L'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) propose de restreindre, au niveau européen, près de 200 substances chimiques « dangereuses potentiellement » présentes dans les couches jetables, afin de protéger la santé de « 90 % des enfants européens de 0 à 3 ans ». Soit 14,5 millions de bébés concernés.
Pour rappel, dès janvier 2019, l'Anses avait alerté sur la présence de plusieurs substances chimiques préoccupantes dans ces couches. Elle a soumis en octobre 2020 sa proposition de restriction de ces substances à l'Agence européenne des produits chimiques (Echa), dans le cadre de la réglementation européenne des produits chimiques Reach. Cette restriction permettrait de réglementer sur le marché européen la commercialisation des couches et de garantir le même niveau de sécurité sanitaire pour tous les produits.
Ainsi, l'Anses recommande de limiter « au maximum » la présence dans ces articles de près de 200 substances dont les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), les dioxines, les furanes, les PCB et le formaldéhyde. Dans son avis publié le 22 décembre, elle fixe des concentrations de seuils à ne pas dépasser pour ces substances. « Ces seuils permettraient de réduire drastiquement les concentrations de ces substances dans les couches jetables et d'écarter ainsi le risque pour la santé des bébés », indique l'Anses.
Pour limiter les contaminations des couches, elle propose aussi de renforcer le contrôle des matières premières et des processus de fabrication. L'Anses préconise ainsi de réaliser des tests supplémentaires pour « vérifier que les matières premières ne soient pas déjà contaminées avant la fabrication, de contrôler la température lors du chauffage pour éviter l'apparition de HAP, de contrôler les procédés de blanchiment, et de retirer certains colorants ».
Les substances restreintes ont des profils de « dangers sévères »
« Même si les impacts sanitaires n'ont pas pu être quantifiés et monétarisés, l'Anses considère que les bénéfices de la restriction seront significatifs », précise l'Agence dans son avis. Les substances restreintes « présentent des profils de dangers sévères et les pathologies évitées sont graves, variées et latentes : cancers (tumeurs de la peau), impacts sur la fertilité et autres effets reprotoxiques, perturbation endocrinienne et sensibilisation cutanée », prévient l'Anses. Ces pathologies « peuvent avoir indiscutablement un impact non négligeable sur la qualité de vie des futurs adultes que sont les bébés exposés ». L'Anses considère donc qu'il faut les prévenir « d'autant que le port de couches à usage unique est une pratique généralisée en Europe ». L'Agence estime que la restriction des substances visées présente aussi des surcoûts limités et, « en tous les cas proportionnés aux risques qu'elle permet d'éviter ».
Si cette proposition de restriction est adoptée, « cela signifie qu'à partir de 2024, tous les industriels qui mettent sur le marché européen soit à l'import, soit qu'ils produisent en Europe des couches pour bébés, devront respecter les restrictions », explique Céline Dubois, coordinatrice scientifique à l'Anses.