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Actu-Environnement

« Il faut considérer l'arbre comme un être vivant »

La Ville de Montreuil a adopté, le 20 octobre, une charte de l'arbre. Catherine Dehay, adjointe au maire, explique comment l'arbre va désormais être pris en compte en tant qu'être vivant dans les politiques d'aménagement.

Interview  |  Aménagement  |    |  L. Radisson
   
« Il faut considérer l'arbre comme un être vivant »
Catherine Dehay
Adjointe au maire de Montreuil (93)
   

Actu-Environnement : Pourquoi cette charte de l'arbre ?

Catherine Dehay : La raison première, c'est de considérer le végétal comme un être vivant. Aujourd'hui, l'arbre, et plus largement le végétal, passe toujours au second plan. Quand un arbre, là depuis cent ou cent-cinquante ans, dérange, on le coupe. On a envie de changer de paysage, on change d'arbres. On veut faire rentrer une voiture, on coupe l'arbre. Il faut en finir avec ce mépris, et respecter l'arbre en tant que tel. Il nous fait vivre sur la planète, il produit et traite notre air. Mais pas seulement. On ne peut pas être uniquement dans le côté utilitariste du végétal. Il faut donner à l'arbre le respect qu'il mérite. Et si ce n'est pas inscrit dans les règlements, cela ne se mettra jamais en place. Je peux apparaître radicale, mais c'est parce que je pense que l'urgence écologique est là.

AE : La charte est-elle un instrument coercitif ou seulement incitatif ?

CD : Il y a les deux. Par exemple, nous donnons un prix à l'arbre. Pour l'instant, une forêt ou un arbre ne sont valorisés que par le prix du stère et de l'utilisation qui en sera faite. N'interviennent pas, par exemple, le traitement du CO2 ou le bien-être qu'un arbre peut procurer psychologiquement. Il s'agit d'intégrer tous les paramètres qui font la richesse d'un végétal. Avec la charte, si vous souhaitez abattre un arbre sain, il faut d'abord faire une demande motivée. Nous allons aussi réaliser des projections intégrant la dimension paysagère. Cela va interpeller le service urbanisme et le service voirie de la municipalité. Lorsque les services se mettent en synergie, alors cela fait bouger les choses.

AE : Comment donnez-vous concrètement un prix aux arbres ?

CD : Nous avons fixé un barème, qui peut aller jusqu'à 20 000 euros pour un platane de grande taille. C'est dissuasif. Souvent, les promoteurs abattent les arbres pour faciliter un chantier. Si ils estiment que pour construire un immeuble, il faut abattre cinq gros arbres, il leur faudra verser 100 000 euros à la mairie.

AE : Ces sommes sont-elles affectées à une compensation des arbres abattus ?

CD : Il y aura forcément un retour au bénéfice des arbres. Dans tous les cas, s'ajoute à l'indemnité l'obligation pour le promoteur de planter trois nouveaux arbres par arbre abattu, aux endroits et avec les espèces que les services municipaux indiqueront.

AE : N'avez-vous pas peur que cela détourne les projets immobiliers de votre ville ?

CD : Non, car nous espérons que toutes les collectivités prendront des mesures semblables. Les promoteurs devront donc se conformer, à un moment ou à un autre, à ce règlement. C'est aussi comme cela que l'on fera prendre conscience qu'au lieu de couper cinq arbres, on pourrait n'en couper que deux. Quand c'est facile, on ne se casse pas la tête. Là, il ne s'agit pas d'interdire, mais d'intégrer la valeur des arbres pour la communauté. Les habitants de l'immeuble en projet auront aussi besoin demain de verdure, de respirer et d'avoir un paysage apaisant devant les yeux.

AE : Ce dispositif s'applique-t-il aussi aux propriétés privées ?

