Dans l'attente de la réforme réglementaire annoncée pour le 1er semestre 2012, le Directeur général du travail vient d'adresser aux Direccte (1) , aux inspecteurs et aux contrôleurs du travail, une instruction (2) portant sur les mesures à mettre en œuvre immédiatement en matière de prévention de l'exposition à l'amiante.
Les textes attendus dans le courant du premier semestre 2012
Le 7 novembre dernier, le Gouvernement annonçait le renforcement de la réglementation en matière de protection des travailleurs contre l'exposition à l'amiante.
Cette décision faisait suite à la campagne expérimentale META (3) conduite tout au long de l'année 2010. L'INRS a remis le 22 septembre 2011 son rapport d'analyse à la Direction générale du travail (DGT). Il est préoccupant. Les résultats de cette campagne mettent en effet en évidence "des niveaux d'empoussièrement d'une ampleur inattendue pour certains matériaux en raison, notamment, des techniques utilisées et/ou de l'état de dégradation de ces matériaux".
Pour tenir compte de ces nouvelles données, un décret est actuellement en cours d'élaboration. "Les consultations obligatoires à mener débuteront en décembre et la publication du décret pourra intervenir dans le courant du 1er semestre 2012", indique le Directeur général du travail. Plusieurs arrêtés d'application seront également nécessaires.
Les principales mesures de cette réforme visent à abaisser la VLEP de 100 à 10 fibres par litre à une échéance de trois ans, de modifier les modalités de contrôle de l'empoussièrement en substituant la méthode META à la méthode MOCP (4) , de supprimer la dualité des notions friable/non friable, de généraliser les exigences de certification des entreprises, et de préciser les moyens de protection collective (MPC) et équipements de protection individuelle (EPI), en particulier les appareils de protection respiratoire (APR) adaptés aux niveaux d'empoussièrement sur les chantiers.
Elever les niveaux de prévention sans attendre
Jussieu ou les dérives d'une réhabilitation
Dans un rapport rendu public le 17 novembre dernier, la Cour des comptes a dénoncé les dérives de la réhabilitation du campus de Jussieu (Paris Ve). Certes, les critiques portent essentiellement sur le bilan financier de l'opération, jugé accablant. Mais la Cour a aussi pointé le lancement dans l'urgence de l'opération de désamiantage en négligeant les phases de préparation : études et diagnostics préalables très insuffisants, alternatives à la réhabilitation pas sérieusement étudiées, sous-évaluation de l'enveloppe financière prévisionnelle. Le désamiantage du site initialement programmé pour fin 2004 ne devrait finalement s'achever que cette année.
Pour les situations conduisant à un empoussièrement compris entre 100 et 6.000 fibres par litre (f/l), "l'utilisation d'appareils de protection respiratoire à masque complet à ventilation assistée de type TM3P équipé de filtres P3 est nécessaire", indique l'instruction.
Pour les travaux de retrait de matériaux contenant de l'amiante (MCA) non friables très émissifs (empoussièrement compris entre 6.000 et 25.000 f/l), "les mesures de prévention recommandées sont celles prévues en matière de retrait de MCA friable". C'est-à-dire : confinement de la zone de travaux par une enveloppe étanche à l'eau et à l'air, protection collective par une mise en dépression de la zone, assortie d'un contrôle permanent de l'état de la dépression, protection individuelle par combinaisons étanches décontaminables ou jetables et APR isolants à adduction d'air à pression positive garantie.
Pour les situations de retrait les plus émissives (empoussièrement supérieur à 25.000 f/l), "les moyens de prévention habituels ne permettent pas, dans l'état actuel de la technique, de garantir le respect de la VLEP de 0,1 f/cm3 sur une heure, prévue par le Code du travail, pour l'exposition des travailleurs", prévient le Directeur général du travail.
Les inspecteurs du travail sont donc invités à demander aux maîtres d'ouvrage "de réexaminer l'opportunité du retrait envisagé au profit du maintien en place de ces MCA en procédant à un encapsulage étanche". A défaut, ils devront s'assurer de la capacité des employeurs à satisfaire le respect de la VLEP. En cas d'exposition des travailleurs, il leur est demandé de mettre en œuvre "les moyens coercitifs appropriés".