Présentée en juillet 2014 après plusieurs mois de débat national et adoptée un an après, la loi de transition énergétique est un texte majeur du quinquennat de François Hollande. "Cette loi faisait partie des promesses électorales (pour) nous mettre en conformité avec nos responsabilités par rapport aux générations futures, relancer la croissance et porter un message universel afin d'être source d'inspiration pour d'autres lors de la COP 21", a déclaré le Président de la République à l'occasion de la cérémonie des un an de la loi organisé vendredi 22 juillet à l'Elysée. Pour lui, il ne fait aucun doute que ce texte a contribué à la réussite de la COP à Paris en décembre 2015.
"Ce texte a donné de la crédibilité à la France pour recevoir la COP 21, a renchéri la ministre de l'Environnement. Elle propulse la France vers un nouveau modèle énergétique", selon Ségolène Royal, et lui permet d'être en phase avec l'Accord de Paris. "Nous sommes le seul pays au monde à avoir adopté une stratégie bas carbone et inscrit dans la loi sa contribution nationale (INDC) avant même la COP21 et l'Accord de Paris sur le climat et le seul pays avec une tarification carbone qui couvre l'ensemble de l'économie, avec une trajectoire fixée jusqu'en 2030", rappelle régulièrement la ministre de l'Environnement.
Une ambition affichée
Si elle traduit notamment des mesures demandées par l'Union européenne, la loi de transition énergétique fixe des objectifs spécifiques et ambitieux à la France. Les débats houleux, lors de l'examen au Parlement concernant certains points, en sont la preuve. La réduction de la consommation énergétique finale de 20% d'ici à 2030 et surtout la réduction de la part du nucléaire dans la production d'électricité à 50% à l'horizon 2025 ont fortement mobilisé les parlementaires de tous bords. "Les fondations d'un nouveau système énergétique sont posées. La boîte à outils est là. Une nouvelle dynamique s'enclenche", a déclaré la ministre. "Cette loi, si elle est mise en œuvre, pourrait rester comme un acte fondamental de ce quinquennat", estime de son côté le Réseau action climat (RAC).
"Si elle est mise en œuvre", conditionne le RAC. C'est bien là tout l'enjeu. La ministre de l'Environnement l'a bien compris et a pris soin au cours des 12 derniers mois de faire des points d'avancement réguliers pour démontrer la rapidité de transposition. Derniers chiffres en date : "100% des textes d'application de la loi sont écrits et 80% des décrets sont publiés ou au Conseil d'Etat". "Cet anniversaire marque l'aboutissement de deux ans de travail considérable", reconnaît la ministre. Un travail actif à n'en pas douter pour les services de l'Etat mais qui aujourd'hui, pour certains textes, ne traduit pas l'ambition de la loi.
PPE : des éléments du puzzle manquent toujours
La programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) qui doit définir concrètement les tendances à suivre pour atteindre les objectifs de la loi n'est pas encore finalisée. Et elle ne le sera pas avant septembre au plus tôt. Noeud du problème ? Le nucléaire. Devant la difficulté à sortir la PPE dans les temps, la ministre a même décidé d'acter dès le mois de mai dernier le développement des énergies renouvelables, un volet de la PPE plutôt consensuel. De nouveaux éléments ont été présentés mi juillet au conseil national de la transition énergétique (CNTE) mais là encore tout n'est pas détaillé : "La PPE acte la baisse de la production d'électricité d'origine nucléaire mais cette baisse est incohérente avec les objectifs de la loi. Il faut très rapidement mettre à jour la PPE pour la rendre cohérente avec les objectifs et indiquer un nombre de réacteurs nucléaires à fermer d'ici 2023", demande le RAC.
Le Medef s'inquiète de son côté car la PPE présentée ne répond pas à l'obligation d'étude d'impact économique et social, ni à l'étude d'impact sur les prix de l'énergie prévues par la loi (article 176). "A ce stade du processus, les documents fournis sont essentiellement focalisés sur l'évaluation environnementale et l'amorce d'une évaluation économique qui reste très insuffisante. Le plan de programmation de l'emploi et des compétences prévu par la loi (article 182) fait également défaut", commente le Medef dans un communiqué. Un manque d'informations qui n'a pas permis au CNTE de donner un avis sur ce projet de PPE.
Des décrets à l'ambition insuffisante
Pour certains décrets, publiés ou prêts à l'être, plusieurs acteurs constatent un manque d'ambition. En matière de bâtiment, la loi prévoit de rénover 500.000 logements par an avec des niveaux de performance permettant au parc immobilier de réduire son empreinte énergétique. Pour pousser à rénover, la loi prévoit notamment de rehausser les critères d'un logement décent. Mais le texte proposé ne satisfait pas du tout : "Le projet de décret intégrant la performance énergétique dans les critères de décence des logements est inacceptable. Il faut [le] revoir", estime le RAC.
De même, le projet de décret sur l'obligation de travaux des bâtiments tertiaires suscite l'expectative. A l'occasion d'une table ronde organisée en juin à l'Assemblée nationale, la Fédération des industries électriques, électroniques et de communication (FIEEC) déplorait que le décret tertiaire ne s'applique qu'aux surfaces de plus de 1.000 m2, soit seulement 20% du parc.
Sans oublier la révision de la réglementation thermique des bâtiments existants élément par élément. Totalement obsolète, cette réglementation fait l'objet d'un projet d'arrêté mais les ambitions affichées sont encore une fois jugées insuffisantes. "Ce projet d'arrêté n'est pas à la hauteur du mandat politique", commentait début juin Joël Vormus, responsable projets énergie et environnement au Réseau pour la transition énergétique (Cler). La révision de cet arrêté est d'autant plus urgente car des décrets d'application de la loi déjà publiés s'appuient sur ce texte. C'est le cas du décret sur les travaux embarqués, imposant d'isoler les façades ou les toitures et du décret sur la prise en compte de la haute performance des bâtiments dans les marchés publics.