Huit ans après la révélation du scandale du Dieselgate – l'utilisation par les constructeurs automobiles de dispositifs biaisant le contrôle des émissions de leurs moteurs –, les malversations n'ont toujours pas cessé en Europe, alertent trois ONG, ce mercredi 22 mars. Selon ClientEarth, France Nature Environnement (FNE) et Consommation Logement Cadre de Vie (CLCV), qui s'appuient sur une analyse de l'International Council on Clean Transport (ICCT), quelque 19 millions de véhicules trop émetteurs de dioxyde d'azote (NO2), bien au-delà des normes, circuleraient toujours au Royaume-Uni et au sein de l'Union européenne (UE). La France en compterait environ 3,3 millions.
Ces chiffres s'expliqueraient par le maintien de ces « dispositifs d'invalidation », pourtant clairement interdits par la législation européenne depuis 2018. Pour l'ICCT, plus de 200 modèles de véhicules, proposés par presque tous les constructeurs automobiles, présenteraient encore des niveaux d'émissions « suspects ». « Il est stupéfiant de constater que si peu de choses ont changé », remarque Katie Nield, juriste de ClientEarth.
Une inaction des États
Parallèlement à des plaintes adressées aux gouvernements britannique et allemand, ClientEarth a donc également déposé un signalement auprès des pouvoirs publics français, avec France Nature Environnement (FNE) et Consommation Logement Cadre de Vie (CLCV). Leur objectif : dénoncer cette inaction face à ce fléau et inciter l'État à le prendre à bras-le-corps en, notamment, interdisant ces pratiques et en imposant le dédommagement des particuliers lésés. La loi européenne exige en effet des autorités nationales qu'elles enquêtent activement sur la question et obligent les constructeurs à agir lorsque l'utilisation de dispositifs d'invalidation illégaux est constatée. « La Cour de justice de l'UE a par ailleurs statué hier sur le droit à une compensation pour les particuliers », précise Anne Lassman-Trappier, référente qualité de l'air à France Nature Environnement.
Or, dans de nombreux cas, les constructeurs automobiles n'ont pas été sanctionnés ni jugés responsables. Quant aux recours collectifs contre eux déposés par les citoyens, ils sont toujours en attente de jugement. Une situation bien différente de celle des États-Unis, qui a au contraire réagi dès 2015. « Volkswagen [y] a été contraint de racheter des véhicules ou de proposer des solutions efficaces, expliquent les ONG. L'entreprise a également versé près de 3 milliards de dollars à un fonds d'atténuation, afin de faire face aux conséquences du Dieselgate. » Les associations donnent quatre mois aux États pour réagir avant de porter le dossier devant la justice. « Il faut que l'État français se montre ferme », insiste Anne Lassman-Trappier.