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L'INRA propose des pistes pour réduire la vulnérabilité de l'agriculture à un risque accru de manque d'eau

À travers sa dernière étude, l'Inra démontre qu'il est temps de considérer le risque de manque d'eau en adaptant les systèmes de culture français et en développant la solidarité entre les usagés à l'échelle du bassin versant.

Agroécologie  |    |  F. Roussel
   
L'INRA propose des pistes pour réduire la vulnérabilité de l'agriculture à un risque accru de manque d'eau
   
Conscient des risques de manque d'eau auxquels l'agriculture devra faire face dans le contexte du changement climatique, le ministre de l'Agriculture et de la Pêche a commandité à l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) une expertise scientifique sur cette problématique. Conduite par 25 experts, cette étude a dressé l'état de l'art sur les relations entre agriculture et ressource en eau. L'INRA en a tiré des pistes de réflexion et met à disposition des pouvoirs publics et des porteurs d'enjeux des éléments pour éclairer leurs choix.
En premier lieu l'institut de recherche rappelle que l'agriculture doit être considérée à la fois comme une contributrice et comme une consommatrice de la ressource en eau. En effet, sachant que la croissance de la plante est directement affectée par la sécheresse, l'irrigation est nécessaire au maintien des rendements. Mais on peut aussi considérer le point de vue inverse : l'agriculture, par les modes d'occupation des sols qu'elle engendre au niveau local participe au cycle de l'eau en déterminant la part de l'eau des pluies qui retourne vers l'atmosphère par évapotranspiration et la part qui ruisselle ou qui est absorbée rejoignant les aquifères ou le réseau hydrographique. Ces deux fonctions sont très interdépendantes et doivent s'analyser simultanément à l'échelle d'un bassin versant. Or selon l'institut, ces deux ensembles ont trop souvent été étudiés indépendamment l'un de l'autre. Seules des études croisant la répartition spatiale des systèmes de culture, la répartition spatiale des types de sols et la typologie et le fonctionnement des hydrosystèmes permettront d'aboutir localement à de véritables outils de gestion quantitative des ressources en eau, explique l'Inra.

Sous le climat de la France, la sécheresse recouvre une grande diversité de scénarios climatiques et conserve un caractère très aléatoire. Jusqu'à récemment, le pari d'un risque faible et/ou d'une « assurance » représentée par l'irrigation, ont conduit à privilégier souvent l'objectif de rendement élevé. Mais pour l'Inra, il est temps de réexaminer cette gestion du risque et de l'orienter vers une meilleure adaptation des systèmes de culture à la disponibilité en eau. Aider l'agriculture à s'adapter, c'est lui permettre d'être rentable tout en partageant de façon non conflictuelle la ressource en eau avec les autres acteurs de la société. Pour cela, l'expertise a exploré deux pistes : l'amélioration des espèces cultivées et la mise en place de systèmes de culture et d'élevage aptes à assurer une production rentable tout en étant plus efficients et plus économes en eau.
L'amélioration des espèces cultivées peut se faire par la voie génétique. Ce qui intéresse principalement l'agriculteur, c'est une plante continuant à produire en conditions de sécheresse. Mais l'Inra rappelle que la tolérance à la sécheresse consiste à optimiser les échanges d'eau et de carbone dans la plante plus qu'à insérer des gènes intrinsèques de résistance comme dans le cas de la résistance aux herbicides. Pour l'Inra, il ne faut donc pas attendre de « miracles » des OGM pour obtenir une production abondante en situation de sécheresse, mais plutôt conférer à des espèces existantes des caractéristiques de tolérance par sélection. Pour cela l'Inra conseille d'intégrer cette préoccupation lors des tests préalables à l'inscription des variétés.
Des adaptations peuvent également êtres apportées dans l'organisation des systèmes de culture. L'Inra rappelle que l'élevage est plus sensible à la sécheresse que l'agriculture car pour une même sécheresse, une baisse de production du blé de 20% pourra correspondre à une baisse de production fourragère de l'ordre de 50%. D'autre part, l'Inra rappelle avec beaucoup de bon sens que les cultures les moins vulnérables sont celles dont les besoins en eau au cours de son développement coïncident avec la pluviométrie de la saison.
Mais selon l'étude, l'essentiel des améliorations à apporter porte sur les doses et le rythme des apports d'irrigation. Ces adaptations doivent être complétées par un rééquilibrage de la répartition des différents systèmes de culture. Il n'existe pas de règle générale pour répondre à la question du meilleur mix de systèmes de culture mais le seul cadre pertinent à l'établissement d'une règle est le bassin versant, explique l'Inra. En effet, la part et le type des systèmes interviennent dans la gestion globale des ressources en eau au niveau local, ce qui influe fortement sur les possibilités d'irrigation au niveau du bassin versant. Tout système de culture n'étant pas envisageable dans n'importe quel type de sol, l'INRA propose l'établissement d'une base de données spatialisée sur les systèmes plausibles (élevage, grandes cultures…).

