Les programmes agro-environnementaux et les zones défavorisées proposent des paiements compensatoires ou incitatifs, tandis que les BPA et l'écoconditionnalité énoncent des normes minimales auxquelles les agriculteurs doivent se conformer pour prétendre à différents types d'aides.
Selon la dernière étude de l'Agence Européenne de l'Environnement (AEE) consacrée à ces outils, les programmes agro-environnementaux sont les outils les plus usités et ont de plus en plus de succès. Les mesures agro-environnementales mises en place au sein de l'Europe ont globalement gagné en importance au fil des années. En 1998, environ 20 % de la superficie agricole utilisée (SAU) de l'UE-15 étaient concernée soit plus de 25 millions d'hectares. En 2002, ce pourcentage était passé à 24 % soit 30,2 millions d'hectares. Les niveaux d'application divergent entre les différents États membres avec des superficies couvertes allant de plus de 75 % en Finlande, au Luxembourg, en Suède et en Autriche, à moins 10 % en Grèce, en Espagne et aux Pays-Bas. Ces différences s'expliquent par de nombreux facteurs, notamment les ressources budgétaires nationales.
Par voie de conséquence, les dépenses communautaires consacrées à ces mesures ont augmenté significativement, passant de moins de 50 millions d'euros en 1993 à près de 2 milliards d'euros en 2003. Entre les pays les dépenses varient : de 3 euros/ha de SAU en Grèce à 90 euros/ha SAU en Autriche.
Les mesures les plus fréquemment incluses dans les programmes sont : la réduction des intrants, le soutien à la transition vers l'agriculture biologique et poursuite de celle-ci, la gestion visant la protection ou l'amélioration de la diversité biologique et des paysages et le soutien au maintien et à l'augmentation du nombre de races rares de bétail et de cultures moins fréquentes.
Si ces niveaux d'application et de dépense témoignent d'une attention accrue accordée aux problèmes agro-environnementaux, ils ne donnent aucune information sur les effets environnementaux des programmes. On peut toutefois noter que la grande diversité de mise en oeuvre entre les pays démontre que la flexibilité des mesures agro-environnementales permet leur adaptation aux conditions agricoles les plus diverses dans l'UE et leur adéquation aux principaux problèmes environnementaux des pays.
Afin d'intégrer les préoccupations environnementales dans le politique agricole, les états membre peuvent également utiliser le principe des Bonnes pratiques agricoles (BPA). Diverses approches sont possibles, allant d'une sélection plutôt limitée d'exigences à une vaste couverture de catégories de pratiques agricoles. Dans la plupart des États membres, les normes de BPA obligatoires correspondent aux obligations juridiques existantes aux niveaux régional, national et/ou communautaire. Seuls quelques pays définissent des normes au niveau agricole qui vont au-delà de la législation ou qui couvrent des thèmes tels que la diversité biologique et le paysage. Ce sont les codes de BPA de la Grèce, du Portugal et du Royaume-Uni qui sont les plus complets en couvrant des pratiques agricoles considérées comme particulièrement pertinentes pour l'environnement. La France, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Suède et la Finlande présentent les codes les plus ciblés pour certains problèmes agro-environnementaux mais les moins complets. Certains pays comme l'Autriche ou le Danemark ont choisi d'intégrer des normes juridiquement contraignantes.
En ce qui concerne l'écoconditionnalité, il semblerait que la plupart des États membres aient introduit des critères pour les agriculteurs. Ils doivent donc respecter un certain nombre d'exigences en matière de protection de l'environnement pour pouvoir bénéficier d'un soutien du marché. L'Allemagne et la Suède ont choisi d'établir des exigences environnementales contraignantes et générales et appliquent des sanctions en cas d'infractions proportionnées à la gravité des conséquences écologiques. L'octroi d'une aide n'a toutefois pas été soumis au respect des dispositions environnementales.
Les autres États membres ont choisi de définir des exigences environnementales spécifiques constituant une condition d'octroi des paiements directs. L'Autriche, les Pays-Bas et la France ont prévu des exigences environnementales pour les cultures arables par exemple, tandis que le Danemark, l'Espagne, l'Italie, le Royaume-Uni et la Finlande ont prévu des exigences pour les cultures et l'élevage. L'Irlande quant à elle est le seul pays qui propose des dispositions pour le paysage et le bien-être des animaux.
Quant à la gestion par Zones défavorisées (ZD), elle a pour objectif principal de garantir la poursuite de l'agriculture dans des régions marginales de l'UE. Ces surfaces doivent présenter un risque d'abandon, une faible productivité agricole, des résultats économiques fragiles et une population agricole faible ou en baisse comparativement à d'autres zones agricoles du pays. La superficie désignée comme ZD a augmenté régulièrement depuis 1975. Actuellement cette gestion concerne plus de la moitié de la SAU dans l'UE-15 mais les divergences varient considérablement d'un pays à l'autre : de 1 % au Danemark à 98 % au Luxembourg. Si les trois premiers outils sont de toute évidence conçus pour améliorer la gestion environnementale, les indemnités aux ZD constituent un avantage secondaire.
Au regard de ces observations, l'étude de l'AEE conclu que des progrès ont été réalisés concernant l'intégration des préoccupations environnementales dans la politique agricole de l'UE. Même s'il existe des différences dans les modèles de mise en oeuvre des politiques des États membres, ce sont les programmes agro-environnementaux qui présentent les preuves les plus marquées d'amélioration de la gestion environnementale par les agriculteurs.
Cependant, l'AEE se veut prudente quant à l'efficacité de ces mesures en termes de protection de l'environnement. Elle tient à préciser que les tendances agricoles pertinentes d'un point de vue environnemental sont influencées autant par des facteurs socio-économiques, technologiques que par les instruments de la PAC. De plus, l'obtention d'effets positifs pour l'environnement dépend de la mise en oeuvre efficace et ciblée de mesures pertinentes ce qui n'est pas toujours le cas. En effet, il semblerait que dans certaines régions, les mesures ne soient pas appliquées aux surfaces qui le nécessitent réellement.
Malgré tout, l'efficacité de certaines mesures a d'ores et déjà été démontrée notamment en Allemagne concernant la protection de la biodiversité. Le land allemand du Bade-Wurtemberg a introduit un élément floristique dans son programme agro-environnemental pour récompenser davantage les exploitants agricoles en fonction de la diversité végétale des pâturages. Cette méthode veille à ce que les exploitants reçoivent des primes supplémentaires pour les pâturages qui contiennent au moins quatre espèces ou genres de plantes parmi un catalogue de 28 espèces. La mise en oeuvre de ce programme régional a débuté en 1993 avec comme objectif, l'introduction de pratiques agricoles compatibles avec la préservation de l'habitat des oiseaux des steppes. En 1998, une première évaluation du programme dans les exploitations agricoles faisant l'objet d'un contrat a révélé une évolution des méthodes de production avec des augmentations de la jachère (+13 %), des légumes et des pâturages (+5 %) et une diminution de la superficie céréalière (-17 %). La réduction de l'utilisation d'engrais a été estimée à 29 % et les zones traitées par des produits chimiques ont été réduites de 13 % .
Sur la base d'un recensement régional, l'étude a également démontré une hausse de la population de certains oiseaux au cours des 10-15 dernières années, qui est notamment imputée aux programmes agro-environnementaux régionaux. Globalement, il semblerait que ce programme ait réussi à améliorer la qualité de l'habitat, à changer la structure homogène du paysage et à mettre en place de bonnes conditions pour la préservation des populations d'oiseaux des steppes.