La Haute juridiction administrative a rendu un arrêt le 13 février dernier portant sur la mise en demeure et la suspension d'une installation de compostage. Deux enseignements peuvent en être tirés : l'un relatif aux possibilités données au préfet de mettre en demeure l'exploitant, l'autre sur la motivation d'une mesure de suspension.
Une capacité de production six fois plus élevée que celle déclarée
La société en cause exploitait des installations de compostage de déchets et de boues de stations d'épuration. Elle avait reçu deux récépissés de déclaration en 1999 et 2000 au titre de différentes rubriques de la nomenclature des installations classées (ICPE).
Une visite de contrôle effectuée fin 2000 avait relevé une capacité de production six fois plus élevée que celle déclarée, ainsi qu'une absence de conformité des produits obtenus à la réglementation applicable. Le préfet avait, par un premier arrêté, mis en demeure cette société de régulariser sa situation et suspendu l'exploitation. Deux mois plus tard, il avait pris deux autres arrêtés : l'un lui enjoignant de procéder à l'évaluation de la pollution des sols et "d'y apporter remède", l'autre ordonnant la suppression de l'installation et la remise en état des lieux.
L'exploitant avait demandé l'annulation des arrêtés préfectoraux devant la juridiction administrative. Il contestait notamment la possibilité pour le préfet de prendre un arrêté de mise en demeure et de suspension sur le fondement de l'article L. 514-2 du code de l'environnement qui ne vise que les installations classées exploitées sans avoir fait l'objet de la déclaration ou de l'autorisation requise, alors que son installation avait été dûment déclarée.
La mise en demeure préfectorale était légale
Selon le Conseil d'Etat, le préfet pouvait légalement prendre les mesures prévues par l'article L. 514-2 du code de l'environnement à l'encontre de la société requérante, "dès lors que celle-ci exerçait d'autres activités que celles au titre desquelles ces récépissés lui avaient été délivrés".
La Haute juridiction donne par là aux préfets la possibilité de mettre en demeure et de suspendre les installations sur ce fondement bien qu'elles aient fait l'objet d'une procédure de déclaration. Sans toutefois clairement préciser si la situation était la même selon que les autres activités exercées nécessitaient une autorisation ou une déclaration au titre d'une autre rubrique que celles pour lesquelles la société avait reçu des récépissés.
La décision de suspension doit être précédée d'une procédure contradictoire
En l'absence de dispositions législatives ayant instauré une procédure contradictoire particulière, les règles générales de procédure applicables aux décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs, s'appliquent à une mesure de suspension prise sur le fondement de l'article L. 514-2 du code de l'environnement, indique le Conseil d'Etat. Et le caractère conservatoire de cette mesure ne peut y faire obstacle.
La décision préfectorale de suspension de l'installation aurait donc dû être précédée d'une procédure contradictoire, conclut la Haute juridiction.