La ministre de l'Ecologie Ségolène Royal a annoncé le 26 juillet qu'elle ne lancera pas la procédure d'appels d'offres pour le concessionnaire du projet autoroutier A831, confirmant les déclarations publiées la veille par le quotidien régional Sud Ouest. Ce tronçon de 64 kilomètres, reliant Fontenay-le-Comte (Vendée) à Rochefort (Charente-Maritime), a été déclaré d'utilité publique en 2005.
"Je ne transmettrai pas le dossier de consultation technique aux entreprises", en vue d'un appel d'offres, a déclaré Ségolène Royal. Selon la ministre relayée par l'AFP, le coût de l'autoroute est estimé à 900 millions d'euros dont 137,5 millions d'euros pris en charge par l'État. L'enquête d'utilité publique "date de dix ans. Il faudrait refaire l'ensemble des études (…). Par ailleurs, elle a été classée dans les équipements non prioritaires. L'État ne cofinancera pas ces infrastructures", a affirmé la ministre.
Mobilité 21 : un projet routier à engager au-delà de 2050
Fin juin 2013, la commission Mobilité 21, présidée par le député-maire de Caen Philippe Duron, avait estimé le coût du projet routier A831 à 750 millions d'euros en 2012. "Sa réalisation doit permettre d'améliorer les temps de parcours entre Bordeaux et Nantes et de contribuer au désenclavement des villes du secteur ainsi qu'à une meilleure desserte du littoral, notamment du Port de La Rochelle", avait indiqué la commission en soulignant un bilan socio-économique du projet "agrégé tout à fait favorable".
Toutefois, Mobilité 21 a jugé que ce projet de tronçon ne permettait pas de mettre en évidence "de bonnes performances en matières écologiques et sociétales". Le projet soulève "des controverses quant à son intérêt et à ses conséquences au plan environnemental. Après analyses comparatives des enjeux nationaux des différents projets, la commission classe le projet dans la catégorie des projets à horizons plus lointains (au-delà de 2050, ndlr) quel que soit le scénario considéré", a conclu Mobilité 21 dans son rapport.
Menace sur le Marais poitevin ?
Ségolène Royal a en effet souligné que l'A831 devait traverser le Marais poitevin, qui a retrouvé en 2014 le label de Parc naturel régional, perdu en 1996. "On ne va pas accepter un tel projet dans le Marais poitevin, au moment où il vient de récupérer son label Parc Naturel, au bout de dix années, et qu'il est classé grand site", a-t-elle déclaré, selon Sud Ouest.
La ministre proposerait comme alternative d'améliorer la route nationale qui passe par Marans (Charente-Maritime). "Il faut déjà réfléchir à un plan B", a indiqué Ségolène Royal au quotidien. Elle a déclaré qu'elle est prête à étudier ce que l'État pourrait apporter "dans le cadre du prochain plan Etat-Région pour une déviation de Marans".
Colère des élus locaux UMP et PS
Fin janvier 2012, Dominique Bussereau, président UMP du conseil général de Charente-Maritime et Bruno Retailleau, président UMP du conseil général de Vendée, avaient signé le protocole d'accord avec l'État sur le financement de ce tronçon. L'A831 "n'est pas abandonnée", avait assuré fin août 2013, le secrétaire d'Etat aux transports Frédéric Cuvillier à l'université d'été du PS à La Rochelle, selon Sud Ouest.
Ce week-end, Dominique Bussereau a indiqué que le contournement du Marais poitevin était déjà pris en compte. "Non l'A 831 ne coûtera pas aux contribuables 900 millions d'euros, qui est le coût total de la construction de l'autoroute, qui sera pris en grande partie par le concessionnaire (…). Non, l'A 831 ne porte pas atteinte au Marais poitevin. C'est la LPO qui le dit : 125 millions d'euros investis sur sa recommandation pour faire de cette autoroute un exemple d'intégration environnementale", a de son côté affirmé Bruno Retailleau en "accusant Ségolène Royal de mentir et de mépriser le peuple" dans un communiqué. Il a appelé le Premier ministre Manuel Valls à trancher.
Pour Jacques Auxiette, président socialiste de la Région des Pays-de-la-Loire, "la déclaration de Madame Royal intervient de façon totalement improvisée tandis que les services de l'Etat, mais aussi ceux des collectivités locales, travaillent en étroite collaboration depuis des semaines à la finalisation du projet. Pas plus tard que la semaine dernière, j'ai rencontré Michel Sapin (ministre des Finances, ndlr) pour examiner les conditions de financement des travaux de l'autoroute", a-t-il déploré dans un communiqué. Et de poursuivre : "Tout a été fait pour que ce projet s'insère du mieux possible dans l'environnement. Sa réalisation est d'ailleurs mentionnée dans les documents de la nouvelle charte du Marais Poitevin. Tout se passe comme si Ségolène Royal redevenue ministre de l'écologie ne voulait pas déjuger Ségolène Royal ancienne ministre de l'écologie, à l'origine d'un contournement coûteux et écologiquement très contestable de l'A83. Ce n'est pas parce que l'on est ministre que l'on peut faire deux fois les mêmes bêtises !", a-t-il critiqué.
A l'inverse, les conseillers régionaux écologistes des Pays-de-la-Loire ont salué ce lundi 28 juillet "une décision de bon sens" : "l'abandon de l'A831 devrait paradoxalement permettre le contournement de Marans, et en tout cas nous le souhaitons vivement à l'instar des propos de la ministre de l'Ecologie !", ont-ils déclaré.