Huit ans après la catastrophe de Fukushima (1) , le chantier pour aboutir au démantèlement de la centrale reste considérable. Le 11 mars 2011, à 80 km à l'est de l'île de Honshu au Japon, un séisme de magnitude 9 provoquait un tsunami à l'origine de la fusion de trois cœurs sur les six, des réacteurs nucléaires 1 à 3, de la centrale de Fukushima. La production d'hydrogène lors de la dégradation des combustibles des cœurs provoque des explosions dans les bâtiments des réacteurs 1 à 4. Plusieurs piscines d'entreposage des combustibles usés ont également été endommagées. Des dizaines de milliers de personnes sont évacuées.
Dans un rapport publié lundi 11 mars, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (2) (IRSN) fait un point, en février 2019, sur l'avancée des travaux de décontamination.
Concernant les réacteurs, les travaux ont bien avancé pour trois des installations : le 4 est déchargé de son combustible et les 5 et 6 sont en situation d'arrêt sûr.
La situation est plus délicate pour les réacteurs 1 à 3. Un programme de recherche tente de développer des moyens d'investigation pour mieux connaître l'état des installations. Dans ce cadre, un robot a déjà été envoyé dans l'enceinte de confinement du réacteur 2. Le début du retrait des combustibles dégradés devrait être lancé un peu au-delà de 2020.
Un stock de 1.000.000 m3 d'eau traitée
Durant ce laps de temps, de l'eau douce est injectée en permanence dans les cuves des réacteurs 1, 2 et 3 pour y maintenir une température inférieure à 30 °C. Cette eau, du fait de l'inétanchéité des cuves et des enceintes de confinement, s'écoule dans les sous-sols des bâtiments où elle se mélange aux infiltrations des eaux souterraines. Tepco, l'exploitant de la centrale, récupère, traite et réutilise partiellement cette eau pour assurer le refroidissement des réacteurs.
Ce point constitue une des grosses difficultés de l'opérateur : ce dernier doit stocker la partie restante des eaux traitées. Les volumes entreposés dans des réservoirs atteignent désormais environ 1.000.000 m3. Face à cet obstacle, Tepco a opté pour une réduction des infiltrations des eaux souterraines : il a implanté un dispositif de pompage en amont des bâtiments et rejette l'eau pompée après un contrôle. Il a également installé un dispositif de congélation des terrains sur une trentaine de mètres de profondeur autour des unités 1 à 4. En périphérie des bâtiments, les eaux souterraines sont également pompées.
Avec l'optimisation des différents dispositifs, l'exploitant de la centrale vise une réduction des infiltrations à un débit inférieur à 100m3/jour. D'initialement de 400m3/jour, l'infiltration est aujourd'hui passée à moins de 150 m3/jour.
Un mur pour tenter de protéger l'océan
Pour éviter que les eaux souterraines polluées n'atteignent l'océan, Tepco a mis en place un dispositif pour capter les eaux souterraines en aval des réacteurs. Il a installé une barrière constituée de tubes métalliques, longue de près de 900 m et haute d'environ 35 m. Un dispositif de pompage y est également associé. Les eaux pompées sont traitées et contrôlées avant les rejets.
Concernant les piscines d'entreposage d'éléments combustibles, le refroidissement est assuré en circuit fermé. La reprise du combustible dans la piscine du réacteur 3 est prévue au premier semestre 2019 et vers 2023 pour les piscines des réacteurs 1 et 2.
En parallèle de ce chantier, la politique gouvernementale pousse à la reconstruction des villes et invite les habitants à revenir vivre dans les zones où l'ordre d'évacuation a été levé. Un projet de recherche franco-japonais "Shinrai" (3) , en partenariat entre le médialab de Sciences Po, l'IRSN et TokyoTech montre toutefois une perte de confiance de la population. En mars 2018, le taux moyen de retour était de 15 %. "Le Japon doit cesser les retours à Fukushima, les radiations demeurent une préoccupation", avait quant à lui réagi en octobre dernier Baskut Tuncak, rapporteur spécial des Nations unies sur les déchets et les substances dangereuses.