Par l'ailleurs, l'expertise s'est penchée sur les voies d'action économique et politique. D'après l'étude, l'action publique peut envisager trois directions : l'augmentation de la ressource avec par exemple la construction de barrages, l'action compensatoire par versement d'indemnités et l'économie d'eau. Même si la première voie n'était pas du ressort de l'expertise demandée, l'Inra rappelle qu'elle peut avoir des effets pervers en augmentant la demande et surtout des impacts écologiques non négligeables. En ce qui concerne le versement d'indemnités par la commission des calamités agricoles, l'Inra estime que l'assurance privée se développe auprès des agriculteurs mais ne peut pas se substituer entièrement au fonds de calamités agricoles de l'État car dans le cas de la sécheresse, les dégâts sont souvent importants et représentent des coûts d'indemnité élevés.
L'expertise s'est particulièrement intéressée à la troisième voie : l'économie d'eau pour ajuster la demande à l'offre. Pour l'Inra, la première façon d'envisager une action de l'État dans cette direction serait de ne pas favoriser la pratique de l'irrigation en jouant sur les aides de la Politique Agricole Commune. La deuxième façon de diminuer la consommation en eau est le mode coercitif correspondant aux arrêtés préfectoraux. Mais l'Inra estime que ces procédures correspondant à une gestion de crise et doivent rester exceptionnelles : à cette gestion « à chaud » des problèmes devrait se substituer un traitement « à froid » conçu comme une recherche de solutions durables aux problèmes d'équilibre entre l'offre et la demande.
La troisième façon de réguler la consommation est la tarification de l'eau. Elle se justifie dans des situations de fort individualisme des irrigants, lorsque ceux-ci sont peu conscients des enjeux de partage de l'eau à l'échelle du territoire. Conçue sur le long terme, elle a un rôle important à jouer dans le raisonnement des choix de systèmes de culture. Mais pour l'Inra, de telles expériences « libérales » semblent aujourd'hui encore peu transposables à notre pays, pour des raisons de tradition juridique et politique.
En revanche, une hypothèse de progrès réaliste à court terme consiste à favoriser la mise en place d'accords de gestion volumétrique de l'eau, à l'échelle du bassin versant, négociés entre les parties prenantes sous les auspices de l'État. À l'inverse de la tarification qui vise à influencer les comportements opportunistes individuels des irrigants, cette démarche cherche à développer la solidarité des acteurs face à un problème commun, solidarité des irrigants entre eux comme avec les autres usagers de la ressource, explique l'institut. À cet effet, l'Inra propose de favoriser la mise en place d'organisations d'irrigants et de fonder les accords sur des bases techniques plus pertinentes.
En résumé, pour l'Inra il paraît important de passer d'une action a posteriori à une action a priori, de passer d'une action conjoncturelle d'ajustement (interdiction d'arroser, dérogation obtenue de l'UE pour pâturer des jachères…) à une action structurelle (gestion volumétrique négociée sur des bases politiques et physiques). Pour cela, l'Inra demande aux pouvoirs publics de :
-commanditer les études nécessaires à l'établissement de bilans hydriques de bassins versants,
- travailler avec les organismes de développement et les agriculteurs sur le principe de mix de systèmes de culture,
-veiller à la sécurisation des filières susceptibles d'offrir des débouchés rentables aux systèmes de culture alternatifs proposés,
-faire évoluer l'appareil législatif en levant les difficultés réglementaires et juridiques afin de favoriser la mise en place de gestions volumétriques concertées.