CD : Pour l'instant, nous sommes restés sur le domaine municipal. Mais nous avons aussi engagé une démarche dans une nouvelle charte d'urbanisme qui encourage le classement des jardins dans lesquels des arbres, par forcément remarquables d'ailleurs, sont plantés. Si tous les particuliers font classer les jardins qui leur plaisent, les contraintes sur les propriétés privées seront également nombreuses. Nous envoyons aussi un signal aux architectes et autres entrepreneurs qu'il existe des contraintes urbanistiques à Montreuil et qu'ils ont intérêt à suivre ce mouvement. Nous savons que l'on est en grande précarité écologique, surtout dans des zones aussi denses que la Seine-Saint-Denis. Nous choquons un peu au départ, mais tout le monde y voit ensuite un intérêt. Si un promoteur veut faire quelque chose sur Montreuil, il sait qu'il faut préserver la terre perméable, qu'il faut réserver de grandes fosses pour les arbres, etc.

AE : La charte peut-elle être déclinée de manière contraignante à travers le PLUi ?

CD : Nous avons mis en place une charte du promoteur, voici quelques années. Elle est passée deux ans plus tard dans le PLUi. À un moment donné, la charte de l'arbre sera, elle aussi, généralisée dans un nouveau PLUi. Pour l'instant, celui-ci ne reprend pas la valeur financière de l'arbre.

AE : Comment la charte de l'arbre va-t-elle se traduire concrètement sur le terrain ?

Nous allons retravailler le pied des arbres, en faisant de plus grandes fosses et en essayant de faire des fosses continues, de manière que les arbres communiquent entre eux. Il faut que la partie souterraine puisse respirer et vivre. Du broyat est utilisé pour assouplir le sol et apporter une grande perméabilité, pour le bien-être et la bonne santé des arbres. Sur la voirie, c'est plus compliqué. Nous allons essayer de travailler dans des rectangles. Dans les petites rues, nous avons l'intention de ne plus mettre des arbres des deux côtés. Il n'y aura plus de taille au rideau. Il y a trente ans, les plantations se faisaient dans des fosses étroites, sans lumière, avec des arbres de chaque côté, dans des rues de 15 mètres de largeur.

AE : Comment conciliez-vous les impératifs de densification avec la préservation de la biodiversité et de l'arbre en ville ?

CD : C'est compliqué. Il y a une bagarre pacifique entre services. Le service propreté préfère des arbres avec des pieds bitumés, car ça se lave plus facilement. Le service des sports veut mettre à profit une plaine pour jouer au foot, mais la plaine, elle vit. Il y a des vers de terre, des fleurs, des insectes, des oiseaux. Dès qu'un espace est vide, nous le prenons. À un moment donné, il y a des seuils de saturation. Face aux demandes de logements et d'espaces verts, faut-il densifier ou alors prévoir des espaces de détente ? Les habitants demandent les deux ! L'espace vert deviendra une priorité et aura un prix inestimable. Cela se voit déjà, quand il faut payer des fortunes un petit jardinet. Pour l'instant, l'espace vert perd toujours, mais la charte mérite d'introduire le débat.

AE : Vous ouvrez également une pépinière locale. En quoi cela consiste-t-il ?

CD : Elle est en cours de création dans le cadre de l'intercommunalité. C'est une expérimentation. Je ne suis pas sûre que tous les arbres seront produits sur le territoire mais, en tout cas, c'est envoyer le message qu'il faut prendre des arbres correspondant au lieu et au climat de demain, résistant à des stress, qu'ils soient liés à la sécheresse ou au froid. Les espèces exotiques, c'est fini. La pépinière s'inscrit dans le cadre du projet de la promenade du Parc des hauteurs, une boucle de 42 km sur les neuf communes d'Est-Ensemble, auxquelles s'ajoutent Fontenay-sous-Bois, Rosny et un bout de Paris. Ce sont des villes d'obédiences politiques différentes, mais l'urgence climatique fait que les communes doivent toutes travailler ensemble.

AE : Comment fonctionne la commission de suivi des arbres que vous avez mise en place ?

CD : Il s'agit de réunir des personnes des services municipaux, l'élue chargée de la végétalisation, des associations et des habitants. Ceux-ci demandent pourquoi nous plantons telle espèce et pas telle autre, pourquoi nous avons abattu là et pas ailleurs, etc. Nous souhaitons une grande transparence.

