"Ces mesures vont donc nous permettre de diviser par deux la durée du cycle de renouvellement de nos réseaux pour rattraper le retard accumulé", a assuré Édouard Philippe, Premier ministre lors de la présentation des conclusion de la première séquence des assises de l'eau à Saint-Michel-de-Chaillol (Provence-Alpes-Côte d'Azur).
D'avril à juillet, les trois groupes de travail se sont intéressés au petit cycle de l'eau et notamment à la réduction des fuites dans les réseaux. Initialement prévue le 17 juillet, la présentation des conclusions avait finalement été reportée fin août-début septembre, officiellement pour des raisons de calendrier. Les annonces de ce jour se sont également déroulées sans la présence de Nicolas Hulot, jusqu'alors ministre de la Transition écologique qui a choisi de quitter le Gouvernement.
Une solidarité inter-agences
Les solutions proposées lors du discours du Premier ministre s'appuient en grande partie sur une aide des agences de l'eau. Or, pour mémoire, la première partie des assises s'est déroulée dans un contexte d'opposition notamment des comités de bassin à la réduction des moyens dont disposent les agences de l'eau. Ce point de tension demeure. Si lors de son discours, le Premier ministre a réaffirmé son attachement au modèle français des agences de l'eau et de la gestion par bassin, il a toutefois justifié les ponctions sur leur budget comme une nécessaire contribution à "l'objectif de maîtrise de la dépense publique et de baisse de la pression fiscale".
Dans ce contexte, Édouard Philippe a indiqué que les interventions des agences devaient être recentrées autour de deux priorités : la solidarité territoriale avec les territoires ruraux notamment et l'adaptation au changement climatique. Il a également confirmé la nécessaire solidarité entre les agences. "Celles qui ont de la trésorerie pourront consentir des prêts à celles qui rencontrent des difficultés transitoires", a-t-il détaillé.
Renforcer la connaissance des réseaux
Pour une meilleure gestion du petit cycle de l'eau, le Gouvernement priorise quatre pistes. Tout d'abord, il vise le renforcement de la connaissance des réseaux d'eau et d'assainissement via de nouvelles obligations de publication des résultats des services d'eau et d'assainissement. Pour aider à répondre à cette nouvelle demande, les agences de l'eau apporteront une aide qui pourra couvrir jusqu'à 50% du coût du diagnostic.
La seconde solution envisagée passe par une amélioration des conditions d'accès à l'emprunt des collectivités. "Les investissements réalisés en matière d'eau sont parfois très lourds, (…) ils vont servir pendant 30 à 60 ans, il est normal que les contribuables amortissent une partie de l'investissement", a indiqué le Premier ministre.
La Caisse des dépôts en partenariat avec des banques privés proposera des prêts avec une maturité longue, jusqu'à 60 ans, "à des taux attractifs, qui pourront représenter 2 Md€ sur 5 ans". Celle-ci doit également travailler avec les agences de l'eau pour proposer aux collectivités des offres financières qui combineront des prêts à maturité longue et subventions. Le Premier ministre a également indiqué que les régions volontaires pourront demander des aides européennes.
Une aide privilégiée pour les zones rurales
Une autre piste proposée pour réduire les fuites dans les réseaux est la solidarité territoriale. Ainsi, les subventions des agences de l'eau qui concernent le petit cycle de l'eau seront prioritairement adressées aux zones en difficulté, en particulier rurales.
"Ce sont donc près de 2 mds d'euros d'aides - soit une enveloppe en hausse de plus de 50% que les agences consacreront, durant la période 2019-2024 au renouvellement des réseaux de ces zones les moins favorisées, a indiqué Édouard Philippe. Pour financer cet effort de solidarité, nous procéderons au redéploiement progressif des aides au fonctionnement ainsi que des anciennes aides à la conformité réglementaire".
Le Premier ministre a également profité de ce discours pour affirmer la volonté du Gouvernement d'accélérer le déploiement de la tarification sociale de l'eau. "Nous proposerons dans ce but aux collectivités volontaires de mettre en place un dispositif de chèque-eau et d'en confier la gestion à l'opérateur national du chèque énergie", a-t-il indiqué.
Des aides seront également fléchées pour le développement d'innovations technologiques par exemple pour améliorer le goût de l'eau, suivre sa qualité, procéder à des travaux sans creuser des tranchées pour ne pas perturber l'activité d'une ville.
Le Gouvernement prévoit également que le comité stratégique de la filière eau (dont le président est Antoine Frérot, PDG de Veolia) propose des solutions par exemple pour harmoniser le goût de l'eau potable ou pour donner un accès à l'information aux consommateurs.
Point à noter : près d'1 milliard d'euros d'aides pourront être consacrés à la gestion des eaux pluviales.
Enfin, pour accompagner les maires et syndicats dans leur gestion de l'eau et de l'assainissement, les agences orienteront leurs aides vers l'assistance à maîtrise d'ouvrage, les marchés cadres avec des bureaux d'études et la constitution de groupements de commandes.
La seconde séquence des assises de l'eau s'ouvrira le mois prochain et s'intéressera à comment permettre aux territoires et à l'ensemble des acteurs de s'adapter aux conséquences du changement climatique sur l'eau.