Robots
Cookies

Préférences Cookies

Nous utilisons des cookies sur notre site. Certains sont essentiels, d'autres nous aident à améliorer le service rendu.
En savoir plus  ›
Actu-Environnement

Gestion de la pollution à proximité

Communiqué du Comité de la Prévention et de la Précaution sur le contexte de la gestion de la pollution à proximité, notamment par le plomb et le cadmium

Le CPP considère que la fermeture prévue prochainement de l'usine de Metaleurop-Nord de Noyelles-Godault (Pas-de-Calais) modifie le contexte de la gestion de la pollution à proximité, notamment par le plomb et le cadmium. Un plan de travail et d'action doit être établi, se fixant comme objectif urgent la suppression ou une très large réduction des impacts sanitaires et environnementaux. Dans une telle situation, la mise en place d'une Commission Locale d'Information et de Surveillance disposant d'un comité scientifique composé d'experts locaux et nationaux ne peut être que saluée.

Le CPP observe qu'ici, et ce n'est pas toujours le cas, la réalité des nuisances sur l'homme liées à l'environnement autour de cette installation est reconnue ; des études de terrains, travaux d'évaluation et actions de prévention ont été effectués depuis 15 ans. Cela signifie notamment que des connaissances sont acquises et qu'un retour d'expérience est disponible. En revanche, ces éléments ne signifient pas que la situation soit satisfaisante, d'une part, au plan de la connaissance des impacts et des voies d'atteintes, et d'autre part, au plan des contre-mesures mises en oeuvre et de l'aménagement des conditions de vie locales.

Conforté par ses travaux passés, faisant notamment référence à son avis sur les sols pollués, et par sa réflexion dans le domaine de l'expertise, le CPP juge qu'une démarche approfondie d'évaluation des risques doit être entreprise, s'appuyant sur les acquis évoqués ci-dessus, mais aussi sur les connaissances des voies d'atteintes et des impacts disponibles au plan national, et sur les recherches en cours tant au niveau national qu'international.

Le CPP estime que cette démarche doit comprendre de plus une évaluation, large et sans a priori, de l'ensemble des solutions tangibles qui peuvent être adoptées et des moyens mis en oeuvre pour réduire les risques et les impacts sanitaires environnementaux d'origine industrielle.

Le CPP estime que le succès de la mise en oeuvre de contre-mesures dépendra beaucoup de la participation des habitants concernés et de leurs représentants à la conduite de ces mesures sur le moment et dans le long terme. Aussi, les solutions sanitaires envisagées, par une concertation entre l'administration et la population, doivent bien prendre en compte l'importance patrimoniale, économique et culturelle que cette dernière accorde à son environnement.

Le CPP insiste sur l'urgence de ce travail. Il souligne qu'un processus d'évaluation d'envergure d'une telle nature n'est pas uniquement justifié par la conjoncture mais aussi parce que ce processus devrait permettre d'aller au-delà des acquis actuels sur les méthodes d'évaluation et de gestion pour construire une activité d'expertise conséquente et pérennisée sur un sujet qui concerne de nombreux sites en France.

Le CPP rappelle enfin que pour être fructueuse, une telle démarche doit impliquer toutes les parties prenantes (cf. avis du 20 décembre 2002 sur l'expertise des accidents industriels).


Les données environnementales et sanitaires du problème, connues du CPP
Le problème de Métaleurop révélé par la presse est plus économique qu'environnemental. Au plan local, les aspects environnementaux et sanitaires ont cependant été pris en compte depuis plusieurs années. Il faut d'ailleurs souligner que le problème environnemental n'est pas limité à Métaleurop, fonderie de plomb et de zinc située à Noyelles-Godault, mais il pourrait aussi concerner l'usine voisine (2 installations sont voisines l'une de l'autre d'environ 3,5 km). Ces usines de production de métaux non-ferreux sont implantées sur ce secteur depuis plus de 100 ans ; autour d'elles se sont construites des cités ouvrières.

Il existe donc une pollution importante depuis de très nombreuses années. On observe aujourd'hui des concentrations de 200 ppm de plomb dans les sols sur une dizaine de communes couvrant une surface d'environ 75 km2. Une partie de la population locale vit sur des terres agricoles où l'on observe des concentrations de 500 voire 1000 ppm de plomb. Dans le cadre du programme de recherche concerté sur les sols pollués, mis en place en 1993 par le conseil régional Nord Pas de Calais, il a été observé que les populations allégeaient la terre de leurs jardins privés avec des scories des usines. Cette pratique est d'une augmentation des teneurs des sols en plomb jusqu'à plus de 5000 ppm. Un transfert des polluants vers les végétaux (entraînant d'ailleurs des problèmes de croissance sur les cultures) a été observé. Des dépassements de l'ordre de 2 à 10 fois les valeurs recommandées par le Conseil Supérieur d'Hygiène Publique de France vis à vis du plomb mais aussi et surtout du cadmium ont été observés dans les légumes des jardins. Cela conduit, selon les données de l'OMS sur les consommations alimentaires, à un dépassement de la Dose Journalière Admissible pour le plomb et surtout le cadmium. Cela devrait conduire à l'interdiction de la production individuelle. On observe le même phénomène avec les productions agricoles et la production locale de fourrage. Au niveau vétérinaire, les animaux d'élevage font l'objet de mesures particulières : on procède à l'incinération des abats puisque l'on observe dans les foies et les reins des concentrations 2 à 10 fois plus élevées que les normes.

