Depuis fin novembre 2018, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a reçu 22 signalements d'irrégularités relatifs à la sûreté nucléaire, à la radioprotection des personnes et à la protection de l'environnement. "Certains signalements sont caractéristiques d'une fraude potentielle", explique l'ASN, précisant que "ces cas, en faible nombre, font l'objet d'investigations plus approfondies de [sa] part". Tel est le principal point qui ressort du premier bilan du plan d'action de l'ASN contre le risque de fraude publié ce lundi 13 mai.
L'Autorité précise avoir reçu sept de ces 22 signalements via le portail dédié ouvert le 21 novembre dernier. Ce portail "offre à un lanceur d'alerte un accès privilégié à l'ASN lui garantissant la confidentialité de son identité". "Les autres moyens principaux employés sont les contacts directs avec les services concernés de l'ASN (divisions régionales ou directions), pour 8 signalements, et le courrier, pour 5 signalements", détaille l'ASN. Elle précise en outre que "les rares déclarations dont l'auteur reste anonyme ont été exclusivement envoyées par courrier". Si les faits signalés relèvent de la fraude, l'Autorité les signale au procureur, en application de l'article 40 du code de procédure pénale. "Quatre signalements ont déjà été effectués", annonce-t-elle, ajoutant que "la nature exacte de ces signalements est couverte par le secret de l'instruction".
Tous les domaines nucléaires concernés
L'Autorité explique aussi que les signalements concernent les installations nucléaires de base, les activités médicales ou les organismes agréés. "Les faits signalés peuvent être d'ordre technique – comme l'emploi de matériaux inadaptés ou l'absence de réalisation de certains contrôles – ou organisationnel, tel que la réalisation d'activités (soudage, examens non destructifs, etc.) par des personnes n'ayant pas les compétences requises ou la réalisation de contrôles par des organismes internes", explique-t-elle. L'ASN évoque en particulier la "modification de résultats d'essais, [la] falsification de l'identité de la personne ayant réalisé une opération (contrôle technique, soudage, examen non-destructif, etc.), la non-réalisation de certaines opérations (remplacement de pièces par exemple ou vérifications techniques spécifiques)".
Ce nouveau dispositif fait partie du plan d'action de l'ASN contre le risque de fraude. Outre le portail dédié aux lanceurs d'alerte, ce plan comporte quatre autres volets : le renforcement des dispositions mises en œuvre par les fabricants et les exploitants, le recours à des organismes de contrôle externes, pour porter un appui à la surveillance des activités de fabrication, l'évolution des pratiques de contrôle de l'ASN, notamment en inspection, ainsi que la demande de déclaration systématique à l'ASN des cas de fraudes détectés par l'exploitant.
Focus sur les fraudes les plus courantes
L'Autorité présente aussi les prochaines étapes du déploiement de son plan d'action. Elle explique aussi avoir "réalisé des inspections pilotes qui ont permis de valider une méthode d'analyse adaptée aux scénarios de fraude les plus courants". Celle-ci "sera prochainement mise en application". A l'avenir, elle compte aussi vérifier la façon dont les exploitants nucléaires intègrent dans leur politique d'achat la prévention du risque de fraude. Elle s'est aussi rapprochée de l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) et de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) pour échanger et s'inspirer de leurs pratiques d'inspection en matière de détection de la falsification de documents. Enfin, elle a engagé une réflexion sur le recours plus large à des organismes de contrôle externes et intègrera un cadre de la gendarmerie nationale pour bénéficier de son expertise.