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CEE : la cinquième période fragilisera-t-elle le soutien aux ménages modestes ?

Plusieurs délégataires, ONG et professionnels du bâtiment s'inquiètent des arbitrages sur la cinquième période des certificats d'économies d'énergie (CEE) qui impactent les aides à la rénovation énergétique des logements des ménages modestes.

Bâtiment  |    |  R. Boughriet

Début février, le ministère de la Transition écologique a mis en consultation les projets de décret et d'arrêté relatifs à la cinquième période des certificats d'économie d'énergie (CEE) qui débutera le 1er janvier 2022. Elle durera quatre ans - jusqu'au 31 décembre 2025 - avec un volume total de 2 400 térawattheures cumulés actualisés (TWhc) d'économies d'énergie fixés pour les fournisseurs d'énergie (les obligés du dispositif). Soit une légère hausse de 12,5 % par rapport à la quatrième période de CEE. La part de l'obligation dédiée à la lutte contre la précarité énergétique sera portée à 600 TWhc et sera centrée sur les ménages les plus précaires. Ces textes ont fait réagir les parties prenantes sur la réduction des offres « coups de pouce » et autres bonifications des CEE. Et les conséquences sur l'accompagnement des ménages modestes dans leurs travaux de rénovation énergétique.

Rabotage des coups de pouce et des bonifications

Pour rappel, les projets de textes envisagent de mettre fin aux coups de pouce pour l'isolation des combles et des planchers bas et pour le chauffage gaz et le chauffage émetteurs électriques dès le 1er juillet 2021. De même, les bonifications seront réduites et ne représenteront que 25 % du volume total de l'obligation. « Avec un arrêt des coups de pouce au 31 juin 2021, les premières victimes seront les ménages et les professionnels qualifiés. Toute rupture brutale dans le dispositif se traduira d'abord sur les ménages modestes qui n'ont pas la capacité de financer les travaux ! », a dénoncé le syndicat de la rénovation énergétique Symbiote qui regroupe une centaine d'entreprises du secteur. Près de 10 000 emplois directs et 40 000 emplois indirects seraient menacés par ces mesures, selon Symbiote.

Dans une lettre ouverte  (1) datée du 24 mars, adressée aux ministres de la Transition écologique et du Logement, la Fédération française du bâtiment (FFB), l'Union sociale pour l'habitat (USH) aux côtés de six autres organisations dont Uniclima, appellent le Gouvernement à maintenir les coups de pouce (chaudières, chauffage électrique et isolation) a minima jusqu'au 31 décembre 2021 comme initialement prévu. Les huit organisations fustigent « un coup d'arrêt brutal aux chantiers en cours de préparation et conduirait à mettre en difficulté des opérations de rénovation déjà engagées par les maîtres d'ouvrage, y compris chez les ménages précaires ». Elles demandent également de « ne pas remettre en cause l'attribution de la bonification grande précarité (x2) pour les opérations engagées » et souhaitent le retrait de la date limite d'achèvement des travaux (2022).

Un arrêté réduit le périmètre des CEE « précarité énergétique »

Autre problème identifié par les sociétés délégataires de CEE : le risque d'un stock abondant de CEE  « précarité » déjà atteint avant le début de la cinquième période. Le ministère de la Transition écologique a rectifié le tir en publiant l'arrêté du 11 mars 2021 qui vise à limiter le stock de CEE précarité produit en 2021. En cause : « le stock des CEE précarité reportables entre la 4ème et la 5ème période risque d'être situé à un niveau permettant d'accomplir aisément l'obligation précarité de cette nouvelle phase de quatre ans », explique le groupe Effy, délégataire de CEE. Ce qui pourrait entraîner une baisse des aides aux ménages en situation de précarité énergétique qui auraient un reste à payer « conséquent ».