Toutes ces propositions ont été présentées lors d'un colloque public le 19 octobre 2006 afin de mettre en débat les questions soulevées auprès des porteurs d'enjeux concernées par la gestion collective de l'eau : profession agricole, représentants d'associations d'environnement ou de consommateurs, gestionnaires de l'eau… Pour Marion Guillou, Présidente Directrice Générale de l'INRA : un tel état des lieux sur le plan scientifique permet à notre Institut de repositionner ses travaux en matière de recherche sur l'eau, d'en poursuivre certains, d'en amplifier d'autres. Il conforte une de nos priorités pour la période 2006-2009 : concevoir des systèmes agricoles innovants, compétitifs et durables.

Réactions4 réactions à cet article

dessalement de l'eau

Le dessalement de l'eau de mer revient à 90 cts d'€ .En france on peut utiliser comme energie,l'electricite d'origine nucléaire,
nécessaire au fonctionnement de ce type d'usine.
Reste la construction d'acqueducs comme le faisaient ces fous de romains, vers les régions agricoles
Reste à pomper comme les shadocks ,l'eau dans ces tuyaux.
Quel serait le coût final du m3 d'eau? S'il ne dépasse pas les 2,5€/m3 c'est viable ,car en la vendant 3,5€/m3 on fait encore du bénéfice.
Cette eau à la sortie usine est biologiquement pure et déminéralisée,donc aucun traitement n'est nécessaire même si on la distribuait en eau potable.
De toute façon quel que soit le coût ,si on n'a plus d'eau ce serait la solution.

artu06 | 27 octobre 2006 à 19h56 Signaler un contenu inapproprié
Pourquoi pas la gestion globale de l'eau ?

En France il y a une vraie volonté de ne pas gérer l'eau autrement que la gestion qui rapporte des ressouces financières d'abord et trop.
C'est à dire que la ressource en eau ne doit pas être répartie de façon à lutter contre la sécheresse mais elle est uniquement réservée par captage à la commercialisation des besoins au détriment du long terme et de l'intérêt général.
Si il est évidement pratique de se servir de tuyaux pour irriguer ce n'est pas un raison pour rarifier l'eau sur l'ensemble du terrritoire afin d'obliger les consommateurs à payer l'eau.
La gestion globale de l'eau est une prédistribution générale de la ressource allant vers une eau abondante et moins cher pour tous et sur l'ensemble du territoire.
L'eau propre des précipitations des sommets, plus abondante ,est réinfiltrées sur les têtes de bassin pour récharger les réserves souterraines.Les nappes phréatiques de plaines sont ainsi d'avantage rechargées par des eaux permantes provenant des reliefs que par infiltrations soudaines arrivant par les inondations des fleuves avec les pollutions de surface.

jeandb | 02 novembre 2006 à 12h59 Signaler un contenu inapproprié
Re:dessalement de l'eau

Ils ne sont pas font ces Romains.

Par contre les shadocks pompaient...et c'est pas bien!

Gravitairement comme les Romains c'est mieux que d'avoir besoin d'une centrale nuclaire pour pomper l'eau des nappes phréatiques et faire avancer les déserts.

Pomper avec de capteurs solaire ou des éolinnes c'est pas mieux...

jeandb | 02 novembre 2006 à 13h12 Signaler un contenu inapproprié
Et le semis direct alors?

Bon début de solution que propose l'Inra, mais certains aspects de l'agriculture durable et donc favorables à la gestion de l'eau restent complètement aux oubliettes. Prenons par exemple le semis direct (culture sans labours) qui est une technique qui a fait ses preuves et qui, si elle est bien appliquée, permet de réguler le débit d'eau mais aussi et surtout empêche à une grande partie de l'eau de s'évaporer.
Il serait temps de financer le développement de cette technique en France (matériels, appuis...).

Leslie | 02 novembre 2006 à 19h49 Signaler un contenu inapproprié

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