Directeur de la communication chez FEDEREC
CP : Pour bien comprendre le principe de la reprise garantie il faut faire un peu d'histoire et revenir en 1992, à l'époque de la loi Royal avec la mise en place des sociétés agréées que sont Eco-emballage et Adelphe et la mise en place en parallèle des filières de tri et de recyclage du papier/carton, de l'acier, de l'aluminium, du verre et du plastique. À cette époque, FEDEREC est complètement écarté de cette problématique car ses professionnels adhérents sont plutôt orientés sur la gestion des déchets industriels. Au fur et à mesure, ce système dit de « garantie de reprise » organise le marché de façon quasiment monopolistique puisque les collectivités ne pouvaient écouler leurs matériaux que vers certains grands industriels au travers des organismes agréés. Les prix de reprise étaient par conséquent très bas voire nuls pour certains matériaux. Au début des années 90, pendant près de deux mois, le prix du papier a même été négatif c'est-à-dire que les producteurs de déchets payaient les industriels pour qu'ils reprennent les déchets recyclables ! Cette expérience a été « traumatisante » et on est passé maintenant dans une période où l'on ne pourra pas revivre la même chose. Les éco-organismes ont garanti aux collectivités une reprise à un pris certes bas mais qui ne pourrait plus être négatifs. Mais aux abords des années 2000, la Commission Européenne s'est penchée sur cette question et a demandé plus de concurrence et la création d'un véritable marché. Les sociétés agréées se sont donc tournées vers les fédérations professionnelles dont FEDEREC pour aérer ce pseudo-marché afin que les collectivités locales n'aient pas à choisir uniquement entre les sociétés agréées ou se débrouiller seules. Aujourd'hui, cette réflexion a abouti à la création du nouveau système de reprise garantie.
AE : En quoi cela diffère-t-il des anciennes conditions de reprise des déchets ?
CP : Cette reprise garantie prévoit que les collectivités auront la possibilité de s'adresser pour la reprise et la vente de leurs matériaux à des opérateurs adhérents des fédérations telles FEDEREC. Ceci passe par l'élaboration de contrats entre notre fédération et les sociétés agréées d'une part qui souhaitent connaître la destination des déchets qui seront à la charge des professionnels de FEDEREC surtout en termes de traçabilité des déchets et avec la collectivité d'autre part. De son côté, la collectivité s'engage à fournir des déchets d'une certaine qualité définie par des standards.
AE : Quel est l'avantage pour la collectivité ?
CP : Ce qui change par rapport à la formule plus ancienne dénommée Garantie de reprise c'est la possibilité pour les collectivités de choisir pour chaque matériau la formule qui les intéresse : garantie de reprise ou reprise garantie. Les prix qui avaient été négociés à l'époque de la garantie de reprise étaient proches de zéro alors que dans la Reprise Garantie ce sont ceux du marché donc supérieur même si entre-temps les prix « garantie de reprise» ont bizarrement augmenté !!
La grande différence entre les deux systèmes pour les collectivités c'est qu'il y a dans la Reprise Garantie possibilité de négocier les prix de rachat pour chaque matériau, les conditions d'enlèvement, de choisir un opérateur local… ce qui remet en question toute la rigidité du système antécédent. Mais cette nouvelle formule ne remplace pas l'ancienne. Les collectivités ont toujours le choix entre les deux pour chaque matériau.
AE : Combien de collectivités ont déjà été séduites par ce nouveau contrat ?
CP : Aujourd'hui on a des résultats plutôt encourageants. À FEDEREC, on est relativement satisfait. De nombreuses collectivités ont profité de la signature de leur nouveau contrat pour passer en Reprise Garantie. Au 1er septembre 2006, le système de Reprise Garantie représente 900 contrats toutes fédérations professionnelles confondues soit 48 millions d'habitants dont plus de 20% en reprise garantie. 18% des contrats établis pour la reprise de l'aluminium ont été signés en Reprise Garantie, 19% des contrats pour le papier/carton et 16% pour les contrats plastiques. Ce sont en majorité des contrats signés avec de grosses collectivités. Le verre en revanche est un secteur particulier. La plupart des collectivités sont restées en garantie de reprise soit la formule antérieure car il n'existe pas réellement de marché du verre. Seuls deux grands industriels se partagent l'écoulement du verre. Les prix ne sont donc pas plus intéressants en Reprise Garantie.
En ce qui concerne FEDEREC au premier semestre 2006, la fédération avait 99 contrats papier/cartons en cours qui ont permis de récupérer 27.000 tonnes, 113 contrats pour les plastiques et 10.800 tonnes récupérées, 83 contrats pour l'acier et 3.200 tonnes et enfin 117 contrats pour l'aluminium pour 430 tonnes de matériau récupérés.
Malgré une mise en place rendue délicate par la nouveauté de la formule offerte, les professionnels de FEDEREC ont joué un rôle pilote dans le processus d'ouverture des marchés des produits issus du tri des emballages ménagers et ont ainsi démontré leur dynamisme à s'investir sur ces nouveaux marchés et se félicitent de la confiance que les collectivités locales leur ont accordé.
AE : Avec l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation dédiée aux DEEE, une nouvelle filière se met en place. Quelle est la position de FEDEREC sur ce sujet ?
CP : Afin de sélectionner les professionnels qui allaient traiter les DEEE récoltés auprès des collectivités, des distributeurs ou des entreprises, les éco-organismes ont lancé des appels d'offres. Même si aucun bilan officiel n'est pour l'instant disponible, FEDEREC se satisfait des premiers résultats puisque certains de ses adhérents ont déjà été retenus. Maintenant on peut se demander pourquoi avoir été aussi vite pour l'entrée en vigueur officielle de la filière prévue le 15 novembre prochain lorsqu'on sait que les distributeurs vont avoir à gérer un grand nombre de DEEE dès les fêtes de fin d'année. S'il faut que la grande distribution s'organise d'ici là, dans quelles conditions tout çà va se mettre en place ?
AE : Plus globalement, selon vous, le recours à de la matière première secondaire est-il désormais bien ancré dans les politiques d'approvisionnement ?
CP : Sans aucun doute lorsqu'on sait que 50% voire plus des matières entrant dans la sidérurgie sont des matières recyclées en France. On consomme donc autant de ferrailles recyclées que de minerai de fer. Pour ce qui est de l'industrie papetière, les matières recyclées qui sortent de nos entreprises représentent 58% des approvisionnements des papeteries. Dans le domaine de la métallurgie, ça varie entre 30 à 60%. Ceci s'explique par le manque d'industrie sur le territoire français, les matériaux recyclés sont donc exportés. Pour le verre, il provient des collectivités, est préparé par certains de nos adhérents et représente 70% de l'approvisionnement des grands verriers français. Au final, les matières premières recyclées ont plus de place que les matières premières vierges !!