En matière de santé publique, nous avons procédé en 1986 avec l'ORS Nord Pas de Calais au dosage du plomb dans le sang au cordon ombilical chez des femmes des communes riveraines de Métaleurop. Nous avons considéré à l'époque que cela n'était pas un problème de santé publique ; sur 144 échantillons nous n'avons observé qu'un seul dépassement de la valeur guide qui était fixée à l'époque à 250 µg/l de sang. En 1991, le CDC a ramené la valeur guide à 100 µg/l : cela conduisait alors un dépassement de la valeur guide (pour des effets neurocomportementaux chez les enfants) pour 14 % des échantillons. Depuis, une commission « Saturnisme infantile » à l'initiative de la DGS a remis au CSHPF en juillet 1993 un rapport recommandant la mise en place d'un plan d'action de lutte contre le saturnisme. La DASS 62 a ainsi initié une étude portant sur 680 enfants, montrait que 13 % de la population des enfants de 0-6 ans avait des plombémies supérieures à la valeur guide de 100 µg/l. Depuis, plusieurs études ont montré les mêmes taux de dépassement. Chez les enfants de 4 ans, chez lesquels le port main- bouche est important, le taux de dépassement de la valeur guide est de 16 % des sujets. Dans la ville sous les vents dominants par rapport à l'usine, les taux de dépassement peuvent être de l'ordre de 30 %. Dans cette problématique, plus que le niveau d'intoxication qui reste relativement modéré, c'est surtout la masse de population concernée qui est préoccupante.

Cette situation ne touche pas seulement les enfants mais également les adultes : plus de 10 % des femmes en âge de procréer ont des plombémies supérieures à 100 µg/l. Or l'on sait que dans le 3ème trimestre de la grossesse, il y a une décharge de plomb (qui suit le métabolisme du calcium). Le problème ne concerne donc pas que les enfants mais également les femmes enceintes. Encore une fois, le problème repose surtout sur la masse de population concernée.

Cette situation ne touche pas seulement les enfants mais également les adultes : plus de 10 % des femmes en âge de procréer ont des plombémies supérieures à 100 µg/l. Or l'on sait que dans le 3ème trimestre de la grossesse, il y a une décharge de plomb (qui suit le métabolisme du calcium). Le problème ne concerne donc pas que les enfants mais également les femmes enceintes. Encore une fois, le problème repose surtout sur la masse de population concernée.

L'ensemble des études dans la région montre des corrélations entre les plombémies et :
- la distance à l'usine : 24 % des populations vivant dans un rayon d'un km ont des plombémies dépassant les 100 µg/l ;
- le port main-bouche ;
- le fait que l'un des deux parents travaille dans l'une des usines (transport de poussières par les vêtements) ;
- les concentrations de plomb dans les poussières : lors des enquêtes environnementales mises en œuvre par la DDASS chez les enfants présentant une plombémie > 100 µg/l, on a observé que les taux de plomb dans les poussières étaient très importants à l'extérieur des bâtiments mais aussi à l'intérieur des maisons ; la relation avec les végétaux est plus difficile à mettre en évidence car les auto consommations ont diminué parmi les populations locales.

Une étude a été lancée concernant les déterminants expliquant les plombémies élevées, qui comparera des couples d'enfants vivant dans un environnement voisin, avec un enfant présentant une plombémie normale et un enfant présentant une plombémie élevée.

Quant au cadmium, mise à part l'étude sur le plomb et le cadmium menée par M. Haguenoer, Il n'y a pas d'autres éléments sur ce métal : l'étude ne montrait pas de modifications sanguines chez les enfants exposés par rapport à des enfants témoins. Mais il faut souligner que le cadmium est un toxique cumulatif : après une exposition pendant l'enfance, les 1ers effets sur le rein ne se manifestent que chez l'adulte. On ne sait ce qui peut se passer chez des sujets de plus de 50 ans.

Du point de vue de l'impact sur les os, le plomb et le cadmium, qui ont des métabolismes très proches, s'accumulent tous les deux dans le système osseux. De prochains travaux devraient étudier si des effets osseux peuvent survenir. Mais nous rencontrons des problèmes à ce propos car la mesurer in vivo du plomb dans le tissu osseux nécessite des systèmes de mesure spécifiques (fluorescence X) qui ne sont pas disponibles en France actuellement. Leur acquisition est en cours. Le Conseil Scientifique, mis en place en janvier 2003 par le préfet du Pas de Calais, a proposé a proposé de prendre en considération l'ensemble de la population y compris les salariés de l'usine chez qui on rencontre encore actuellement des plombémies accidentelles au-delà de 600 µg/l. Le ministère du travail propose un texte pour diminuer les valeurs réglementaires en milieu professionnel ; aujourd'hui les normes sont identiques pour les femmes et les hommes alors que les risques sont beaucoup plus importants chez les femmes en âge de procréer. Nous devrions recommander une valeur de 400 µg/l pour les hommes, 200 Faute de document reçu à cette date, administrativement, nous ne pourrons pas vous payer le solde restant. pour les femmes voire à tard 100µg/l,.

