Parviendra-t-on à créer un fonds d'indemnisation pour les victimes des pesticides qui échappent aux dispositifs de réparation existants ? Tel est l'objet de la proposition de loi déposée en… 2016 par la sénatrice Nicole Bonnefoy et qui a été discutée par la commission des affaires sociales de l'Assemblée, mercredi 23 janvier, après avoir connu un parcours chahuté.
"Il est aujourd'hui nécessaire que soit enfin voté ce fonds d'indemnisation, qui est une mesure de justice sociale. Pourtant, une interrogation demeure : les députés prendront-ils leurs responsabilités ou cèderont-ils au lobbying de l'agrochimie et de la majorité gouvernementale ?", interroge l'association Phyto-victimes, appuyée par le rapporteur du texte, le député Dominique Potier, et par l'ancienne ministre de l'Ecologie Delphine Batho.
Cette proposition de loi fait suite au rapport de Mme Bonnefoy et de sa collègue Sophie Primas qui avaient constaté, en 2012, la mauvaise indemnisation des victimes des pesticides. Elle prévoyait, à l'origine, la réparation intégrale des préjudices subis par les victimes, que les maladies soient ou non d'origine professionnelle, à partir d'un fond financé par les fabricants de produits phytosanitaires.
Malgré l'adoption de cette proposition par le Sénat en février 2018, un rapport de hauts fonctionnaires soutenant la mise en place d'un tel fonds et un nouveau vote de la chambre haute sur une version moins ambitieuse dans le cadre de la loi Egalim, le gouvernement et l'Assemblée ont pour l'instant fait capoter cette création. Cette loi ne prévoit au final que la remise d'un rapport par l'exécutif en vue de la création d'un tel fonds avant 2020.
La commission des affaires sociales a adopté le texte (1) à la quasi-unanimité après l'avoir amendé. "Nous avons fait un petit pas : le principe de la création du fonds", réagit Dominique Potier, qui liste les nombreuses insuffisances du texte : un périmètre qui ne couvre pas tous les professionnels, pas de réparation intégrale du préjudice subi, absence de possibilité de recours, délais de prescription et modalités de remboursement laissés à la liberté du gouvernement Un gouvernement dont la position "par trop conservatrice et par trop timide" est le seul facteur limitant, estime le député.
La proposition de loi sera examinée dans l'Hémicycle le 31 janvier.