En juillet 2010, la Commission proposait un règlement, visant à donner la possibilité aux Etats membres de restreindre ou d'interdire la culture d'OGM sur la totalité ou une partie de leur territoire pour des motifs autres que ceux fondés sur une évaluation scientifique des risques pour la santé et l'environnement. Cette proposition a été approuvée par le Parlement européen en juillet 2011, mais bloquée depuis au niveau du Conseil.
Alors que la question du maïs TC 1507 a récemment cristallisé les oppositions sur les OGM, la présidence grecque du Conseil a souhaité remettre sur la table du Conseil environnement du 3 mars un texte de compromis visant à relancer les discussions sur la proposition de la Commission. Avec succès : une majorité d'Etats membres a estimé que ce texte constituait une base solide pour relancer les débats, afin d'aboutir à un accord politique d'ici juin. Cependant, une minorité de blocage persiste (Allemagne, Belgique, Bulgarie, France), même si certains ont souhaité faire preuve d'ouverture quant à la reprise des discussions (Allemagne, Bulgarie).
La France a quant à elle proposé une solution alternative : renationaliser en partie la procédure d'autorisation de cultures OGM. Une proposition rejetée par de nombreux Etats membres. "Ce serait faire machine arrière", ont jugé plusieurs d'entre eux, dont l'Espagne et les Pays Bas. En revanche, l'Allemagne, opposée à la proposition de la Commission, a invité cette dernière "à examiner la proposition française qui n'est pas dénuée d'intérêt".
La proposition grecque séduit une majorité d'Etats
La Commission propose de maintenir l'évaluation scientifique des risques sanitaires et environnementaux au niveau communautaire mais propose aux Etats membres de pouvoir avancer d'autres arguments (socio-économiques, éthiques, religieux…) pour restreindre ou interdire la culture d'OGM au niveau national. Pour faire aboutir les discussions, la présidence grecque a remis sur la table un texte de compromis présenté une première fois en 2012 par la présidence danoise, et rejeté alors.
Ce texte prévoit deux solutions d'application du principe de subsidiarité. D'abord, au cours de la procédure d'autorisation d'un OGM, un Etat membre pourra faire la demande au notifiant (l'entreprise qui dépose une demande d'autorisation de culture) de modifier la portée géographique de l'autorisation, de manière à ce que tout ou partie du territoire de cet Etat membre soit exclu de l'autorisation de culture. Ensuite, lorsque l'OGM a été autorisé, un Etat membre pourra limiter ou interdire la culture de cet OGM, à condition que cette mesure nationale n'entre pas en conflit avec l'évaluation des risques environnementaux effectuée au niveau de l'UE.
En 2012, les Etats membres opposés à cette proposition avançaient un problème de compatibilité juridique de certaines dispositions avec les règles de l'organisation mondiale du commerce (OMC) et de l'UE sur le marché intérieur. Ils s'inquiétaient également d'éventuels chevauchements et/ou incohérences entre l'évaluation obligatoire des risques au niveau de l'UE et les mesures nationales de protection de l'environnement. Ce sont les mêmes réserves qu'ont avancées ce 3 mars certains Etats membres (Malte, Slovénie, Irlande, Slovaquie, Bulgarie, Allemagne…) lors du Conseil environnement.
L'alternative française : une autorisation à deux étages
La France a donc proposé une solution alternative : un système d'autorisation à deux étages, qui offre des "garanties juridiques concrètes vis à vis notamment de l'OMC", a déclaré le ministre de l'Ecologie Philippe Martin. Celui-ci a insisté auprès de la Commission : "Il faudra que les assurances soient données sur la sécurité du processus [choisi] d'un point de vue juridique".
La France propose de maintenir l'évaluation scientifique des risques au niveau communautaire et de confier à chaque Etat membre l'évaluation d'autres critères. Il reviendrait alors à ce dernier d'autoriser ou non la culture sur son territoire. Ce système "s'inspire de dispositifs déjà en vigueur" pour les pesticides ou certains médicaments, a souligné le ministre de l'Ecologie. Et, balayant les craintes de certains Etats membres de voir les discussions repartir à zéro, Philippe Martin a insisté : "La proposition faite par la France permet d'aboutir à un accord au Conseil au mois de juin".
Seuls quelques Etats membres se sont dits ouverts à cette proposition, à l'instar de la Slovaquie ou l'Allemagne. Mais les positions peuvent encore évoluer d'ici le mois de juin. Prochaine étape des discussions : le 13 mars, à l'occasion de la réunion du Comité des représentants permanents (Coreper).