"Au regard du rythme de développement de l'éolien offshore et au vu de la base installée de turbines hydroliennes à ce jour, le passage de l'hydrolien à un stade commercial parait anormal dans le court-terme. À un rythme de développement comparable, il faudrait encore cinq à huit ans à la filière hydrolienne pour tester, optimiser et améliorer les turbines avant de lancer de vrais appels d'offres commerciaux". Dans une note de synthèse publiée le 19 novembre, l'Ademe réitère ses doutes sur le développement commercial de la filière hydrolienne à court terme.
Cette technologie est encore en phase de démonstration, note l'étude, qui recense 18 MW installés à travers le monde par les principaux turbiniers (en France, en Ecosse et aux Etats-Unis). De fait, l'Ademe estime que la filière manque de retours d'expérience pour envisager un développement de la technologie à l'échelle commerciale. Les gisements mondiaux limités, les coûts de production élevés et les verrous techniques à lever sont les principaux freins, d'après l'agence. A long terme, cette dernière reste également sceptique : 'Les éléments de visibilité sur la stratégie long terme et la pertinence de soutenir le développement commercial de la filière ne permettent pas de scénariser une base installée supérieure à 29 MW en 2030" en France. Un verdict tranché, à l'heure où certains acteurs attendent des signaux positifs pour se lancer et à quelques jours de la présentation de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), qui doit détailler, filière par filière, les ambitions de la France à 2028.
"Un prix de revient élevé"
Si le potentiel mondial brut est évalué entre 100 et 120 GW, le potentiel réellement exploitable se situe plutôt autour de 20 à 25 GW, estime l'Ademe. "Les gisements hydroliens mondiaux restent peu compétitifs au regard des autres gisements renouvelables électrogènes et ne font pas l'objet - à de rares exceptions près - de systèmes d'incitations commerciaux suffisants. Parmi les grands pays témoins considérés, seul le Canada (Nouvelle-Ecosse) présente une bonne probabilité de développement de l'hydrolien marin à grande échelle".
En France, un développement massif de l'hydrolien est peu probable, analyse l'Ademe, sauf dans un scénario disruptif prévoyant un fort développement des énergies renouvelables. Dans ce cas, 326 MW d'energies hydroliennes pourraient être déployés d'ici 2030, avec une exploitation du Raz Blanchard et de Fromveur. Dans un scénario central, que privilégie l'Ademe, le potentiel exploité se limiterait à 29 MW en 2030, avec le développement d'un ou deux projets en métropole et de quelques projets soutenus par les pouvoirs publics en zones non interconnectées (Mayotte, Iles du Ponant…).
Les coûts complets de l'hydrolien devraient rester relativement élevés, estime l'Ademe. Son scénario optimiste mise sur un coût de 120 €/MWh en 2030, tandis que le scénario central table plutôt sur 164 €/MWh. "Un prix de revient élevé pour une énergie certes prédictive mais non pilotable", souligne l'Ademe. Ce qui rend cette énergie pertinente seulement dans les zones non interconnectées, où les coûts de production de l'électricité sont élevés.