
Candidate Lutte ouvrière à l’élection présidentielle
Actu-Environnement : Quel mix énergétique souhaitez-vous développer ? Quelle place accordez-vous aux énergies renouvelables ?
Nathalie Arthaud : Concernant le nucléaire, c'est le capitalisme qui le rend dangereux car la course au profit pousse les producteurs à économiser sur la sécurité. De façon moins spectaculaire que l'accident d'une centrale nucléaire, le charbon tue régulièrement par accidents miniers ou maladies pulmonaires. L'énergie au service des hommes impose de maîtriser la technologie, mais aussi sa mise en œuvre. C'est impossible dans une économie où les décisions sont prises, totalement ou partiellement, en fonction du profit.
Les grands groupes capitalistes qui détiennent les manettes de l'économie décident de l'organisation de la production, de l'énergie, des transports. Tant qu'on accepte leur mainmise sur l'économie, les discours sur la lutte contre le réchauffement climatique, sur la sauvegarde de la mer ou les énergies renouvelables resteront lettre morte.
AE : Comment comptez-vous encourager la rénovation énergétique des logements, en particulier des passoires thermiques et du bâti tertiaire ?
NA : Il faudrait améliorer l'isolation thermique d'un nombre énorme de logements. Mais qui peut effectuer des travaux quand on est déjà au fond du trou au point de ne pas pouvoir être capable de payer son chauffage ? De plus, l'aide gouvernementale ne concerne forcément que les propriétaires, ce qui exclut une grande partie des ménages modestes qui sont locataires.
AE : Comment pensez-vous réduire les émissions de gaz à effet de serre dans les secteurs des transports ? Comment encouragez-vous les mobilités bas carbone pour les personnes et les marchandises ?
NA : Je défends la priorité du transport ferroviaire des passagers et des marchandises. Cela inclut, bien sûr, la restauration des réseaux secondaires (réclamée par les collectifs d'usagers) et la réouverture des gares fermées. Tout ce qui a été bradé par les autorités obnubilées par des économies à courte vue. Car, en dépit des alertes sur les risques écologiques, le transport terrestre de marchandises est essentiellement réalisé par la route, du fait de la réduction du transport ferroviaire.
AE : Quel modèle agricole souhaitez-vous développer ? Quelle place pour la biodiversité dans ce modèle ? Et comment organisez-vous le partage de la ressource en eau entre les différents usagers et le milieu naturel (recharge de nappe, zones humides, etc.) ?
NA : Le monde agricole, c'est d'un côté les petits paysans et, de l'autre, les gros, voire les très gros agriculteurs. Dix-huit pour cent des agriculteurs vivent sous le seuil de pauvreté (13 000 euros), 100 000 exploitations ont disparu en dix ans. Il faut prendre sur les profits des Lactalis, des gros céréaliers ou de l'industrie agroalimentaire pour aider les petits exploitants. Ils doivent avoir de quoi vivre de leurs terres, de leurs exploitations, pas être étranglés.
AE : Comment comptez-vous lutter contre l'artificialisation des sols ? Et comment pensez-vous accompagner les collectivités locales sur cet enjeu d'aménagement du territoire ?
NA : Outre que les fonds dédiés sont dérisoires en proportion des besoins, ils fourniront des marchés supplémentaires à des entreprises du BTP, que cela mette ou non un coup d'arrêt à l'artificialisation des sols. Quant aux fonds nécessaires, je suis pour un retour à la charge de l'État des tâches transférées aux collectivités locales lors de la décentralisation.
AE : Souhaitez-vous encadrer davantage l'industrie en ce qui concerne la prévention et la gestion des risques technologiques ? Quelle politique proposez-vous pour mieux prévenir les risques sanitaires ?
NA : Le chlordécone, un pesticide puissant et très nocif, interdit aux USA et en métropole, a été autorisé aux Antilles françaises pendant plusieurs années encore, sous la pression des riches planteurs békés ! Tant que les gros exploitants de l'agriculture ou de l'industrie dicteront leurs lois à des dirigeants politiques dociles, les empoisonnements de toutes sortes continueront.
AE : Comptez-vous modifier la fiscalité pour encourager les comportements écologiquement vertueux et/ou taxer les comportements polluants ?
NA : Je suis pour l'évolution, si c'est une amélioration, mais ce n'est pas aux travailleurs de subir les conséquences financières de ces mesures.
AE : Quelle place accorderez-vous à la parole des citoyens dans l'élaboration de la politique environnementale ?
NA : Les mesures devraient être soumises au contrôle de la population dans leur élaboration et leur application. Cela implique la levée du secret commercial, industriel et financier. Grâce à un tel contrôle dans le passé, combien de morts auraient pu être empêchés en dénonçant les industriels qui, sciemment, continuaient à utiliser l'amiante ?
AE : Quelle place et périmètre d'action confierez-vous au ministère chargé des enjeux environnementaux ?
NA : Pour résoudre ces questions, il faudrait prendre des mesures concertées et cohérentes à l'échelle de toute la planète. Il faudrait évaluer les avantages et les inconvénients de chaque technologie, non pas à très court terme et pour défendre les intérêts de quelques compagnies privées, mais à long terme, en se préoccupant de l'ensemble de l'humanité. Cela exige un recensement des besoins et une planification de la production. Cela suppose de mettre un terme à la concurrence sauvage et aux folles lois du marché qui engendrent la spéculation.