L'appel à projets lancé par l'Ademe en septembre 2018 dans la foulée de l'annonce du plan vélo par Édouard Philippe a remporté "un énorme succès", se réjouit le Club des villes et territoires cyclables. L'association, qui regroupe 174 collectivités et 42 membres associés, tenait ce jeudi 24 janvier sa conférence annuelle dédiée à l'an 1 de cet ambitieux plan qui vise un triplement de la part modale de la petite reine d'ici 2024.
Cent-soixante-cinq collectivités ont déposé un dossier de candidature à la première échéance de l'appel à projets de l'établissement public, close le 10 décembre. Ces projets représentent une demande d'aide de plus de 17 millions d'euros (M€) pour un coût total de 35 M€. "Cela illustre qu'il y a bien une volonté des territoires d'accélérer le déploiement du vélo dans notre pays", se félicite le Club. Cet appel à projets, auquel l'Ademe consacre... 2 M€, vise à accompagner les territoires de moins de 250.000 habitants dans la définition et la mise en œuvre de la politique cyclable.
Une deuxième chance s'offre aux collectivités puisqu'un second relevé des candidatures est prévu par l'Ademe au 28 février. Mais, surtout, cet appel à projets a été lancé en vue d'anticiper l'appel à projets "Fonds mobilités actives", que l'Etat a finalement lancé le 13 décembre dernier. Ce dernier, doté de 350 M€ sur sept ans, vise à soutenir "le déploiement d'itinéraires cyclables structurants dans tous les territoires" en résorbant les discontinuités comme les rocades urbaines ou les voies ferrées. Il s'adresse à tous les maîtres d'ouvrage publics (1) , quelle que soit leur taille. Ils peuvent postuler jusqu'au 15 avril pour la première phase et jusqu'au 30 juin pour la seconde.
L'enveloppe de 50 M€ prévue pour 2019 doit permettre "la réalisation d'un volume de projets de 100 à 200 M€ " par l'effet levier du cofinancement, avait assuré la ministre des Transports Élisabeth Borne. Le taux d'aide est de 20 % maximum, pouvant être porté à 40 % pour un équipement très structurant d'une petite ou moyenne collectivité, dans une limite de 5 M€ par projet.
Première douche froide
Le Club des villes et territoires cyclables reste toutefois vigilant sur les financements et le calendrier promis par l'État. "Première douche froide : des projets ont été retoqués car le financement portait sur une programmation déjà votée", pointe Pierre Serne, son président. Jean-Baptiste Gernet, adjoint au maire de Strasbourg en charge des déplacements, en témoigne : sa collectivité ne pourra bénéficier du fonds pour cette raison. "Le risque existe que le fonds se révèle trop compliqué pour les collectivités locales", prévient aussi l'élu. "Ce qui pourrait aboutir à une sous-consommation qui enverrait un mauvais signal", abonde Pierre Serne.
"Pour la première fois, l'État s'engage pour financer les infrastructures cyclables. C'est un bon début", admet Michel Gillot, élu de Saint-Cyr-Sur-Loire. "Mais il ne faut pas oublier la baisse de la dotation globale de fonctionnement qui a précédé", ajoute le conseiller métropolitain, qui chiffre à 140 M€ les besoins en investissement de la métropole tourangelle sur les infrastructures de transport.
Les collectivités peuvent également se tourner vers la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL). Une dotation "peu connue et mal consommée", selon Jean-Baptiste Gernet, et dont va en revanche bénéficier l'agglomération alsacienne. Cette dotation permet, avec un budget global de 85 M€ sur 2019, de bénéficier d'un soutien de l'Etat à hauteur de 33 % du montant des projets en faveur du vélo et des mobilités.
Baisse des recettes de l'État
Reste que les collectivités et les élus font part de leurs inquiétudes sur le financement des infrastructures de transport après la crise des gilets jaunes qui a conduit à une baisse des recettes de l'État, avec notamment le gel de la taxe carbone et la détérioration des radars. "Il n'est pas si simple de trouver des solutions", admet le député LREM Matthieu Orphelin, qui rappelle toutefois que le Conseil d'orientation des infrastructures avait formulé des propositions de financement en février 2018.
L'élu dit avoir peu de doutes sur l'engagement du gouvernement à financer le plan vélo. "Ce n'est pas sur les mobilités durables qu'il faut faire des économies budgétaires. Ce serait un non-sens historique et écologique", estime le parlementaire, rapporteur des dispositions relatives aux mobilités propres du projet de loi d'orientation des mobilités (LOM). Un texte dont la discussion a été de nouveau reportée, en raison de la tenue du Grand débat national.