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REP : les déchèteries publiques négocient leur capacité de collecte

Les déchèteries publiques sont des points de collecte essentiels pour certains éco-organismes. La multiplication des filières REP et le renforcement de leurs objectifs permet aux collectivités de décrocher de meilleurs soutiens.

Déchets  |    |  P. Collet
REP : les déchèteries publiques négocient leur capacité de collecte
Actu-Environnement le Mensuel N°433
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°433
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Les quelque 4 500 déchèteries publiques constituent un réseau de collecte des déchets essentiel, en particulier pour certaines filières de responsabilité élargie du producteur (REP).Cette situation donne la possibilité aux fédérations représentatives des collectivités de négocier une couverture de leurs coûts par les éco-organismes. Ces soutiens financiers peuvent encore être jugés insuffisants. Pour autant, récemment, certains signes montrent que les collectivités arrivent à mieux faire valoir leurs positions. La multiplication des filières REP et le risque de sanctions financières qui plane au-dessus des éco-organismes qui échouent à atteindre leurs objectifs réglementaires changent la donne.

Soutiens historiques

De longue date, certains éco-organismes rémunèrent les déchèteries au forfait et en fonction des tonnages collectés. Le forfait correspond à l'espace mis à disposition des éco-organismes pour les bennes de collecte. Le soutien à la tonne correspond à la « performance » basée sur les volumes récupérés. Ce financement est considéré par les collectivités comme « la clé d'entrée » en déchèteries. Réciproquement, la création de nouvelles filières est défendue par les collectivités, car elles y voient un moyen d'obtenir de nouveaux soutiens. Ce dernier point est notamment porté par l'association de collectivités Amorce qui plaide de longue date pour une extension du principe de la REP à tous les déchets pris en charge par le service public.

Cette rémunération du service a été instaurée par les filières REP couvrant les déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE), les déchets d'éléments d'ameublement (DEA), ou encore les déchets ménagers dangereux. À titre d'exemple, Ecosystem et Ecologic, les éco-organismes de la REP DEEE, ont versé 40,2 millions d'euros (M€) aux collectivités en 2022 (en hausse de 19 % par rapport à 2021), pour 15 M€ en 2006 lors du lancement de la filière. Le forfait atteint désormais 2 000 euros par benne et par an (contre 1 840 euros précédemment) et la part variable pourra atteindre jusqu'à 130 euros par tonne (€/t) (contre 87 €/t). Autre exemple : pour la REP DEA, Écomaison propose un forfait de 2 500 euros et un soutien à la tonne de l'ordre de 20 €.

Vers la déchèterie du futur

Désormais, les collectivités n'hésitent pas à faire étalage des contraintes posées par la multiplication des filières REP. Fin janvier, à l'occasion des dernières Rencontres Amorce avec les éco-organismes, il a beaucoup été question de la déchèterie du futur et de la couverture des coûts par les filières REP. Le message subliminal était assez clair : les collectivités ne pourront accueillir que les éco-organismes qui acceptent de couvrir leurs charges.

Et de détailler les contraintes d'une déchèterie moderne à partir de l'exemple d'installations vendéennes : multiplication des tâches des agents d'accueil ; création de trois zones de réception distinctes ; quelque 70 flux à gérer (dont 59 nécessitant un tri et 34 comprenant des déchets dangereux, dont un pour l'amiante) ; et capacité d'adaptation aux futures évolutions règlementaires. Le tout, étalé sur 15 000 m2 pour un investissement compris entre 2 et 4 millions d'euros (soit 6,50 à 13 euros par habitant et par an (€/hab/an), sur la base d'un amortissement sur quinze ans et 20 000 habitants desservis). Quant au coût de fonctionnement, il s'élève à 6,50 €/hab/an supplémentaires pour trois agents, un engin et divers frais.

