
© Louis Verveur
L'hydrogène sulfuré (H2S), émanant d'algues vertes en décomposition, atteignent des seuils mortels au niveau du sol pour une exposition de courte durée, estime l'Ineris (Institut national de l'environnement industriel et des risques), chargé de procéder à une campagne de mesures pour évaluer les
Des dégagements importants près du sol
La campagne de l'Ineris s'est déroulée en deux phases : la première, du 5 au 6 août 2011, pour caractériser les émissions d'hydrogène sulfuré dans différentes zones de la baie ; la deuxième, du 4 au 11 août 2001, a été réalisée pour évaluer les concentrations en H2S auxquelles les populations riveraines, ou fréquentant la plage de Morieux et la zone de l'estuaire, étaient susceptibles d'être exposées.
''Les mesures effectuées à la surface du sol mettent en évidence des dégagements importants de composés soufrés, principalement du H2S, lors du perçage de la croûte des dépôts d'algues : des libérations de gaz se produisent alors, de type bouffées instantanées''. L'Ineris a relevé des valeurs de plus de 3 000 mg/m3, qui diminuent au fur et à mesure que l'on s'éloigne du sol. Ainsi, les détecteurs placés à la hauteur de la taille des opérateurs ont fourni des valeurs de 15 à 140 mg/m3.
''Dans l'air ambiant, les concentrations les plus élevées ont été relevées dans les zones les plus difficiles d'accès (zones escarpées, vasières). Sur la zone témoin de l'étude (hors des zones de dépôts d'algues), la valeur mesurée est 2,9 μg/m3; elle est un peu supérieure à ce qui est généralement observé dans l'air ambiant, en France (0,15 à 0,45 μg/m3)''. Cependant, les concentrations moyennes (sur chacun des points de la zone de mesure et sur l'ensemble de la période étudiée) sont de 5 à 75 fois supérieures à la valeur témoin locale.
''La survenue d'un accident ne peut être écartée''
Selon l'Ineris, pour les riverains, ''la situation ne semble pas présenter de risque préoccupant pour la santé''. En effet, pour ''les expositions de longue durée à de faibles concentrations, les mesures dans l'air ambiant sur une semaine sont représentatives d'une exposition dite « sub-chronique », car la saison d'échouage des algues s'étend principalement de juin à septembre, soit une exposition potentielle d'environ quatre mois''. Les valeurs de concentration en H2S relevées sont inférieures à la valeur de 30 μg/m3 définie par le Département de la Santé du gouvernement américain pour ce type d'exposition.
De plus, l'Ineris estime que l'odeur d'''œuf pourri'' dégagée par les algues vertes n'encourage pas les promeneurs à s'attarder sur la zone. Cependant, les chercheurs ont élaborés différents scénarios. Pour les promeneurs ou randonneurs qui se déplacent sur des zones de dépôts d'algues (expositions de courte durée à des concentrations élevées), des valeurs de 15 à plus de 140 mg/m3 ont été relevées. ''Elles se situent à des niveaux pour lesquels des effets ont été observés sur l'Homme, notamment l'anesthésie de l'odorat, au-delà d'une heure d'exposition en continu sur des zones de dépôts d'algues''.
Dans le cas ''peu probable'' où un individu est exposé aux concentrations maximales des bouffées au niveau du sol ou dans les dépôts d'algues, ''les concentrations mesurées peuvent atteindre les seuils mortels (2 408 mg/m3 pour une exposition d'une minute). L'hypothèse de la survenue d'un accident ne peut être écartée (enfant jouant dans le sable, chute grave...)''.
Quant à l'analyse des causes de la mort des sangliers, ragondins et blaireau, ''l'hypothèse la plus vraisemblable est l'intoxication par l'H2S. Par ailleurs, il faut souligner qu'à des doses chroniques les perturbations de l'odorat sont un handicap pour la vie animale'', conclut l'Ineris.