Du point de vue de la cancérogénèse, il y a des effets positifs montrés dans les études expérimentales mais ceux-ci ont été observés avec de l'acétate de plomb ou d'autres spéciations non utilisées en milieu professionnel. Par ailleurs, les études épidémiologiques ne montrent pas d'augmentation significative des cancers ( voir expertise INSERM plomb).

Une grande partie de ces études locales pluridisciplinaires a été financée par le contrat de plan Etat Région et a permis de comprendre une partie des mécanismes de transfert des polluant jusqu'au population.

D'autres sites en France posent à peu près le même problème., par exemple une campagne de dépistage a été mise en place dans le cadre du PRASE au sud de Lille où il a été observé que 11 écoles maternelles étaient situées autour d'un site pollué. Autre exemple, le site d'Arnas dans le Rhône pour lequel l'INERIS a mené une étude critique de l'étude d'évaluation des risques (voir aussi « Le Monde du 5 février 2003 ») . Cette évaluation était relativement faible en terme de détail. Seules des données génériques sur les scénarios de consommation ont été mises en œuvre. Sur ces scénarios maximalistes, l'évaluation des risques arrive ainsi à un risque plus élevé que ce que l'on peut observer (cette étude arrive à des indices de risque > 5). Les territoires d'influence étant importants, il devrait être nécessaire sur certains sites majeurs de mener des évaluations détaillées des risques sanitaires avec notamment un recueil de données sur les habitudes locales de consommation. La mise en œuvre de telles études coûtera obligatoirement plus cher qu'une évaluation des risques « générique » mais cela est indispensable et doit être pondéré par l'importance du contexte de santé publique et la nécessité de bien cibler les mesures de gestion du risque qui devront être mises en place. L'exemple de l'évaluation des risques des sites nucléaires du nord Cotentin menée par l'IRSN, en liaison avec les différentes parties prenantes, devrait être prise en exemple dans ce cas. Seule une évaluation des risques qui tient compte des réalités locales est susceptible de contribuer à une bonne gestion de telles contaminations et de limiter efficacement leur impact sanitaire..

Gestion de la situation
En ce qui concerne la prise en charge du problème, un dépistage systématique a été organisé dans le Pas de Calais. Il a été initialement financé par la DGS (1993-1995) puis reconduit jusqu'en 2001 par la DASS 62 puis sous l'action du PRASE (Programme Régional d'Action en Santé Environnement) de la région Nord-Pas de Calais. Le préfet du Pas de Calais a installé la semaine dernière un CLIS qui, en accord avec la DGS et le MEDD, s'est doté d'un Conseil Scientifique dont M. Haguenoer a accepté la présidence. Ce Conseil Scientifique est constitué de représentants d'organisations nationales (l'AFSSE avec Mme Védrine, l'ENSP avec Mme Glorennec, le BRGM avec Mme Darmendrail, l'INERIS avec M. Baroudi…), des spécialistes locaux qui connaissent bien la problématique du site, un spécialiste des problèmes socio-économiques, un représentant de l'ORS… Au total, ce Conseil Scientifique est constitué de 11 membres. Mis en place la semaine dernière, ce Conseil Scientifique doit se réunir mensuellement pour rapidement remettre une lettre de cadrage au préfet avec des avis et recommandations concernant :
- les problèmes de santé publique (dépistage…),
- la dépollution du site (notamment par rapport aux conséquences sanitaires), en sachant que cet aspect sera très difficile à résoudre,
- l'avis sur l'évaluation détaillée des risques demandée à Métaleurop. Il faut souligner que les administrations locales ont également demandé d'étudier les risques liés à l'usine voisine d'Union Minière.

Transfert de la pollution à la nappe phréatique
En cas de fermeture de Métaleurop, il pourrait y avoir des problèmes environnementaux supplémentaires liés au fait que l'usine est construite sur des anciens marais. L'arrêt du pompage risque d'entraîner des transferts vers les couches superficielles. Aujourd'hui, la pollution reste une pollution de surface (dans les 50 1ers cm). A priori, il y a assez peu de pollution en profondeur mais il n'existe pas d'études au-delà d'une profondeur de 2,5 m.

L'accumulation du plomb semble être dans des couches peu profondes, cependant les risques de transfert dépendent principalement des pH des sols ; or sur le site de l'usine, les pH très acides sont possible et pourraient accélérer les transferts. Le cadmium pourrait être aussi entraîné vers les couches profondes.

Emetteur de ce communiqué : Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable

RéactionsAucune réaction à cet article

Réagissez ou posez une question

Les réactions aux articles sont réservées aux lecteurs :
- titulaires d'un abonnement (Abonnez-vous)
- inscrits à la newsletter (Inscrivez-vous)
1500 caractères maximum
Je veux retrouver mon mot de passe
Tous les champs sont obligatoires