AE : Quel est l'avenir de cette charte ?

CD : C'est un projet de grande envergure. Cela part de la Charte de l'arbre à Montreuil, pour une validation à Est-Ensemble, en 2022. Puis, ce sera le tour des villes alentours dans le cadre du projet du Parc des hauteurs. Ensuite, le projet pourrait être élargi à la Métropole du Grand-Paris.

Réactions9 réactions à cet article

Tous les êtres reproductibles donc vivants doivent être protégés comme les virus du sida, du covid , de la rage , et aussi les légumes les fruits qui ne faut pas séparer des arbres nos amis car sinon on risquerait de nous traiter de racistes,, C'est beau le wokisme après l'utilisation de IEL , la créativité des "mal dans leur peau" est sans limite. Quand je mange un radis, je l'entends crier de douleur, c'et horrible.

le papet | 10 décembre 2021 à 09h04 Signaler un contenu inapproprié

l'arbre, comme tous les végétaux, n'est pas seul, c'est une symbiose avec tous les micro-organismes des sols ! la base du vivant est dans les sols non bétonnés ...

laurent | 10 décembre 2021 à 09h36 Signaler un contenu inapproprié

Enfin ! dans cette remarquable newsletter qu'est actu-environnement, une nouvelle qui nous change des articles habituels qui sont autant de faire-parts de la mort lente de notre planète...
Bravo à la ville de Montreuil et à son élue déterminée. Ce petit pas local est un grand pas universel.

henri le roy | 10 décembre 2021 à 09h50 Signaler un contenu inapproprié

Comme expert judiciaire je recommandais au Juge que les propriétaires d'une habitation qui risquaient de se dégrader suite aux diverses fissures de plusieurs cm dans les murs, et qui avaient planter des arbres à - de 5 m voir 10 m de la construction de couper ces arbres agressifs et dangereux pour l'homme et son habitation.

le papet | 10 décembre 2021 à 10h46 Signaler un contenu inapproprié

Monsieur Henri le roy
La disparition de l'humanité et de toute vie sur terre n'entrainera pas la mort lente de notre planète qui n'est qu'un gros caillou et qui se moque bien des tout petits humains catastrophiques . Arrêtons de vouloir enterrer la planète qui n'est pas une espèce vivante mais qui disparaitra dans quelques millards d'année absorbée par le soleil.

le papet | 10 décembre 2021 à 11h17 Signaler un contenu inapproprié

Bonsoir !
un grand Bravo M Henri Le ROI, bien entendu il faut protéger et sauver les arbres sur notre Planète. pour lutter contre le réchauffement et ses conséquences sur les dérèglements climatiques l'arbres constitue la solution la plus sérieuse et la plus sereine.
exemple reboiser les superficies désertes utilement notamment par création de puis de carbone c aussi une lutte contre le réchauffement dont souffre l'Humanité. A+

DAOUD | 10 décembre 2021 à 16h44 Signaler un contenu inapproprié

C'est bien beau de vouloir pratiquer le zéro carbone comme le recommandent les écologistes les plus catégoriques pour ne pas fiare mourir la planète, et comment vont respirer les arbres qui ne vivent qu'en absorbant du C02 pour le transformer en oxygène nécessaire à la race humaine. Il faut se poser la question, pourquoi les arbres actuels sont beaucoup moins hauts qu'il y a des millions d'années du temps des dinosaures:réponse car il y avait plus de C02 à l'époque. En conséquence, l'étude des arbres et l'affection que l'on leur porte devrait prendre en compte les millions d'années qui l'ont vu évoluer.

le papet | 10 décembre 2021 à 17h09 Signaler un contenu inapproprié

Pourquoi interviewer cette dame et pas directement un arbre de Montreuil ?
C'est une censure scandaleuse !

Albatros | 17 décembre 2021 à 16h21 Signaler un contenu inapproprié

Pourquoi lire Albatros dont les commentaires volent au dessus des nuages.

le papet | 18 décembre 2021 à 10h54 Signaler un contenu inapproprié

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