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Effondrement de la biodiversité : deux associations somment l'État français d'agir

Le processus d'autorisation des pesticides est défaillant, pointent les associations Notre Affaire à tous et Pollinis. Elles lancent une action contre l'État pour voir sa responsabilité reconnue dans l'effondrement de la biodiversité.

Biodiversité  |    |  L. Radisson
Effondrement de la biodiversité : deux associations somment l'État français d'agir
Actu-Environnement le Mensuel N°417
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Les contentieux pour inaction en matière de biodiversité vont-ils bousculer les gouvernements de la même manière que tente de le faire la justice climatique ? C'est le pari que font les associations Notre Affaire à tous et Pollinis en lançant, ce jeudi 9 septembre à Marseille, une action en justice contre l'État français pour manquement à ses obligations de protection de la biodiversité.

Les associations ont décidé de fonder principalement leur action sur les carences constatées en matière d'autorisations de mise sur le marché (AMM) des pesticides. « Malgré tous les discours, et au mépris des lois et des conventions nationales, européennes et internationales, l'État français a failli à mettre en place un système d'homologation des pesticides réellement protecteur des pollinisateurs et de la faune en général », pose Nicolas Laarman, délégué général de Pollinis.

« Recours immodéré et systématique aux pesticides »

Les ONG estiment que l'une des causes majeures du déclin de la biodiversité est le « recours immodéré et systématique aux pesticides ». Elles mettent notamment en avant les résultats du programme de suivi temporel des oiseaux communs (Stoc) du Muséum national d'histoire naturelle qui montrent que les pertes les plus importantes concernent les oiseaux spécialistes des milieux agricoles. Ces résultats sont révélateurs de la dégradation des habitats « sous la pression des activités agricoles intensives et de l'usage massif des pesticides de synthèse », ajoutent-elles.

Un point de vue que ne partagent bien évidemment pas les entreprises qui commercialisent les pesticides. « Nous nous étonnons que la question de la protection de la biodiversité se résume ici aux effets éventuels des pesticides. De très nombreuses activités humaines comme l'urbanisation et l'artificialisation des sols, les éclairages nocturnes, la pollution atmosphérique… peuvent impacter la biodiversité. Cette dernière doit être envisagée dans toutes ses dimensions et être l'affaire de tous », réagit Eugénia Pommeret, directrice générale de l'Union des industries de la protection des plantes (UIPP), à la suite de l'annonce de cette action.

« Les pesticides nocifs pour le vivant sont autorisés sans contrôle rigoureux et sans évaluation pertinente de leurs effets réels sur la biodiversité », poursuivent quant à elles Pollinis et Notre Affaire à tous. Celles-ci pointent les lacunes de la procédure française de mise sur le marché des produits phytosanitaires, lacunes dont certaines sont identifiées par l'Agence de sécurité sanitaire (Anses) elle-même : mauvaise prise en compte des effets chroniques, des effets sublétaux, des effets sur plusieurs espèces ou encore de l'effet cocktail des produits. Pollinis et Notre Affaire à tous dénoncent également « le double rôle de l'Anses » qui, à la fois, évalue les produits et les autorise. « De telles lacunes et incohérences révèlent que le maintien de ce processus d'homologation, vecteur de déclin de la biodiversité, est contraire aux obligations de conservation de la biodiversité », estiment les associations.

Bien que la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques soit une compétence partagée entre l'Union européenne et les États, rien n'empêche ces derniers d'être « plus restrictifs, en application du principe de précaution », ajoutent les deux ONG. Selon les textes européens, rappellent-elles, les États membres doivent procéder à un retrait du marché ou éviter d'autoriser des pesticides dont le risque pour la santé ou la biodiversité est établi.

Éliminer les néonicotinoïdes, les SDHI et le glyphosate

Compte tenu des objectifs de protection de la biodiversité qu'il s'est lui-même fixés, « l'État se rend manifestement coupable de carence fautive de nature à engager sa responsabilité, notamment pour préjudice écologique », en concluent les associations. Celles-ci demandent dans un premier temps au gouvernement de faire cesser la situation qu'elles jugent illégale. Dans ce cadre, elles réclament une réforme du processus d'autorisation de mise sur le marché des pesticides mais aussi la suspension des autorisations des produits d'ores et déjà identifiés comme entraînant une perte inestimable de biodiversité.

“ L'État se rend coupable de carence fautive de nature à engager sa responsabilité, notamment pour préjudice écologique. ” Notre Affaire à tous et Pollinis
Parmi ces derniers figurent les produits de la famille des néonicotinoïdes et des inhibiteurs de la succinate déshydrogénase (SDHI), ainsi que ceux contenant du glyphosate. La majorité présidentielle est revenue sur l'interdiction des premiers en accordant des dérogations pour les cultures de betteraves sucrières. Plusieurs études ont alerté sur les risques sanitaires présentés par les SDHI dont plusieurs sont encore sur le marché. Quant au célèbre glyphosate, classé « cancérogène probable » par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ), Emmanuel Macron n'a pas réussi à honorer sa promesse d'y mettre fin avant la fin de l'année 2020.

Initiative pour une sortie accélérée des pesticides

Le 3 septembre, en ouverture du Congrès mondial de la nature, le chef de l'État a annoncé une initiative de la présidence française de l'UE pour une sortie accélérée des pesticides. Une annonce tempérée dès le lendemain par le ministre de l'Agriculture. « Notre position est toujours la même : pas d'interdiction sans alternative », a indiqué Julien Denormandie. Ce qui n'est pas de nature à rassurer les associations.

En tout état de cause, « si la réponse du gouvernement n'est pas satisfaisante d'ici deux mois », les ONG annoncent qu'elles procéderont au dépôt « d'un recours de plein contentieux devant le tribunal administratif de Paris ». Sans illusion sur l'issue de cette mise en demeure, elles ont d'ores et déjà planifié cette action en novembre prochain.

Accompagné d'une campagne de communication et de la création d'un site internet spécial, l'idée des associations est de réitérer le scénario de l'Affaire du siècle. Une action mettant en cause l'État pour son inaction dans le domaine climatique qui a reçu le soutien de plus de deux millions de personnes mais dont l'épilogue judiciaire reste toujours attendu.

« Je comprends leur action, on ne peut être que favorable mais je trouve qu'elle est très large », réagit Henri Clément, porte-parole de l'Union nationale de l'apiculture française (Unaf). Le syndicat apicole français ne s'y joindra donc pas, préférant emprunter la voie juridique sur des dossiers précis. « Pollinis est habitué à reprendre les combats que l'on mène. C'est une drôle d'association », lâche le représentant du syndicat professionnel.

Réactions2 réactions à cet article

Les campagnes sont envahies par les corbeaux/corneilles. Les champs labourés et à peine semés sont couvert d'une nuée noire de ces volatils qui n'ont pas l'air d'être atteint par les pesticides vu leur prolifération exponentielle !

Lili64 | 10 septembre 2021 à 12h43 Signaler un contenu inapproprié

@ Lili64 : en bons opportunistes à la taille et au comportement grégaire qui les mettent à l'abri de pas mal de prédateurs, les corbeaux freux profitent pour nicher largement des peupleraies que l'homme a planté partout dès qu'il y a un cours d'eau. Et tout comme les corneilles noires, ils ont parfaitement su s'adapter pour se nourrir aux immenses plaines de grandes cultures, là aussi généreusement mises à disposition par notre espèce.
Les populations de ces deux espèces de corvidés sont fortement corrélées à l'intensification des pratiques agricoles et sylvicoles.

Pégase | 16 septembre 2021 à 09h04 Signaler un contenu inapproprié

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