Dans un rapport d'information (1) rendu public ce mardi 7 juillet, les sénateurs François Calvet (Les Républicains – Pyrénées Orientales) et Christian Manable (Socialiste et Républicain – Somme) évaluent les actions de l'Etat et des collectivités territoriales en matière de prévention et de protection contre les inondations, cinq ans après le drame de la tempête Xynthia.
Les parlementaires formulent dix recommandations en vue d'améliorer une culture du risque qu'ils jugent encore défaillante, même s'ils ont pu constater des progrès dans la mobilisation des acteurs de la chaîne du risque. Parmi ces recommandations, l'une vise à engager d'urgence un travail de simplification associant services de l'Etat et associations d'élus afin de "rendre plus lisible l'articulation des outils relatifs aux risques". Une autre vise à améliorer la mise en conformité des documents d'urbanisme avec les plans de prévention des risques.
Est-ce à dire que les procédures et les outils existants (PPRI (2) , PCS (3) , PSR (4) et autres Papi (5) ) ne sont pas adaptés ? "Tous ces plans ont été un frein aux travaux nécessaires", n'hésite pas à déclarer François Calvet. "C'est un véritable maquis. Il y a de quoi se perdre, même pour les élus locaux", confirme Christian Manable. En fait, c'est la mauvaise articulation des différents outils entre eux qui semblent poser problème aux yeux des sénateurs, plutôt que leur bien-fondé. Ainsi, François Calvet déplore-t-il l'absence de PPRI pour la commune de la Faute-sur-Mer, suite à son annulation par la justice administrative, en janvier dernier, à la demande d'une association de propriétaires.
Complexité administrative
Le rapport pointe ainsi la complexité administrative rencontrée par les maîtres d'ouvrage chargés de restaurer les digues en Vendée. "Ceux-ci doivent d'abord faire une demande de labellisation dans le cadre des Papi, puis réaliser une étude sur les dangers, et enfin déposer plusieurs dossiers relatifs à l'occupation du domaine maritime, à la gestion de la mer si du sable est prélevé, à la loi sur les espaces protégés, à la loi littoral, et à la loi Natura 2000", relèvent les auteurs.
"Cette complexité de procédures entraîne des retards de deux à trois ans dans les travaux", selon le sénateur Bruno Retailleau, ancien président du conseil général de Vendée et auteur du premier rapport d'information sur les conséquences de la tempête Xynthia en 2010.
C'est pourquoi la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat, au nom de laquelle a été remis ce nouveau rapport, se dit particulièrement intéressée par une généralisation de l'expérimentation de l'autorisation unique "loi sur l'eau" lancée en juillet 2014 dans les régions Rhône-Alpes et Languedoc-Roussillon. "Outre la simplification des démarches administratives, cette procédure permet également un gain de temps dans les délais d'instruction", se félicitent les rapporteurs, qui préconisent d'adopter la même approche d'intégration des enjeux environnementaux en matière de prévention du risque.
Mieux articuler urbanisme et prévention des risques
Une deuxième recommandation vise à améliorer l'articulation entre les plans de prévention des risques et les plans d'urbanisme. "Il y un foisonnement de documents administratifs mais ils ne sont pas forcément repris dans la planification urbaine", déplore François Calvet.
Cette proposition prévoit de rendre obligatoire la révision des documents d'urbanisme des communes en cas d'approbation, de mise en application anticipée ou de modification d'un plan de prévention des risques. Bien qu'une autorisation d'urbanisme conforme au plan local d'urbanisme (Plu) mais contraire au plan de prévention des risques naturels (PPRN) ne puisse théoriquement pas être accordée, les sénateurs entendent ainsi améliorer la lisibilité des documents d'urbanisme.
Cette recommandation avait d'ailleurs été votée par le Sénat en mai 2011 dans le cadre de la proposition de loi issue du rapport Retailleau-Anziani, mais elle n'a jamais été examinée par l'Assemblée, déplore la mission.
Une telle disposition pourrait aider les élus locaux à faire passer la pilule du classement de terrains en zone inondable, toujours difficilement acceptable pour des propriétaires qui voient fondre la valeur de leur terrain. "J'ai été secoué sur le terrain, il faut tenir bon", témoigne François Calvet, qui a procédé à une telle révision dans la commune des Pyrénées-Orientales dont il est maire.
Pour faciliter la mise en œuvre de cette recommandation, les rapporteurs estiment "judicieux" que les communes puissent être aidées pas les services de l'Etat lorsqu'elles auront à réaliser de telles mises en conformité. Une revendication maintes fois réitérée, la question de la répartition des responsabilités entre l'Etat et les collectivités, et du financement des actions nécessaires, étant au cœur de la problématique de prévention et de protection contre les inondations.