“ La moitié voire 80 % de l'obligation précarité pour la cinquième période risque d'être atteinte dès fin 2021, soit avec quatre ans d'avance. ” Bastien Resse, directeur de la stratégie chez Enalia
Le 23 mars, devant la presse, Bastien Resse, directeur de la stratégie chez Enalia, délégataire de CEE, a précisé que la « moitié voire 80 % » de l'obligation précarité pour la cinquième période risque d'être atteinte dès fin 2021, « soit avec quatre ans d'avance ». « Le risque est que si l'on a rempli totalement l'obligation de précarité au début de la 5ème période, on ne va plus réaliser de travaux pendant quatre ans », a prévenu Gaëtan Thoraval, directeur général d'Enalia.

Cette 5ème période prévoyait aussi de recentrer au 1er janvier 2022 l'octroi des CEE précarité aux ménages en situation de grande précarité énergétique. Cette date a été avancée au 1er avril 2021 par l'arrêté du 11 mars. Les ménages en situation de grande précarité énergétique, appelés aussi très modestes, deviennent donc les seuls à bénéficier des CEE précarité. Ils représentent environ deux tiers des bénéficiaires aujourd'hui. Les ménages modestes (environ un tiers des bénéficiaires actuels) sont « les perdants de ce recentrage. Malgré des ressources inchangées, ils deviennent éligibles aux CEE « classiques », avec neuf mois d'avance », pointe aussi Enalia. L'arrêté précise que les ménages modestes restent cependant éligibles aux bonifications des coups de pouce isolation, chauffage et rénovation globale performante d'une maison individuelle.

Augmenter le volume et/ou le prix des CEE précarité

Les dispositions de cet arrêté ne suffisent pas pour les délégataires de CEE pour massifier les travaux de rénovation en faveur des ménages précaires. « Des mesures complémentaires seront sûrement à prévoir pour s'assurer que le stock de précarité soit raisonnable et permette ainsi de maintenir un haut niveau de soutien financier aux publics qui en ont le plus besoin », estime Effy. Le groupe qui fait partie de l'initiative « Rénovons » a appelé le Gouvernement à « doubler » le volume de l'obligation CEE précarité pour financer des travaux de rénovation au bénéfice des ménages très modestes. L'ONG le Cler-Réseau pour la transition énergétique souhaite également une augmentation du volume des CEE précarité « pour protéger les ménages modestes de la répercussion du coût des CEE sur leurs factures d'énergie ». L'association plaide pour un volume total des CEE fixé à 2 932 TWhc au lieu des 2 400 TWhc pour cette 5ème période.

De son côté, Enalia soutient une augmentation du prix du CEE précarité pour conserver un niveau de prime élevé en cinquième période à destination des plus modestes. Son prix est aujourd'hui de sept à huit euros le mégawattheure (MWhc) cumac. Le groupe propose de compenser l'arrêt du coup de pouce isolation au 1er juillet 2021 par un prix du CEE précarité plus élevé. Enalia estime qu'un prix du CEE précarité compris entre 10 et 12 euros/MWhc permettra à tous les ménages en grande précarité « de bénéficier de travaux à très faible reste à charge et donc de réduire leur consommation ».

Le groupe « a estimé ce prix en évaluant les tarifs du marché notamment des travaux d'isolation qui nous semble la première opération à réaliser. L'idée est de maintenir des offres intéressantes de travaux pour ces ménages par la mécanique de prix et non pas par la mécanique du volume de CEE pour des opérations réalisées en isolation qui sont bonifiées par les coups de pouce », explique Gaëtan Thoraval. Cette hausse du prix des CEE précarité aurait un impact « limité » sur la facture des ménages, assure Enalia. Soit une augmentation située entre 5 et 10 euros par an et par ménage.

Gaëtan Thoraval estime aussi nécessaire de maintenir un stock d'environ 300 térawattheures cumac de CEE précarité en fin d'année 2021. Ce qui permettrait, selon Enalia, de réaliser, durant la 5ème période, environ 300 000 travaux de rénovation performante chaque année à destination des ménages grands précaires.

1. Télécharger la lettre envoyée aux ministres par les huit organisations sur les coups de pouce CEE
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-37269-courrier-huit-organisations-coups-pouce-cee-ministres.pdf

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