisation éventuelle de l'EPR. Il devrait se dérouler différemment en offrant notamment au public la possibilité d'interpeller, outre le maître d'ouvrage, les pouvoirs publics qui fixent les orientations de la politique industrielle ou énergétique dans lesquels s'inscrit son projet industriel et en organisant le débat suffisamment en amont de la définition de la politique énergétique et non pas seulement en préalable à la décision d'investissement des maîtres d'ouvrage.
Mais à l'initiative du Collectif Régional de Normandie et de l'Ouest L'EPR, non merci, ni ailleurs, ni ici ! et du Réseau Sortir du nucléaire, plus de 10.000 manifestants venus de toute la France et d'Europe sont attendus samedi à Cherbourg pour s'opposer à la relance du nucléaire en France et dans le monde et pour protester notamment contre la construction prévue du réacteur nucléaire EPR. De nombreuses personnalités de tous horizons sont attendues comme le militant altermondialiste José Bové, l'ancienne ministre de l'Environnement Corinne Lepage (Cap 21), le député Vert Noël Mamère et le porte-parole de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) Olivier Besancenot.
Pour les verts, la construction d'un réacteur EPR pose les mêmes problèmes de déchets et prolifération que toutes les autres centrales. Il est simplement l'illustration d'une idéologie nucléocrate totalement dépassée, n'apportant de plus aucune amélioration technologique significative par rapport à la précédente génération de réacteurs nucléaires, indiquent-t'ils dans un communiqué.
Corinne Lepage, ancienne ministre de l'Environnement, qui accompagnera une délégation de CAP 21, estime quant à elle, le projet inutile, onéreux et inopportun. Inutile en ce que ce nouveau prototype n'apporte que peu de progrès par rapport à la génération précédente, laisse en suspens des questions essentielles de sécurité, et n'assure même pas un intérêt économique pour les entreprises et les salariés français puisque la cuve du prototype finlandais sera réalisée au Japon. Onéreux, en ce que ce prototype est évalué au départ à 3 milliards d'euros, ce qui signifie qu'il coûtera probablement de 30 à 50 % plus cher en fin de réalisation. Inopportun, en ce que ces 3 milliards d'euros vont canaliser la quasi-totalité des fonds publics de recherche, alors même que l'industrie française de l'énergie renouvelable aurait besoin pour se développer d'un véritable effort de recherche et d'innovation.
www.debatpublic-epr.org
www.stop-epr.org