Les ministres de l'Agriculture et de la Transition écologique ont mis en ligne le 13 juillet deux listes de produits pesticides et biocides autorisés à ce jour contenant une substance susceptible d'être perturbatrice endocrinienne (PE). Soit près de 600 produits phytosanitaires (fongicides, herbicides, insecticides) et un millier de produits biocides (insecticides pour la maison, produits de protection du bois, pour l'hygiène vétérinaire, etc.), actuellement sur le marché européen.
Les ministres publient, "dès à présent", ces listes "dans l'attente de l'évaluation par la Commission des dispositions du texte entrainant l'exemption de certaines substances". Ces listes sont par conséquent susceptibles d'évoluer "après analyses détaillées par les agences sanitaires européennes", ont-ils prévenu. "Si les critères ont été approuvés par les Etats membres, les agences scientifiques n'ont pas encore mené le travail détaillé, substance par substance, de vérification de leur caractère perturbateur endocrinien."
Des listes "prématurées"
Les ONG et l'industrie phytopharmaceutique ont critiqué ces listes provisoires. "La liste publiée semble longue mais porte sur des produits commerciaux. Il faudrait maintenant que les ministères publient la liste des matières actives concernées pour qu'on y voit plus clair", souligne l'ONG Générations futures, dans un communiqué, tout en rappelant son opposition aux critères votés qu'elle juge "insuffisamment protecteurs". Ces critères "exig[ent] un niveau de preuve beaucoup trop élevé avant de pouvoir exclure une substance et prévoit des dérogations à l'interdiction pour de nombreuses substances !", fustige l'association. Le projet de définition des PE doit encore être validé par le Parlement européen et le Conseil de l'UE. Afin d'être applicables, les critères devront être traduits en lignes directrices d'évaluation par les agences de sécurité sanitaire. Les "lignes directrices (actuellement en discussion) pourraient encore restreindre la portée des critères votés", craint aussi l'association.
Le processus de décision européen en cours n'est "pas respecté", dénonce, de son côté, l'Union des industries de la protection des plantes (UIPP). "Qu'en est-il de l'engagement présidentiel de respecter le cadre européen et de ne pas aller au-delà de la réglementation en vigueur dans l'UE ? Il est donc prématuré à ce jour de traduire le projet de définition en liste de substances", déplore l'UIPP dans un communiqué, alors que les critères retenus "ne sont plus les mêmes que ceux de la nouvelle définition". Eugénia Pommaret, directrice générale de l'UIPP, "regrette qu'au lendemain d'un premier accord européen destiné à harmoniser la réglementation, la France prenne une telle décision unilatérale qui induira de nouvelles distorsions de concurrence pour la filière agricole française, sans pour autant protéger davantage nos concitoyens".
Les ministres ont confirmé, le 4 juillet, "leur [engagement] à utiliser la procédure prévue par le droit européen permettant, sur la base d'analyses scientifiques et techniques menées au niveau national, d'interdire la mise sur le marché français de produits contenant ces substances". La publication de ces listes fait aussi partie des concessions obtenues par la France, en contrepartie de son vote de la définition de la Commission.