Exprimé en termes de coûts rapportés au service, Amorce et le Cercle national du recyclage (CNR) s'accordent à dire qu'un forfait pour une benne devrait être de l'ordre de 3 000 euros par an, auquel s'ajoute un soutien aux tonnages. Progressivement, comme le montre l'évolution des soutiens des filières DEA et DEEE, les montants proposés se sont rapprochés de ceux réclamés par ces deux associations de collectivités.

Textiles et piles entrent dans la danse

Comment expliquer cette évolution ? Il est assez tentant de faire un lien direct entre la hausse de la couverture des coûts et les difficultés d'une filière REP à atteindre ses objectifs. Et cela d'autant plus si les déchèteries publiques sont au coeur de la collecte. Dans le cas des DEEE, 54 % des volumes passent par le service public, alors que le taux de collecte de la filière n'était que de 55,5 % en 2021, soit dix points sous l'objectif européen fixé à 65 %. Dans le même esprit, Refashion, l'éco-organisme de la REP textiles, doit faire progresser son taux de collecte de 34 à 60 % en sept ans. Alors qu'il ne versait aucune aide aux déchèteries, il leur propose désormais un soutien de 250 euros par conteneur déjà installé et 500 euros pour un nouveau.

La filière REP des piles et accumulateurs fournit un autre exemple. Jusqu'à maintenant, Corepile et Screlec, les deux éco-organismes agréés, parvenaient à atteindre leur objectif de collecte (fixé à 45 %). Corepile proposait bien des bacs de collecte en déchèteries, pour compléter le maillage essentiellement composé de points d'apport volontaire en grande distribution. En 2021, 12 % des points de collecte se trouvaient dans des déchèteries et récoltaient 37 % des volumes.

Le futur règlement européen sur les batteries devrait porter l'objectif de collecte de 45 % aujourd'hui, à 63 % en 2027 et à 73 % en 2030. Corepile et Screlec se font dorénavant concurrence pour contractualiser avec les collectivités. Screlec, qui ne détenait que 10 % de ce marché, a proposé un soutien aux collectivités : un forfait à 60 euros par an et un bonus annuel de 60 euros supplémentaires sous conditions. Dans la foulée, Corepile s'est aligné, avec une offre à peu près équivalente. Ici, la concurrence est favorisée par l'absence d'organisme coordonnateur (les filières REP avec organisme coordonnateur proposent un soutien commun et disposent d'un équilibrage des obligations des éco-organismes sur la base de leurs adhérents).

La REP PMCB, une REP de poids

De l'avis de plusieurs éco-organismes interrogés, l'atteinte des objectifs n'est pas le seul moteur. Avec la multiplication des REP, une concurrence s'instaure entre les filières. Ainsi, Écomaison et Ecologic, les deux éco-organismes retenus pour les nouvelles filières jeux et jouets, articles de bricolage et de jardin et articles de sport et de loisir, vont proposer un soutien pour ces nouvelles collectes.

La question est particulièrement épineuse concernant la mise en place de la REP couvrant produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment (PMCB). Actuellement, estime l'Agence de la transition écologique (Ademe), 39 % des déchets collectés en déchèteries proviennent du bâtiment. Avec le lancement de la REP s'ouvre la perspective d'une couverture des coûts des collectivités. Les éco-organismes proposent pour l'instant un soutien de 250 à 2 000 euros par déchèterie et par an, assorti de 10 à 52 euros par tonne collectée.

Pour l'instant, ces soutiens sont jugés dérisoires par rapport aux 3 000 euros par an réclamés par Amorce et le CNR pour chaque benne (il faudrait l'équivalent de trois à quatre bennes pour assurer le tri des déchets du bâtiment) et au soutien à la tonne de l'ordre de 32 euros. De leur côté, les éco-organismes affirment vouloir assurer leur collecte via un réseau d'acteurs privés et de distributeurs. Et l'État semble prendre cette promesse au sérieux, puisqu'il s'apprête à inscrire dans le cahier des charges de la filière un nombre minimal de points de collecte privés. Une nouveauté qui marquerait un tournant dans les relations entre éco-organismes et collectivités.

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