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“Les opérateurs énergétiques territoriaux sont le bras armé de la transition énergétique”

Les opérateurs énergétiques territoriaux portent des projets d'énergies renouvelables ou d'efficacité énergétique sur un territoire, dans la perspective d'ancrer localement les retombées économiques. Le Cler a étudié ces modèles et les enjeux qui y sont liés.

Interview  |  Energie  |    |  S. Fabrégat
Environnement & Technique N°372
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°372
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“Les opérateurs énergétiques territoriaux sont le bras armé de la transition énergétique”
Yannick Régnier
Responsable de projet au Cler, réseau de la transition énergétique
   

Actu Environnement : Vous venez de réaliser une étude sur les opérateurs énergétiques territoriaux. Qui sont ces acteurs ?

Yannick Régnier : Le Cler a initié les territoires à énergie positive (Tepos) avant que le concept ne soit repris par Ségolène Royal. Notre idée était de soutenir des projets de transition énergétique en faveur du développement territorial. En parallèle, nous avons rencontré des chercheurs géographes de l'université Grenoble-Alpes qui travaillaient sur ce concept d'opérateurs énergétiques territoriaux (1) . Ca nous a immédiatement parlé. Nous avons voulu identifier des acteurs nés par le territoire, pour le territoire et qui tissent des liens vers l'extérieur. L'opérateur est une structure qui a vocation à mener différents projets d'énergies renouvelables et/ou d'efficacité énergétique, dans la logique d'ancrer localement les retombées économiques. L'idée est de s'appuyer sur des modèles économiques viables et que le retour sur investissement d'un premier projet soit réinjecté dans de nouveaux projets locaux.

Dans ces structures, il y a une volonté de faire bénéficier la collectivité des retombées économiques, les acteurs n'ont pas tendance à sur-rémunérer les actionnaires. Avec eux, les projets d'énergie ou d'efficacité énergétique ne sont pas parachutés sur le territoire par de grandes entreprises mais décidés et portés par des acteurs locaux. Il y a un réel intérêt économique dans ces projets pour une collectivité. Si un acteur privé fait un parc de 15 à 20 éoliennes, la collectivité bénéficiera de 150.000 à 200.000 € de retombées fiscales, ce qui n'est pas négligeable. Mais si elle prend en plus une participation dans le projet, les retombées économiques à terme seront beaucoup plus élevées. Cela positionne cependant la collectivité dans un rôle différent, celui d'entrepreneur au service de l'intérêt général.

AE : Ces opérateurs peuvent-ils émaner d'acteurs privés ?

YR : Dans le Lot, une coopérative agricole rassemblant un millier d'éleveurs, Fermes de Figeac, a mené une première opération d'équipement photovoltaïque des toitures des fermes, en 2008, au moment où le tarif d'achat était particulièrement élevé. Avec plus de 5 MW de capacités installées, cette opération s'est avérée très rentable. Un tiers des bénéfices est reversé aux agriculteurs, un tiers est mis en réserve et un tiers est réinvesti dans de nouveaux projets. Grâce à cette première opération réussie, la coopérative a ensuite structuré de nouveaux projets éoliens, bois énergie…

AE : Comment ce travail s'inscrit-il dans le projet de territoire ?

YR : Quand la coopérative Fermes de Figeac s'est lancée dans l'énergie il y a 10 ans, la collectivité du Grand Figeac n'avait pas encore de chargé de mission énergie-climat et était moins engagée qu'elle ne l'est aujourd'hui sur cette thématique. La question de la bonne gouvernance territoriale est évidemment déterminante. Mais il faut bien comprendre que le territoire n'est pas seulement l'apanage de la collectivité : parfois, d'autres acteurs initient et développent aussi des projets avec un vrai souci du collectif et du territoire. Les projets de transition impliquant plusieurs types d'acteurs sont certainement les plus intéressants à suivre. Par exemple, Sergies, dans la Vienne, ouvre systématiquement ses grands projets éoliens aux citoyens, soit pour le financement du capital, soit de la dette, en s'appuyant notamment sur la finance participative.

AE : Les projets énergétiques territoriaux sont menés par des acteurs qui n'ont pas forcément de compétences dans ce domaine. Comment cela se passe-t-il ?

YR : Les technologies, comme le photovoltaïque, sont souvent très facilement appropriables par les porteurs de projets. La compétence qui est réellement nécessaire relève plus du montage juridique et financier de société et de projet, ainsi que de mobilisation des acteurs. On observe une réelle dynamique ces dernières années autour de projets citoyens et locaux, comme les Centrales villageoises, mais ces projets sont souvent portés par des bénévoles, qui sont les futurs actionnaires. En revanche, un opérateur territorial a des salariés et a une réelle capacité à monter plusieurs projets. Nous pensons que les Tepos deviendront des territoires 100% énergies renouvelables s'ils sont dotés d'un ou plusieurs opérateurs énergétiques territoriaux. Ils sont le bras armé de la transition énergétique.

AE : Vous êtes allés regarder ce qu'il se passe chez nos voisins européens. Est-ce qu'il y a des spécificités par rapport à la France ?

YR : En Allemagne ou en Autriche, les opérateurs énergétiques territoriaux gèrent l'énergie sur toute la chaîne : la production, l'approvisionnement, la distribution et la fourniture. Cette capacité d'intégration rend ces opérateurs très puissants. A Munich (Allemagne), l'entreprise publique Stadtwerke München investit dans des projets d'énergies renouvelables dans le monde entier, afin que la production correspondant à ses parts couvre l'équivalent de la consommation des Munichois. Cet opérateur porte le projet d'assurer en électricité verte toute la consommation du territoire munichois d'ici dix ans (1,5 million d'habitants intra-muros et 2,3 millions d'habitants dans l'aire urbaine).

Si Paris voulait alimenter ses citoyens avec 100% d'électricité verte, elle ne disposerait pas du même levier d'action. Aujourd'hui, les collectivités françaises ne peuvent pas gérer l'activité de distribution, obligatoirement concédée à Enedis, filiale d'EDF, sur 95% du territoire. Les rares exceptions, liées à des raisons historiques, concernent les entreprises locales de distribution dont Energies Vienne fait partie. Les collectivités n'ont pas de visibilité et encore moins de contrôle sur le développement du réseau, ce qui peut concrètement freiner leurs ambitions en matière d'énergies renouvelables et les projets de territoire à énergie positive associés.

C'est une question hautement politique : dans la libéralisation du marché de l'énergie impulsée par l'Europe, la France s'est toujours battue pour avoir une dérogation sur la distribution et pouvoir maintenir un monopole national. Cela dit, les pionniers ne désarment pas et prouvent que des évolutions sont possibles et souhaitables. Ainsi, le Mené, en Bretagne, travaille en concertation avec le gestionnaire du réseau de distribution Enedis à l'équilibrage de ses productions et consommations locales. Mais au final, la prise de décision sur les choix d'investissements revient à Enedis. Il y a un vrai problème de gouvernance.

1. Télécharger le rapport du CLER sur les opérateurs énergétiques territoriaux
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-29345-operateurs-energetiques-territoriaux-cler.pdf

Réactions1 réaction à cet article

Qui sont sont les propriétaires des réseaux ? Enedis n’assure qu'une concession et les autorités concédantes et les Syndicats d’Électrification n'ont pas voie au chapitre ?
Mélange entre production et distribution => flou.
Si un citoyen souhaite 100 % d'EnR, son choix peut se porter sur la notion d'Autoproducteur- Autoconsommateur, non !

jjherou | 11 juillet 2017 à 07h51 Signaler un contenu inapproprié

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