La pression réglementaire française et européenne s'accentue pour renforcer la valeur verte des biens immobiliers. Tout actif qui ne répondrait pas aux standards environnementaux se verrait menacer d'une décote brune, selon une nouvelle étude de l'OID.
Les exigences de performance énergétique et environnementale dans le secteur du bâtiment sont de plus en plus élevées, face à la pression réglementaire qui s'intensifie en France et en Europe sur ce plan. Cette valeur « verte » des biens immobiliers est de plus en plus considérée lors des transactions foncières, souligne l'Observatoire de l'immobilier durable (OID) dans sa nouvelle étude publiée le 17 février.
La valeur verte, un critère de prime ou de décote du bien
La définition théorique de la valeur verte d'un bien immobilier prend en compte la question des caractéristiques environnementales considérées comme « performantes dont l'élément important est le facteur énergétique », explique Sabine Brunel, directrice adjointe de l'OID. Ces biens bénéficieraient alors d'une prime que ce soit sur les loyers, le prix de vente réalisé, l'attractivité du bien, l'augmentation de la liquidité de l'actif, etc. À l'inverse, les actifs qui sont en deçà des normes environnementales sont menacés d'une décote dite « brune » et verraient leur valeur diminuer et trouveraient moins de locataires. Et selon l'OID, cette valeur verte devrait à terme intégrer également la qualité d'usage du bâtiment et sa résilience face aux aléas climatiques. En tous les cas, cette notion va clairement gagner en influence au cours des dix prochaines années au regard des réglementations en vigueur ou à venir.
DPE, taxonomie, décret Tertiaire…l'immobilier en première ligne
On observe déjà des impacts de décote des logements F et G ainsi que des refus de prêts motivés sur ces classes de DPE qui sont considérées comme non performantes.
La valeur verte d'un bien est intimement liée au
diagnostic de performance énergétique (DPE) fourni avant la vente ou la location d'un bien. Depuis le 1
er juillet 2021, le nouveau DPE évalue le niveau d'énergie consommée par un logement et les émissions carbone. Il est associé aux mesures d'
éradication des logements passoires thermiques les plus énergivores, prévues par la loi Climat et Résilience d'août 2021. Progressivement, à partir de 2025 et jusqu'en 2034, les logements classés G, F et E du DPE ne seront plus considérés comme « décents » et ne pourront donc plus être loués. «
Ces étiquettes devront être améliorées grâce à la rénovation énergétique. Il y a un enjeu de transition du marché et on observe déjà des impacts de décote des logements F et G ainsi que des refus de prêts motivés sur ces classes de DPE qui sont considérées comme non performantes », constate Sabine Brunel.
Le règlement sur la taxonomie européenne sur les activités vertes, publié en juin 2020, s'appuie aussi sur le DPE pour déterminer ce que serait un parc de bâtiments durables, « et in fine orienter les flux financiers vers ces investissements qualifiés de durables », ajoute-t-elle. La taxonomie devrait inciter les investisseurs à se positionner sur des logements étiquetés « A » du DPE. « Ces actifs sont considérés comme extrêmement performants par les acteurs et leur prix de vente sera impacté », souligne Mme Brunel. La meilleure prise en compte des enjeux extra-financiers (ESG), portée par la taxonomie, rend en effet les investisseurs beaucoup plus exigeants sur les paramètres de biens qu'ils achètent.
Et c'est sans compter le décret Tertiaire de juillet 2019 (ou dispositif éco-énergie tertiaire) qui va également influencer la valeur des actifs d'ici à 2030, « en responsabilisant les occupants » vis-à-vis de la performance énergétique des locaux qu'ils occupent. « On peut imaginer que la liquidité locative et le loyer deviennent les pierres angulaires d'influence (de ce texte), et donc que ce soit par le biais du locatif que l'impact de la valeur du bien se fasse sentir », indique Mme Brunel.
La RE 2020 établit un nouveau standard de marché
Entrée en vigueur le 1er janvier 2022 pour les logements neufs, la nouvelle réglementation environnementale (RE 2020) aura aussi des conséquences sur la valeur des biens. La RE 2020 promeut la construction de bâtiments qui sont plus performants, en introduisant des plafonds d'émissions carbone et des exigences d'adaptation aux vagues de chaleur, via un critère de confort d'été. Cette nouvelle norme sur le neuf va permettre d'établir « un standard de marché qui permettra de définir des bâtiments dits « prime », fixant de nouvelles attentes de performance, y compris pour les bâtiments existants devant être rénovés », souligne l'OID.
Enfin, la loi Énergie-Climat de novembre 2019 a élargi le périmètre de reporting extra-financier aux fonds immobiliers sur les questions environnementales dont les risques climatiques. « Ces rapports vont donc être scrutés par les analystes financiers au cours des prochaines années, ce qui aura un impact sur la liquidité financière des actifs sous-jacents ».
Tous ces textes « ne vont pas avoir une influence égale sur la façon de positionner les valeurs des biens sur le marché, mais dans tous les cas, ils vont dans le même sens, en termes de transparence et ils permettent de donner des définitions harmonisées de ce qui est durable », déclare Sabine Brunel. Et « plus on aura anticipé la résilience du patrimoine, et plus les bâtiments se retrouveront doter d'un avantage compétitif ».
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Note Télécharger l'étude de l'OID Plus d'infosArticle publié le 24 février 2022